Les revendications de l’Etat Islamique pour tout attentat, toute action terroriste, de la voiture-bélier jusqu’à la moindre agression au couteau, suppose une administration centralisée, bien organisée, avec un système de réseau de communication efficace pour coordonner toutes les actions revendiquées.
N’importe quel groupe action de la police, d’un service de renseignement ou de l’armée sait que la moindre opération, aussi minime soit-elle (sabotage, enlèvement, élimination, etc.), nécessite un minimum d‘organisation avec une planification, un staff pour coordonner et gérer les différentes phases de l’opération, et peut-être même une répétition/simulation des actions à entreprendre.
Où sont basés les staffs et l’administration de l’Etat Islamique qui chapeaute toutes les actions terroristes revendiquées ?
Pas en Irak en tout cas. Jusqu’à la libération de Mossoul, il était encore permis de croire que la « capitale » principale de l’Etat Islamique était un centre de décision acceptable. La ville était supposée abriter le « calife » invisible, tous ses vizirs et toute son administration. Force est de constater que, durant toute l’épopée du calife invisible Al Baghdadi, qui a débuté en 2014 par l’invasion de Mossoul et qui s’est terminée par sa mort mystérieuse il y a quelques semaines, aucune décision califale ou de son administration n’est sortie de Mossoul. C’était un calife fantôme dans un état fantôme, bien que la ville fût pleine à craquer de terroristes venant du monde entier.
Aujourd’hui, avec la libération de la « capitale » de l’Etat Islamique, l’on peut dire avec d’autant plus de certitude que les récents attentats de Barcelone ou d’ailleurs n’ont pas été planifiés à Mossoul. Bien qu’il reste ici ou là ce que l’on appelle encore des « bastions de l’Etat Islamique », ceux-ci sont dispersés dans le désert irakien, et il est difficile de faire croire qu’ils peuvent se coordonner pour organiser une attaque au couteau à Paris, à moins de refaire le coup des grottes de Tora Bora en Afghanistan. Pour ceux qui l’auraient oublié, voici à quoi était censé ressembler cet extraordinaire centre de décision où Oussama Ben Laden planifia l’effondrement de trois gratte-ciel avec deux avions seulement, et l’annihilation de toutes les preuves concernant la disparition de 2 300 milliards de dollars au Pentagone, grâce à un troisième avion qui a su se frayer un chemin à travers un trou minuscule pour précisément aller frapper la partie du Pentagone où se trouvait le service de comptabilité du Département de la Défense, éliminant ainsi l’équipe qui était en mesure d’établir la traçabilité des dépenses opérées sur le budget de la Défense.
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Les centres administratifs et de décisions pour la planification des attentats à l’échelle mondiale ne peuvent pas être en Syrie non plus. En supposant même que Raqqa fût une seconde capitale pour l’Etat Islamique, il n’y a jamais eu aucune décision ou acte administratif qui émanât de cette ville. Notons au passage que le calife fantôme se paye le luxe d’avoir deux capitales pour son califat fantôme. La situation actuelle de Raqqa est équivalente à celle de Mossoul. La préoccupation première des terroristes assiégés dans la ville est d’abord de sauver leur peau et l’on ne voit pas pourquoi ils perdraient un temps précieux dans la planification des opérations destinées uniquement à faire peur à quelques promeneurs dans les rues de Bruxelles ou de Londres. Même pour des terroristes, il existe un sens minimal des priorités.
Leur situation est encore pire dans les autres « bastions » en territoire syrien où ils sont traqués et harcelés par l’armée arabe syrienne. L’image que l’on nous a imposée du terroriste est celle d’un homme capable de tout sauf de réfléchir et qui, même avec une kalachnikov sur la tempe, n’aurait comme préoccupation que d’aller se faire sauter à l’autre bout du monde. De plus, nos médias qui ont l’imagination très fertile, bien plus fertile que celle de ceux qu’ils appellent « les complotistes », nous ont mis dans l’idée que, grâce à Internet, le terrorisme mondial n’a pas besoin d’un endroit spécifique pour organiser ses méfaits. Ainsi, internet permettrait non seulement l’endoctrinement, mais aussi le recrutement des futurs djihadistes. En fait on peut tout mettre sur le dos d’internet. Il n’y a pas si longtemps, les médias avaient bien tenté de présenter les mosquées comme des lieux de radicalisation, mais cela n’a pas fonctionné, et pour cause. En Europe, les lieux les plus surveillés sont sans doute les sites nucléaires et les mosquées.  Et des mosquées, il n’y en a pas tant que ça, elles sont donc d’autant plus faciles à surveiller.
Les mosquées étant éliminées comme lieux de radicalisation, les médias se sont rabattus sur les deux seuls autres endroits dont on peut tout dire sans courir le risque d’être contredit : la prison (personne, à moins d’être incarcéré, ne peut aller vérifier ce qui s’y passe), et internet (où il y a de tout).  Mais ce qui nous intéresse ici, c’est surtout Internet, car l’Etat Islamique n’a pas accès à nos prisons, en tout cas pas au point de pouvoir former des commandos kamikazes. Nous avons vu qu’il n’y avait plus aucune organisation centralisée possible en Irak (et il n’y en a d’ailleurs jamais eu). Il reste donc la Syrie.
Or, la Syrie, comme n’importe quel pays dans le monde peut bloquer l’accès à internet sur son territoire, sans même avoir recours à des moyens militaires. Avec l’aide de la technologie militaire russe, elle est donc  en mesure d’isoler une ville comme Raqqa, la supposée capitale de l’EI, de tout accès à internet. Elle peut également isoler les autres groupes de l’Etat Islamique, et ce, d’autant plus facilement que ces groupes sont circonscrits dans des zones géographiques bien délimitées. L’on imagine aisément que toutes les mesures dans ce sens ont dû être prises par l’armée arabe syrienne.
Cela signifie que, sans internet, l’entité qui se réclame de l’Etat Islamique qui envoie régulièrement des menaces à tous les états comme si elle suivait une mailing List, organise des attentats partout dans le monde, et envoie des directives à ses membres, ne peut en aucun cas être basée en Syrie ou en Irak. Pour bien mesurer l’ampleur de la farce, il suffit de se rappeler qu’avant l’arrivée de l’Etat Islamique, tous les attentats terroristes, absolument tous, étaient revendiqués par Al Qaida, et que, dès l’avènement du nouveau « califat », c’est celui-ci qui a pris le relais pour s’approprier l’ensemble des exactions terroristes dans le monde, laissant Al Qaida prendre tranquillement sa retraite en matière d’attentats et de menaces contre les pays occidentaux.
Et pourtant, derrière chaque revendication de l’Etat Islamique, il y a bel et bien une planification sophistiquée, une organisation minutieuse de toutes les étapes de chaque opération, un choix ciblé des acteurs directs, c’est-à-dire ceux qui mourront à la fin de chaque attentat (et nous avons une idée des critères du casting qui permettront de valider le narratif pos-attentats). Malheureusement, à ce jour, personne ne peut dire avec exactitude qui sont les planificateurs des attentats presque quotidiens qui endeuillent le monde. On ne peut se satisfaire des habituels « c’est la CIA », « c’est le Mossad », ou « c’est le MI6 ». Il est évident que ces agences, ainsi que bien d’autres, sont impliquées d’une manière ou d’une autre dans la plupart des attentats, mais il serait absurde de croire que ces services montent de telles opérations juste pour se faire plaisir ou parce qu’ils sont méchants. Ils exécutent des missions, rien de plus. Pour qui ? C’est la question primordiale, dont la réponse complète apportera bien des éclaircissements ; encore faudrait-il se la poser, plutôt que de s’embrouiller l’esprit dans des considérations destinées à obscurcir un peu plus la vision de la réalité.
 Avic – Réseau International