La nouvelle édition du « Global Trends, » l’étude prospective préparée par le renseignement US tous les quatre ans à l’attention de la nouvelle administration, prévoit un déclin de la domination américaine, désormais confrontée aux nouvelles puissances montantes des BRIC, ainsi que des risques accrus de conflits provoqués par la raréfaction des ressources.
BBC, 21 novembre 2008
La domination économique, militaire et politique des États-Unis devrait vraisemblablement diminuer au cours des deux prochaines décennies, estime un nouveau rapport des services de renseignement américain portant sur les perspectives mondiales.
Le National Intelligence Council (NIC) prévoit que la Chine, l’Inde et la Russie contesteront de plus en plus l’influence des États-Unis.
Il avertit également que le dollar pourrait n’être plus la principale devise internationale, et que les pénuries de nourriture et d’eau vont alimenter les conflits.
Toutefois, le rapport reconnaît que la réalisation de ces prévisions n’est pas une fatalité et dépendra des actions entreprises par les dirigeants du monde entier.
Intitulé « Tendances Mondiales 2025, » ce document préparé tous les quatre ans par le NIC est publié au moment où le nouveau président entre en fonction. Sa lecture s’annonce assez sombre pour Barack Obama, indique Jonathan Beale, le correspondant de la BBC à Washington, tant il dresse un tableau pessimiste pour l’avenir de l’influence et de la puissance des États-Unis.
« Les 20 prochaines années de transition vers un nouveau système sont lourdes de risques », indique le rapport. Washington devrait conserver son avantage militaire considérable, mais les progrès scientifiques et technologiques, l’usage de « tactiques de guerre irrégulière », la prolifération des armes de précision de longue portée, et l’usage croissant de la cyber-guerre « limiteront de plus en plus la liberté d’action des Etats-Unis ».
Néanmoins, les auteurs concluent que « Les États-Unis demeureront le principal acteur, mais seront moins dominants. »
Le rapport 2004 du NIC dépeignait un tableau plus optimiste de la position de l’Amérique à l’échelle mondiale, estimant que la domination des États-Unis devrait se poursuivre.
Mais cette nouvelle édition indique qu’avec la montée en puissance des économies de la Chine, l’Inde, la Russie et du Brésil les États-Unis auront à faire à plus de concurrence au sommet d’un système international multi-polaire.
L’Union européenne y est décrite comme devenant un « géant entravé », incapable de tirer parti de sa puissance économique au plan diplomatique ou militaire.
Un monde aux plus nombreux centres de pouvoir sera moins stable que celui où n’existaient qu’une ou deux superpuissances, occasionnant plus de possibilités de conflit, constate le NIC.
Le réchauffement de la planète, la croissance démographique et la croissance économique créeront des tensions supplémentaires sur les ressources naturelles et alimenteront des conflits dans le monde entier lorsque les nations entreront en concurrence pour s’en assurer l’accès.
« Les rivalités stratégiques vont vraisemblablement porter sur les domaines du commerce international, des investissements, de l’innovation technologique et de son acquisition, mais nous ne pouvons pas exclure un scénario semblable à celui du 19ème siècle, fait de course aux armements, d’expansion territoriale et de rivalités militaires », indique le rapport.
« Des types de conflits que nous n’avons pas connus depuis un certain temps - comme ceux portant sur les ressources - pourraient réapparaître. » [1]
Ces conflits, et la pénurie de ressources pourraient provoquer l’effondrement de gouvernements en Afrique et en Asie du Sud, et la montée de la criminalité organisée en Europe centrale et orientale, ajoute-t-il.
L’emploi des armes nucléaires sera de plus en plus probable, dit le rapport, car les « Etats voyous » et les groupes militants peuvent y accéder plus facilement.
Mais Al-Qaida pourrait décliner « plus tôt qu’on ne le pense », ajoute-t-il, en soulignant l’impopularité croissante de ce groupe dans le monde musulman.
« La perspective qu’Al-Qaida fasse partie du petit nombre de mouvements capables de s’installer sur le long terme n’est pas élevée, compte tenu de son intransigeance idéologique, de ses objectifs stratégiques irréalisable et de son incapacité à devenir un mouvement de masse », indique-t-il. [2]
Le NIC estime que les dirigeants disposeront d’une certaine latitude pour prendre des mesures afin de prévenir l’apparition de nouveaux conflits.
« Traiter et atténuer ces problèmes, sinon les résoudre, n’est pas au-delà des capacités des êtres humains, des systèmes politiques, [ou] dans certains cas, [...] des mécanismes du marché », a déclaré Thomas Fingar, le directeur du NIC.
Pour autant, il n’est pas inutile de se rappeler, comme le note notre correspondant, que les renseignements américains se sont déjà trompés par le passé.
Global Research, Michel Chossudovsky, 15 novembre 2008
La crise financière s’aggrave au risque de perturber gravement le système de paiement international.
Cette crise est bien plus grave que la Grande Dépression. Tous les grands secteurs de l'économie mondiale sont touchés. De récents rapports suggèrent que le système des lettres de crédit, ainsi que le transport maritime international, qui constituent la bouée de renflouage du système commercial international, sont potentiellement en danger.
Le « renflouage » bancaire, envisagé dans le cadre du fameux Troubled Asset Relief Program (TARP), loin d’être une « solution » à la crise, est « cause » de plus de débâcle.
Le « renflouage » contribue à servir le mécanisme de déstabilisation de l'architecture financière. Il transfère de grandes quantités d'argent public entre des mains de financiers privés, au détriment du contribuable. Il conduit au dérapage de la dette publique et à la centralisation du pouvoir bancaire sans précédent. Et qui plus est, l’argent du renflouage est utilisé par les géants financiers pour garantir leurs acquisitions d'entreprises, à la fois dans le secteur financier et dans l'économie réelle.
À son tour, cette concentration exceptionnelle de puissance financière accule à la banqueroute des pans entiers de l'industrie et de l'économie des services, provoquant la mise au chômage de dizaines de milliers d’employés.
Les hautes sphères de Wall Street éclipsent l'économie réelle. De grandes quantités d'argent, accumulées par une poignée de conglomérats de Wall Street et leurs associés des fonds spéculatifs (hedge funds), sont réinvesties dans l'achat de biens réels.
Les richesse de papier sont transformées en possession et contrôle des moyens de production réels, que sont notamment l'industrie, les services, les ressources naturelles, les infrastructures, etc.
Disparition de la demande du consommateur
L'économie réelle est en crise. L'augmentation du taux de chômage qui en résulte est propice à la baisse des dépenses de consommation, qui se répercute à son tour sur le volume des services et de la production de biens.
Aggravée par la politique macro-économique néolibérale, cette spirale descendante cumulative aboutit en fin de compte à une offre excédentaire de marchandises.
Les entreprises ne peuvent vendre leurs produits du fait de la mise au chômage des employés. Le consommateur, à savoir les travailleurs, a été privé du pouvoir d'achat nécessaire au maintien de la croissance économique. Avec ses maigres revenus, il ne peut se permettre d’acheter les biens produits.
La surproduction provoque la faillite en cascade
Les listes de biens invendus s'accumulent. Par la suite, la production s'écroule ; l’offre de marchandises diminue à cause de la fermeture des installations de production, notamment des usines de fabrication et de montage.
Dans ce processus de fermeture d'usines, toujours plus de travailleurs sont transformés en chômeurs. Des milliers d'entreprises en faillite sont chassées du paysage économique, provoquant l’affaissement de la production.
La misère généralisée et le déclin mondial du niveau de vie résultent des bas salaires et de la banalisation du chômage. C’est le fruit d'un régime économique mondial à main-d'œuvre bon marché préexistante, largement caractérisé par les usines d'assemblage à faible coût salarial des pays du tiers monde.
La crise actuelle couvre les contours géographiques de l'économie à main-d'œuvre bon marché, provoquant dans pays dits développés la paupérisation de grands pans de population (dont la classe moyenne).
Aux États-Unis, au Canada et en Europe de l'Ouest, la sphère industrielle entière est potentiellement en danger.
Nous avons affaire à un processus de restructuration économique et financière de longue durée. Dans sa phase initiale, démarrant dans les années 80 à l’ère Reagan-Thatcher, des établissements à l’échelon local et régional, des exploitations agricoles familiales et de petites entreprises, ont été déplacés et détruits. À son tour, le boom des fusions et des acquisitions dans les années 90 a conduit à la consolidation simultanée de grandes entités corporatives, à la fois dans l'économie réelle et dans les services bancaires et financiers.
Toutefois, dans les dernières évolutions, la concentration du pouvoir bancaire se fait au détriment des grandes entreprises.
Ce qui diffère dans cette phase particulière de la crise, c’est non seulement la capacité des géants financiers (grâce à leur contrôle déterminant sur le crédit) à créer du chaos dans la production de biens et les services, mais aussi à saper et à détruire les grandes compagnies de l’économie réelle.
Les faillites surviennent dans toutes les principales branches d'activité : fabrication, télécommunication, magasins de détail de biens de consommation, galeries marchandes, compagnies aériennes, hôtellerie et tourisme, sans parler de l'immobilier et de la construction, et des victimes de la désintégration du prêt hypothécaire à haut risque (subprime).
General Motors a confirmé qu'« il pourrait ne plus avoir d'argent liquide dans quelques mois, ce qui provoquerait l'un des plus grands dépôts de faillites de l'histoire étasunienne. » (USNews.com, 11 novembre 2008.) À son tour, cela pourrait se retourner contre la chaîne des industries connexes. L’évaluation des pertes d'emplois dans l'industrie automobile des États-Unis va de 30.000 à plus que 100.000. (Ibid).
Chute du cours de l'action General Motors
Aux États-Unis, les affaires de détail de consommation sont en difficulté : le prix des actions des chaînes de grands magasins JC Penney et Nordstrom s’est effondré. Circuit City Stores Inc a fait une demande de sauvegarde en vertu du Chapter 11. Les actions de Best Buy, la chaîne de détaillants en électronique, ont plongé.
Suite à l'effondrement de leurs valeurs boursières, Vodafone Group, la plus grande société anonyme de téléphonie mobile, sans mentionner la SA InterContinental Hotels, sont en difficulté. (AP, 12 novembre 2008). Aux quatre coins du monde, plus de deux douzaines de compagnies aériennes ont sombré en 2008, s'ajoutant à un chapelet de faillites de compagnies aériennes durant ces cinq dernières années. (Aviation and Aerospace News, 30 octobre 2008). Stirling, la deuxième compagnie aérienne commerciale du Danemark, s’est déclarée en faillite. Aux États-Unis, un nombre croissant de sociétés immobilières ont déjà déposé une demande de sauvegarde de faillite.
Vodophone. Chute du cours de l’action
InterContinental Hotels SA
Dans les deux derniers mois, aux Etats-Unis, de nombreuses fermetures d'usines ont entraîné le congédiement définitif de dizaines de milliers d’employés. Ces fermetures touchent plusieurs domaines clés de l'activité économique, notamment le secteur pharmaceutique et chimique, l’industrie automobile et ses branches affiliées, l'économie des services, etc
Dans les usines, les commandes ont énormément diminué. Une étude de l’entreprise Autodata a signalé en octobre que « la vente de voitures et camionnettes avait chuté de 27 pour cent en septembre par rapport à l’an dernier. » (Washington Post, 3 octobre 2008)
Le chômage
Selon le US Bureau of Labor Statistics, 240.000 emplois ont été perdus uniquement au mois d'octobre :
Le US Bureau of Labor Statistics du Ministère du Travail étasunien a rapporté aujourd'hui que le nombre des emplois salariés non agricoles a chuté de 240.000 en octobre, le taux de chômage passant de 6,1 à 6,5 pour cent. Tel que cela a été revu et corrigé, cette perte d'emploi salarial en octobre suivait le dégraissage de 127.000 postes d’août et de 284.000 en septembre. 1,2 millions d’emploi ont été perdus dans les 10 premiers mois de 2008, plus de la moitié de la baisse s'étant produite au cours des 3 derniers mois. En octobre, les pertes d'emplois continuent dans l'industrie manufacturière, la construction, et chez plusieurs prestataires de services industriels . . .
Parmi les chômeurs, le nombre de gens ayant perdu leur emploi et ne pensant pas être rappelés au travail, est passé de 615.000 à 4,4 millions en octobre. Au cours des 12 derniers mois, la taille de ce groupe a augmenté de 1,7 millions. [?] (Bureau of Labor Statistics, novembre 2008)
Les chiffres officiels ne décrivent ni la gravité de la crise ni ses effets dévastateurs sur le marché du travail, puisque nombre de pertes d'emplois ne sont pas signalées.
La situation dans l'Union Européenne est tout aussi inquiétante. Un récent rapport britannique indique la probabilité d’une mauvaise passe de chômage généralisé dans le Nord-Est de l'Angleterre. En Allemagne, un rapport publié en octobre suggère que 10 à 15% de tous les emplois dans l’automobile du pays pourraient être perdus.
Des suppressions d'emplois ont aussi été annoncées dans les usines de General Motors et de Renault-Nissan en Espagne. La vente de voitures neuves en Espagne a chuté de 40 pour cent en octobre par rapport aux ventes du même mois l'an dernier.
Employés du constructeur automobile Nissan manifestant devant le siège de la société japonaise à Barcelone (AFP)
Faillites et saisies : Une opération de pêche aux capitaux des géants de la finance
Parmi les entreprises au bord de la faillite quelques-unes sont des affaires extrêmement rentable. Question importante : qui prend le contrôle des droits de propriété des corporations industrielles géantes en faillite ?
Les faillites et les saisies hypothécaires sont des opérations de pêche aux capitaux. Avec l'effondrement des valeurs boursières, le prix de l’action des sociétés cotées subit une importante chute, qui affecte immédiatement la solvabilité et la capacité de ces sociétés à emprunter et/ou à renégocier leur dette (qui est basée sur la valeur cotée de leurs actifs).
Les spéculateurs institutionnels, hedge funds et autres, ont tiré profit de butins inattendus.
Ils déclencher l'effondrement des sociétés cotées grâce à la vente à découvert et autres opérations spéculatives. Ils profitent ensuite de leurs gains de la spéculation à grande échelle.
Selon un rapport publié dans le Financial Times, il est évident que l’effondrement de l'industrie automobile aux États-Unis résulte en partie de manipulations : « General Motors et Ford ont perdu 31 pour cent, à 3,01 dollars, et 10,9 pour cent, à 1,80 dollars, malgré l'espoir en un possible sauvetage par Washington de l'industrie au bord de la ruine. La chute est venue après que la Deutsche Bank ait fixé un prix cible de zéro pour GM. » (Financial Times, 4 novembre 2008)
Les financiers se livrent à une débauche de shopping. Les 400 milliardaires étasuniens de Forbes attendent dans les limbes.
Dès qu'ils auront consolidé leur position dans le secteur bancaire, les géants financiers, incluant JP Morgan Chase, Bank of America, et d’autres, utiliseront leurs gains inattendus et l’argent du renflouage qui leur est fourni dans le cadre du TARP, pour élargir leur contrôle à l'économie réelle.
La prochaine étape consiste à transformer les actifs liquides, à savoir la richesse en papier monnaie, en achats de patrimoines de l’économie réelle.
À cet égard, Berkshire Hathaway Inc de Warren Buffett est l'un des principaux actionnaires de General Motors. Plus récemment, suite à l'effondrement des valeurs boursières en octobre et novembre, Buffett a renforcé sa participation dans le producteur pétrolier ConocoPhillips, sans mentionner Eaton Corp, dont le cours à la Bourse de New York a chuté de 62% par rapport à son pic de décembre 2007 (Bloomberg).
Les cibles de ces acquisitions sont les nombreuses industries très productives et les entreprises du secteur des services, qui sont au bord de la faillite et/ou dont la valeur boursière s’est effondrée.
Les gestionnaires de l’argent ramassent les morceaux.
Propriété de l'économie réelle
Suite à ces développements, qui découlent directement de la crise financière, l'ensemble de la structure de la propriété du patrimoine de l'économie réelle est en effervescence.
La richesse de papier, accumulée par les opérations d'initiés et la manipulation des actions du marché, sert à prendre le contrôle du patrimoine économique réel, en déplaçant les structures de la propriété préexistante.
Ce dont nous avons affaire est une relation malsaine entre l'économie réelle et le secteur financier. Les conglomérats financiers ne produisent pas de marchandises. Ils font essentiellement de l'argent grâce à la conduite de transactions financières. Ils utilisent le produit de ces transactions pour prendre le contrôle de sociétés valables de l’économie réelle, qui produisent des biens et des services pour la consommation des ménages.
Dans une évolution déplaisante, les nouveaux propriétaires de l'industrie sont des spéculateurs institutionnels et des manipulateurs financiers. Ils sont en train de devenir les nouveaux capitaines de l'industrie, non seulement en déplaçant les structures de la propriété préexistante, mais aussi en installant leurs copains dans le fauteuil des gestionnaires des entreprises.
Pas de réforme possible dans le cadre du Consensus Washington-Wall Street
Le sommet financier du G-20 à Washington du 15 novembre confirme le consensus Washington-Wall Street.
Bien que présentant officiellement un projet de restauration de la stabilité financière, dans la pratique l'hégémonie de Wall Street reste intacte. La tendance va vers un système monétaire unipolaire dominé par les États-Unis et soutenu par leur supériorité militaire.
Les artisans du désastre financier, grâce à la Gramm-Leach-Bliley Financial Services Modernization Act (FSMA) de 1999, ont été investi de la tâche d'apaiser la crise qu’ils ont eux-mêmes créée. Ils sont à l’origine de la débâcle financière.
Le sommet financiers du G20 ne remet pas en question la légitimité des hedge funds ni des divers effets de commerce du marché des dérivés. Le communiqué final comporte un engagement imprécis et confus : « pour mieux réglementer les hedge funds et créer plus de transparence dans la garantie des prêts liés à des valeurs mobilières, dans le but de stopper la glissade économique mondiale. »
La solution à cette crise peut venir uniquement d’un processus de « désarmement financier, » qui remette vigoureusement en cause l'hégémonie des institutions financières de Wall Street, notamment leur contrôle sur la politique monétaire. Le « désarmement financier » nécessiterait aussi le gel des effets de commerce spéculatif, le démantèlement des hedge funds et la démocratisation de la politique monétaire. L’expression « désarmement financier » a été inventée à l’origine par John Maynard Keynes dans les années 40.
Obama approuve la déréglementation financière
Barack Obama a adopté le consensus Washington-Wall Street. Dans une tournure désagréable, l'ancien député Jim Leach, un républicain qui parrainait la FSMA en 1999 à la Chambre, est maintenant conseiller d’Obama dans l’élaboration d’une solution opportune à la crise.
Jim Leach
Jim Leach, Madeleine Albright et l'ancien Ministre des Finances Larry Summers, qui a aussi joué un rôle clef dans l’adoption de la FSMA, étaient présents le 15 novembre au sommet financier du G-20 en tant qu’équipe consultative du Président élu Barack Obama :
Barack Obama et Joe Biden, le Président et le Vice President élus, ont annoncé que l'ancienne Ministre des Affaires Étranges, Madeleine Albright, et l'ancien député républicain Jim Leach, seront disponible pour rencontrer en leur nom les délégations du G-20 lors de la réunion du sommet. Leach et Albright tiennent ces réunions non officielles pour obtenir la contribution des délégations en visite au nom du Président et du Vice President élus. (mlive.com, 15 novembre 2008)
Original : www.globalresearch.ca/index.php?context=va&aid=10977
Nous tenons à dire haut et fort que nous soutenons Thierry Meyssan, le seul journaliste à faire son boulot et à dénoncer l'inadmissible dans notre pays et dans la politique moyenorientale et mondiale. La France ne s'appartient plus. Elle est aux ordres de l'Atlantisme, de la CIA, de l'OTAN et du Mossad. Le témoignage éloquent de Thierry, obligé de fuir parce que sa vie était en danger est un véritable scandale. Nous savions notre pays infiltré mais là, ça dépasse tout ce que l'on pouvait imaginer.
Entretien avec un dissident français contraint à l’exil
Thierry Meyssan : « Si j'avais plié, je n'aurais pas eu à partir »
Vous avez quitté la France il y a un an, en septembre 2007. Vous n’êtes pas n’importe quel expatrié : vous êtes connu dans le monde entier comme l’initiateur du mouvement de contestation de la version gouvernementale des attentats du 11 septembre, le leader d’un mouvement anti-impérialiste, et dans certains pays vous êtes présenté comme le principal dissident occidental. Pourquoi avez-vous été contraint à l’exil ?
Thierry Meyssan : En décembre 2002, le secrétaire US à la Défense Donald Rumsfeld a signé la directive 3600.1 visant à discréditer ou à éliminer des personnalités françaises qui s’opposaient à la Guerre globale au terrorisme [1]. Cette liste comprenait en premier chef Jacques Chirac, puis de grands industriels, j’y figurais en plus à cause de mon travail sur le 11-Septembre.
On était trois mois avant l’invasion de l’Irak. C’était l’époque de l’hystérie anti-française à Washington. Les services secrets français ont été informés que des assassinats avaient été sous-traités par le Pentagone au Mossad et m’ont mis en garde. Mes amis et moi, nous avons cherché à prendre contact avec les autres cibles. Un des administrateurs du Réseau Voltaire, était un ancien ami de l’une de ces personnalités. Nous avons pris rendez-vous avec elle, début mars, mais elle est décédée quelques jours avant le rendez-vous, dans des circonstances qui ont été qualifiées de très suspectes par les enquêteurs.
L’État a alors réagi. Le président Chirac a joint par téléphone le Premier ministre israélien et l’a prévenu que toute action entreprise non seulement sur le territoire français, mais n’importe où dans l’Union européenne, serait considérée comme un acte hostile envers la France. À chacun de mes déplacements hors de l’Union européenne, les services français joignaient leur homologues locaux pour leur demander de veiller à ma protection.
Je savais qui est Nicolas Sarkozy [2] et je me doutais bien que les choses changeraient avec son élection. Lorsque je suis rentré de voyage pour voter, le 6 mai 2007, j’ai été arrêté devant les autres passagers à la sortie de l’avion à Orly. Après m’avoir fait poireauter avec des clandestins et des trafiquants de toutes sortes, un officier de la DST m’a laissé sortir en me disant : « Bienvenue au pays M. Meyssan, un pays qui va bientôt changer, beaucoup changer ». Le soir Sarkozy était élu. Quelques jours plus tard, il était à l’Élysée et commençait la purge.
Pendant l’été, Nicolas Sarkozy s’est rendu en famille aux États-Unis. Il était accompagné de nombreux collaborateurs qui suivaient son avion de ligne dans un avion officiel. Ils ont eu des entretiens avec l’Administration Bush sur toute une série de sujets, graves ou futiles. J’ai été informé que les États-Uniens avaient demandé que des mesures soient prises pour me neutraliser en application des Décrets présidentiels US 13438 et 13441 [3]. J’ai cru au début que ces décrets étaient fondés sur le Patriot Act et je ne voyais pas comment ils pouvaient trouver une application en droit français. Je me disais que les atlantistes finiraient bien par inventer un biais juridique et que je devais songer à prendre le large, mais je croyais avoir beaucoup de temps devant moi. Il s’est avéré que ces décrets se fondaient sur le Trading with the Enemy Act de 1917 et ses développements ultérieurs. En d’autres termes, j’étais désormais considéré comme une menace pour la sécurité des États-Unis. Le Pentagone, qui fait jouer la clause 5 du Traité OTAN depuis les attentats de 2001, a demandé l’assistance automatique de ses alliés. Bref, tous les services secrets des États membres de l’Alliance atlantique pouvaient être sollicités pour me neutraliser. J’ai été informé que quelque chose se tramait contre moi. J’ai fait mes valises et j’ai quitté la France deux jours plus tard.
Au demeurant, le danger ne se limite pas aux pays de l’OTAN. Une opération a été organisée contre moi en décembre 2007 à Caracas, qui a été déjouée par la police vénézuélienne. En août 2008, j’ai dû annuler ma participation à une conférence internationale en Autriche après avoir été avisé par un État ami qu’une opération avait été préparée contre moi.
En outre, des pressions sont exercées contre mes compagnons de lutte au Proche-Orient, en Amérique latine et dans d’autres États européens. Je ne peux vous en faire la liste sans compliquer les problèmes. Jürgen Cain Kulbel a été brièvement incarcéré en Allemagne et pourrait l’être à nouveau. Techniquement, le seul fait retenu contre lui par le tribunal est le lien qu’il avait installé sur son site web pointant sur celui du Réseau Voltaire [4].
Avez-vous des preuves que vous êtes réellement en danger — comme vous le dites — en France et dans les pays de l’OTAN ?
Thierry Meyssan : Non, les listes US sont secrètes, sauf en ce qui concerne les avoirs financiers bloqués aux USA, mais je n’en ai pas. Mais j’ai des témoins de plusieurs contacts.
La France est une démocratie et est considérée comme la patrie des droits de l’homme. Ce n’est pas le Chili sous la dictature de Pinochet. Que vous ayez dû la quitter n’est-il pas tout simplement incompréhensible, en particulier pour les citoyens français ?
Thierry Meyssan : Ces situations ne sont pas comparables. Au Chili, les États-Unis avaient installé une dictature militaire. En France, ils disposent juste d’agents au sommet de l’État et à la tête des différents services de sécurité. Mes concitoyens devraient être plus attentifs à la répression actuelle qui frappe à la fois des hommes politiques de premier plan, de hauts fonctionnaires et des journalistes. L’équipe de Nicolas Sarkozy s’appuie sur quelques magistrats dévoyés pour paralyser ses adversaires politiques et abuse de son pouvoir et de son influence pour virer les journalistes qui refusent de se courber.
Regardez d’abord la prise de contrôle des médias. Sarkozy a placé les siens à la tête des médias privés et purge les médias publics. Il y a un an, les syndicats de journalistes ont appelé l’opinion publique au secours [5]. Ils affirmaient qu’il devenait impossible d’enquêter sur Nicolas Sarkozy et de relater les critiques populaires dont il fait l’objet. Ils s’inquiétaient de perdre la liberté de s’exprimer en étant pris en tenaille entre d’une part des juges qui violaient le secret des sources, et d’autre part, des patrons de presse directement liés à l’Élysée. Personne ne les a cru et maintenant, c’est trop tard. Tout est verrouillé.
Des exemples ? L’équipe du président s’est installée à TF1 et une de ses anciennes maîtresses y présente le JT [6]. Les médias étrangers se sont gaussés de cette affaire, mais les médias français qui l’ont évoquée ont été condamnés pour « atteinte à la vie privée ». C’est un invraisemblable détournement de la loi de 1881 sur la presse. Désormais, la corruption et le népotisme, lorsqu’ils concernent l’équipe Sarkozy, sont des sujets tabous. Les aborder, vous conduit directement en correctionnelle.
Sarkozy a corrompu publiquement une dizaine d’éditorialistes en leur offrant des prébendes [7]. Certains ont été engagés dans des cabinets ministériels, voire à l’Élysée, d’autres ont été nommés dans des commissions bidon, où, réduits à l’état de courtisans, ils bénéficient des fastes de la République. Louis XIV tenait la noblesse en l’occupant à Versailles, Sarkozy distrait les éditorialistes qui devraient analyser sa politique en les occupant à des mondanités et en leur faisant rédiger des rapports qu’il ne lit pas.
Pendant ce temps, les époux Kouchner-Ockrent licencient à RFI et France24 tous ceux qui résistent à l’influence US. Après Richard Labévière [8], un rédacteur en chef réputé qui avait le défaut de donner la parole aux anti-atlantistes, le dernier en date est Grégoire Deniau pour avoir organisé un débat sur le 11-Septembre en invitant en première partie Issa El-Ayoubi, vice-président du Réseau Voltaire, et en seconde partie Atmoh, porte-parole de ReOpen911.
Le problème, ce ne sont pas les journalistes. Il y en a de remarquables en France. Ce sont les médias. Ils sont déjà sous contrôle et la fonction de contre-pouvoir n’est plus assurée.
Par ailleurs, lorsque le grand public entend parler d’une affaire pénale qui touche une personnalité, il n’y voit qu’un cas particulier. Mais si l’on met en perspective tous ces cas particuliers, on voit bien qu’ils traduisent une stratégie.
Sur plainte personnelle de Nicolas Sarkozy, des juges d’instruction ont interdit de voyager à l’ancien Premier ministre, Dominique de Villepin, et l’ont astreint à payer une caution démesurée et humiliante. Bien que ne disposant d’aucun élément concret à charge, le procureur vient de le renvoyer en correctionnelle. L’affaire Clearstream offre certes à Sarkozy un moyen d’éliminer un rival politique, mais il ne l’a pas pour autant organisée. C’est une machination montée de toutes pièces par son beau-père, l’ambassadeur Frank Wisner, via une de ses officines londoniennes, Hakluyt & Co [9]. Le but est d’envoyer Villepin en prison pour que nul n’ignore qu’on ne défie pas impunément le secrétaire d’État des États-Unis au Conseil de sécurité de l’ONU.
Des magistrats ont perquisitionné le domicile de l’ancien directeur des Renseignements généraux, Yves Bertrand, pour lui extorquer les secrets des chiraquiens. Et ces jours-ci, des documents saisis sont miraculeusement arrivés dans des rédactions parisiennes. Des hebdomadaires proches du pouvoir en ont publié des extraits. Il semble que l’on cherche à faire passer des documents de travail, énonçant des hypothèses, pour des rapports finaux, présentant des conclusions. Et que l’on cherche à faire croire que les RG persécutaient les seuls socialistes. C’est de la manipulation pure et simple. Chaque fois que l’on est dans l’opposition, on doit se protéger de cette police politique, et chaque fois que l’on est au pouvoir, on fait des pieds et des mains pour se procurer des copies de ses notes. Le pouvoir exerce une pression incroyable sur ce fonctionnaire pour le faire craquer. C’est bien hypocrite. Car dans le même temps, au lieu de dissoudre enfin les RG, on les a réorganisés et on a augmenté leurs moyens en les fondant dans une administration plus opaque encore.
Jusqu’au capitaine Paul Barril qu’ils ont mis en prison pour lui arracher les secrets de Mitterrand. Ils l’ont accusé d’être un tueur à gage et l’ont si maltraité qu’il a dû être hospitalisé, avant d’être relâché sous caution. À ce propos, permettez moi une digression sur le génocide rwandais. Barril s’est défendu des attaques portées contre lui à ce sujet en mettant en cause le président Kagamé. Celui-ci a alors commandité un rapport sur l’implication française dans ce drame historique. À le lire, on comprend que les officiers supérieurs français, François Mitterrand et tout son cabinet, et le gouvernement de cohabitation dans son ensemble seraient tous responsables du génocide… sauf, bien sûr le ministre du Budget et porte-parole du gouvernement de l’époque, Saint Nicolas Sarkozy. C’est stupide. Il y a à l’évidence des responsabilités françaises, mais certainement pas de culpabilité collective. Et au demeurant, il est impossible de comprendre et de juger ce crime, qui fit plus de 800 000 morts, sans le replacer dans son contexte et juger aussi les guerres des Grands Lacs qui firent au total plus de 6 millions de morts et dont les responsables ne sont pas à chercher à Paris, mais à Washington et Tel-Aviv.
Maintenant, les atlantistes montent une affaire contre Jacques Chirac qu’ils accusent d’avoir organisé, il y a dix ans, l’assassinat d’un journaliste qui aurait mis son nez dans ses comptes bancaires à l’étranger. Le pouvoir déploie des moyens extravagants pour construire cette nouvelle machination. Ainsi, un juge d’instruction a procédé à une perquisition au cabinet de l’avocat de Chirac dans des conditions plus que douteuses. Mais à Washington, on n’a pas pardonné à Chirac de s’être opposé à l’invasion de l’Irak et on inventera n’importe quoi pour le faire tomber.
Je ne dis pas que tous ces gens sont des anges, mais ce dont on les accuse est grotesque et ressort exclusivement de la persécution politique. Je ne dis pas non plus que la Justice est pourrie, mais que ces affaires ont été confiées à des juges et à des procureurs qui sont aux ordres.
Quand à ceux que les atlantistes ne peuvent impliquer dans de pseudo-affaires pénales, ils les espionnent. En juin-juillet-août 2007, le bureau du Réseau Voltaire à Paris a été placé sous surveillance. Toute personne entrante ou sortante a été photographiée, des filatures nécessitant un important personnel ont été conduites pour identifier les uns et les autres. Ce traitement est général. Même le domicile de Ségolène Royal a été « visité » plusieurs fois par les services secrets, c’est-à-dire illégalement perquisitionné.
Depuis le 1er juillet 2008, la nouvelle Direction centrale du renseignement intérieur met en place dans l’urgence le fichier EDVIGE, en violation des Traités internationaux, notamment du Pacte de l’ONU sur les droits civils et politiques. Elle fiche les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses, l’appartenance syndicale, l’état de santé et les pratiques sexuelles de tous les Français. La DCRI n’en reste pas là, elle utilise les dernières techniques US d’étude des « réseaux sociaux » pour cartographier vos relations amicales, professionnelles et politiques. On ne vise plus simplement des individus, mais les milieux dans lesquels ils évoluent, les groupes auxquels ils participent. Un recours a été engagé en Conseil d’État par le SM, la LDH, le SAF, des associations gays et des syndicats, qui débouchera peut-être sur l’annulation du décret en décembre. Nicolas Sarkozy a endormi l’opinion publique en déclarant lui-même qu’il fallait revoir le décret, mais il ne l’a pas abrogé.
En attendant, pendant ces six mois, on collecte et informatise des données. Une affaire survenue dans le Rhône a révélé que, malgré les déclarations lénifiantes du président, la police du Rhône fichait la religion des fonctionnaires territoriaux. C’est une maladresse qui révèle l’ampleur du travail de renseignement en cours. Il est improbable que ces données soient jamais détruites, même si le juge administratif le requiert. Elles seront simplement intégrées au fichier CRISTINA et classées Secret-Défense. En définitive, on aura utilisé les moyens des ex-Renseignements généraux pour constituer un fichier au profit de l’ex-DST, qui est sensée ne s’occuper que de contre-espionnage. Puis, dans le cadre de la prétendue coopération anti-terroriste, ces données politiques seront transmises aux services états-uniens, car CRISTINA est conçu pour être compatible avec les fichiers US.
Cela vous étonne ? Mais déjà bien des données individuelles sont transmises aux USA en violation des lois françaises et des conventions européennes. C’est vrai pour tout ce qui concerne vos virements bancaires internationaux [10] ou vos déplacements aériens [11].
La France a déjà basculé dans une forme de régime autoritaire sous tutelle US. On dit qu’une grenouille plongée dans de l’eau tiède que l’on porte lentement à ébullition ne régit pas au changement progressif de température, qu’elle s’engourdit et meurt. Les Français se comportent de la même manière. Ils tolèrent la destruction progressive de leurs libertés. Ils ont déjà largement dépassé le seuil du tolérable et ne réagissent pas, ne réagissent plus.
Sous l’égide des États-Unis, les dictatures d’Amérique latine avaient mis en place dans les années 70 un système de persécution des opposants politiques appelé Plan Condor. Vous avez écrit que ce système a été réactivé et étendu dans le monde à travers l’OTAN. La comparaison n’est-elle pas exagérée ?
Thierry Meyssan : Ce n’est pas une comparaison. C’est une constatation [12]. Elle a été confirmée par de des rapports officiels au Parlement européen et au Conseil de l’Europe [13]. Les États-Unis ont étendu à l’Europe occidentale les méthodes qu’ils avaient utilisé il y a quarante ans en Amérique latine [14]. Une internationale de la répression est déjà à l’œuvre [15]. Des centaines de personnes ont été enlevées sur le territoire de l’Union européenne, exfiltrées et torturées. Jacques Chirac a protégé notre pays de ces crimes, il n’en est plus de même aujourd’hui. Le premier cas identifié est celui de Mohammad As-Siddik, disparu en plein Paris le 13 mars dernier alors que la France devait le présenter à une juridiction de l’ONU [16], mais il doit y en avoir déjà beaucoup d’autres.
Plus de 80 000 personnes ont transité au cours des sept dernières années dans les prisons secrètes de la CIA et de la Navy. 26 000 sont actuellement séquestrées [17].
Les exemples sont nombreux de personnes sur lesquelles planait la menace d’un assassinat et qui ont été retrouvées mortes d’une autre manière : suicide, crise cardiaque, accident... Voulez-vous vous suicider ? Avez-vous des problèmes de santé ? Prenez-vous des risques dans vos déplacements ?
Thierry Meyssan : Je ne suis pas dépressif et n’ai aucune inclination suicidaire. J’ai fait faire des examens de santé et n’ai aucune maladie susceptible de provoquer une mort subite. Je fais attention dans mes transports et ne me déplace jamais seul.
Lorsque les menaces ont commencé à se concrétiser, avez-vous été soutenu en France ? Des organisations politiques vous ont-elles aidé ? Les autres journalistes vous ont-ils défendu ?
Thierry Meyssan : Aucune organisation ne m’a aidé. La plupart de mes « confrères » journalistes ont fuit la difficulté. Reniant la tradition voltairienne de la presse, ils ont prétexté ne pas vouloir se prononcer sur les polémiques entretenues contre moi pour ne pas voir ce qui était en train de se passer. C’est l’excuse classique des lâches chaque fois que la liberté est en question. Certains cependant m’ont aidé et je ne vais pas les dénoncer. Pareil parmi les politiques et les militaires.
Non seulement, ceux qui auraient dû me défendre ne l’ont pas fait, mais des gens ordinaires qui n’ont rien à voir avec tout cela ont prêté leur concours à une surveillance illégale. La banque qu’utilisait le Réseau Voltaire (en l’occurrence l’agence Gare de l’Est du Crédit coopératif) nous a convoqué pour nous demander de révéler le nom de nos principaux donateurs, ce qu’évidemment nous avons refusé de faire. Nous avons alors clôturé notre compte et ouvert une autre structure hors de la zone OTAN. Mais cette procédure illégale a été étendue à mes proches et à mes compagnons de lutte. Lorsque l’un d’entre eux encaisse sur son compte un versement ou un virement de plus de 500 euros , il est joint par son banquier qui lui demande d’en justifier la provenance. Pour n’importe qui, c’est étouffant, pour un commerçant ou un travailleur indépendant, c’est du harcèlement.
Vous avez quitté la France alors qu’elle évolue - dites-vous - vers un régime répressif. Avez-vous abandonné votre pays ? Avez-vous abandonné le combat politique ?
Thierry Meyssan : Certainement pas. C’est l’inverse. J’ai quitté la France pour poursuivre mon combat. Les États-Unis ont tenté différentes approches contre moi : d’abord me discréditer, puis me ruiner, puis me corrompre, enfin m’éliminer. Si j’avais plié, je n’aurais pas eu à partir. C’est parce que j’aime la France et l’idéal qu’elle porte que je suis parti.
Ma situation semble exceptionnelle. C’est faux. Je suis simplement le premier à qui cela arrive. Il y en aura d’autres.
Votre pays vous manque-t-il ? Voulez-vous y retourner ?
Thierry Meyssan : Des amis m’entourent ici, mais la France est ma patrie. J’y ai laissé les miens. Comment voulez-vous qu’elle ne me manque pas ?
Entretien réalisé à Beyrouth. Notes ajoutées à la relecture.
[1] « Rumsfeld cible la France et l’Allemagne », Réseau Voltaire, 2 janvier 2003.
[2] « Opération Sarkozy : comment la CIA a placé un de ses agents à la présidence de la République française », Réseau Voltaire, 19 juillet 2008.
[3] Presidential Executive Order 13438 : Blocking Property of Certain Persons Who Threaten Stabilization Efforts in Iraq, signé par George W. Bush le 17 juillet 2007, et Presidential Executive Order 13441 : Blocking Property of Persons Undermining the Sovereignty of Lebanon or Its Democratic Processes and Institutions, signé le 1er août 2007.
[4] « Un collaborateur du Réseau Voltaire incarcéré à Berlin », Réseau Voltaire, 10 juin 2008.
[5] « Nicolas Sarkozy étouffe les journalistes français », Réseau Voltaire, 24 septembre 2007.
[6] « La sarkozysation de l’audiovisuel français », Réseau Voltaire, 10 juin 2008.
[7] « Nicolas Sarkozy corrompt publiquement de grands éditorialistes », Réseau Voltaire, 4 octobre 2007.
[8] « Pourquoi les époux Kouchner veulent-ils la tête de Richard Labévière ? », Réseau Voltaire, 29 août 2008
[9] « Opération Sarkozy : comment la CIA a placé un de ses agents à la présidence de la République française », Ibid.
[10] « Les transactions financières internationales sous contrôle états-unien », par Jean-Claude Paye, Réseau Voltaire, 28 avril 2008.
[11] « L’espace aérien sous contrôle impérial », par Jean-Claude Paye, Réseau Voltaire, 13 octobre 2007.
[12] « L’OTAN : du Gladio aux vols secrets de la CIA », par Ossama Lotfy, Réseau Voltaire, 24 avril 2007.
[13] Allégations de détentions secrètes et de transferts illégaux de détenus concernant des États membres du Conseil de l’Europe ? Rapport de Dick Marty au Conseil de l’Europe, 12 juin 2006.
[14] « Faut-il combattre la tyrannie avec les instruments des tyrans ? », par Dick Marty, Réseau Voltaire, 22 mars 2007.
[15] « Les lois anti-terroristes. Un Acte constitutif de l’Empire » et « Les populations sous surveillance », entretiens de Jean-Claude Paye avec Silvia Cattori, Réseau Voltaire, 12 septembre 2007 et 15 février 2008.
[16] « Kouchner a « perdu » le témoin-clé de l’enquête Hariri », par Jürgen Cain Külbel, Réseau Voltaire, 21 avril 2008.
[17] « 17 prisons secrètes ont déjà remplacé Guantanamo », Réseau Voltaire, 3 juin 2008.
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