La politique israélienne en Afrique : fomenter des guerres et s’accaparer les ressources naturelles
jeudi 26 février 2015
Will Jordan & Rahul Radhakrishnan
Les services de renseignement sud-africains accusent Israël
« d’alimenter l’insurrection, » les ventes d’armes et de
« s’approprier » les ressources africaines.
Le Cap, août 2014 - Manifestation de soutien à la Palestine - Photo : AFP
Des documents secrets obtenus par l’unité d’enquête d’Al Jazeera
exposent un profond dédain par les espions de l’Afrique du Sud pour
leurs homologues israéliens En effet ces évaluations des services de renseignement accusent
Israël de mener des politiques « cyniques » en Afrique qui comprennent
« l’alimentation de l’insurrection », « l’appropriation des diamants »
et même saboter l’approvisionnement en eau de l’Égypte. La méfiance politique de la part des Sud-Africains n’est guère
surprenante étant donné la vaste coopération militaire et répressive
d’Israël avec le régime d’apartheid renversé en 1994. Le gouvernement
sud-africain actuel est dirigé par le Congrès national africain, qui
soutient l’Organisation de libération de la Palestine. Une analyse produite par les services de renseignements sud-africains
critique vertement une tournée des pays africains par le ministre
israélien des Affaires étrangères en 2009, en la qualifiant « d’exercice
de cynisme. » Ce voyage de neuf jours d’Avigdor Lieberman en Ethiopie, au Nigeria,
au Ghana, en Ouganda et au Kenya avait jeté les bases pour les ventes
d’armes et l’appropriation des ressources africaines, en se dissimulant
derrière « une façade philanthropique ». Israël a longtemps entretenu des liens avec les pays africains sur la
base de sa propre sécurité et de ses besoins diplomatiques. Ses liens
avec l’ancien régime d’apartheid en Afrique du Sud étaient largement
basés sur les besoins militaires, et incluaient la coopération dans le
développement d’armes nucléaires. Le Kenya, où les forces spéciales israéliennes ont préparé et
organisé un raid pour libérer des otages détenus à l’aéroport d’Entebbe
en Ouganda en 1977, est depuis longtemps un allié important. Des rapports dans les médias israéliens et nigérians ont révélé le
mois dernier que les États-Unis avaient bloqué la vente prévue par
Israël d’hélicoptères militaires au Nigeria. Les médias israéliens ont récemment salué l’approfondissement des
liens d’Israël avec le président Goodluck Jonathan pour empêcher une
résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies le 30 décembre
dernier, qui avait pour but d’imposer un calendrier pour un retrait
israélien des territoires palestiniens occupés. Le Nigéria avait tout d’abord signalé qu’il appuierait la résolution
palestinienne, mais son abstention a finalement empêché la résolution
d’obtenir la majorité voulue à l’intérieur du Conseil. « Des politiques destructrices » Le rapport « Géopolitique du pays et évaluation du renseignement »
rédigé par l’Afrique du Sud en octobre 2009 a accusé Israël de
poursuivre « des politiques destructrices » en Afrique, avec notamment : La
mise en danger de la sécurité de l’approvisionnement de l’eau en
Égypte : des scientifiques israéliens, selon le rapport, « ont créé un
type de plante qui fleurit sur la surface ou les rives du Nil et qui
absorbe ces grandes quantités d’eau pour réduire de manière
significative le volume d’eau qui atteint l’Égypte. » Le rapport
n’apporte cependant aucune preuve supplémentaire concernant cette
affirmation. Le
renforcement de l’insurrection au Soudan : Israël « travaille
assidûment à encercler et isoler le Soudan de l’extérieur, » dit le
rapport, « et alimente l’insurrection à l’intérieur du Soudan. » Des
agents du Mossad ont également « mis en place un système de
communication qui sert à la fois à espionner et isoler les
télécommunications présidentielles. » Israël a longtemps été en
désaccord avec Khartoum, et a soutenu le mouvement sécessionniste qui a
finalement rompu et a créé le Sud-Soudan, avec lequel il a des liens
diplomatiques. Khartoum continue à accuser les Israéliens d’être
responsables des attaques au Soudan. La subordination des services de renseignement du Kenya : « Dans le cadre de son safari
en Afrique centrale, le Mossad avait exposé aux Kenyans les activités
d’autres réseaux d’espionnage étrangers ». En retour, dit le rapport, le
Kenya lui a accordé la permission d’installer un siège sécurisé à
Nairobi et lui a fourni « un accès privilégié aux services de
renseignement du Kenya ». La
prolifération des armes : Israël a « contribué à armer certains régimes
africains et a aggravé les crises dans d’autres, y compris en Somalie,
au Soudan, en Érythrée et en Afrique du Sud », selon le document.
Aujourd’hui, il « est à la recherche de nouveaux marchés pour sa gamme
d’armes légères » et fournit secrètement des armements à « certains
pays, notamment l’Inde », y compris « des armements nucléaires,
chimiques, laser et ceux utilisant des technologies de la guerre
classique ». L’appropriation
des richesses minérales de l’Afrique : Israël « cherche à s’approprier
les diamants africains », révèle le rapport sud-africain, ainsi que
« l’uranium, le thorium et autres éléments radioactifs utilisés pour la
fabrication du combustible nucléaire ». La
formation de groupes armés : « Des retraités militaires israéliens sont
à l’affût de possibilités d’emploi en tant que formateurs de milices
africaines, » dit le rapport, « tandis que d’autres membres de la
délégation facilitaient des contrats pour que des Israéliens forment
diverses milices. » « Un exercice de cynisme » En 2009, lorsque Lieberman a fait sa tournée officielle en Afrique,
le ministère israélien des Affaires étrangères avait publié une
déclaration le citant comme disant : « la visite en Afrique est très
importante dans le renforcement et l’amélioration de la position
d’Israël dans la communauté internationale. » Mais les analystes de renseignement sud-africains ont une autre interprétation de cette initiative. « Alors que Liberman [sic] parlait avec les dirigeants africains de
la faim, du manque d’eau, la malnutrition et des épidémies affligeant
leurs nations, » écrivent-ils, « les promesses de Tel Aviv aux États
africains pouvaient être considérées comme un brillant exercice de
cynisme. » Le document d’Afrique du Sud ajoute : « les tentacules militaires,
sécuritaires, économiques et politiques d’Israël ont atteint toutes les
parties de l’Afrique, derrière une façade philanthropique ». Et il
considère que le Premier ministre Benjamin Netanyahu a lancé une
offensive diplomatique afin de gagner des amis en Afrique. Mais l’Afrique du Sud ne peut actuellement être considéré comme
faisant partie des amis, si l’on se fie à l’évaluation de l’Agence de la
Sécurité d’État. Lieberman a encore contrarié le gouvernement d’Afrique
du Sud en novembre 2013 quand il a averti la communauté juive du pays,
forte de 70000 personnes, qu’elle faisait face à un « pogrom » et ne
pouvait se sauver qu’en immigrant en Israël « immédiatement, sans délai,
avant qu’il ne soit trop tard. » « Le gouvernement d’Afrique du Sud est en train de créer une
atmosphère de sentiment anti-israélien et d’antisémitisme, » avait
déclaré Lieberman, « qui aboutira à un pogrom contre les juifs dans le
pays, et ce n’est qu’une question de temps ». Le Conseil juif sud-africain avait condamné les propos de Lieberman
comme « alarmistes et inflammatoires », et avait noté que les juifs
sud-africains enregistraient un taux d’antisémitisme relativement
faible.
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