Critique méthodique de l’immonde tissu de mensonges de Joseph Fadelle
S‘il est bien question de Prix à payer,
c’est celui qu’ont payé les chrétiens pour accueillir plus que
correctement cet escroc, depuis plus de 20 ans ! En d’autres termes, le
fric qu’il a gagné contre le torrent de mensonges grossiers proférés sur
l’islam. Bref, une belle arnaque qui fonctionne toujours parfaitement
aussi bien chez les chrétiens que chez les musulmans dès qu’un
néo-converti passe la porte du temple… Ce texte est très fouillé et
présente les preuves factuelles des mensonges de M. Fadelle, puisqu’il
donne les versets coraniques qui disent l’exact contraire que ce
qu’affirme cet escroc.
Bref, l’image ci-dessous montre bien qui est l’ennemi des catholiques et de la chrétienté, il s’agit bien de la révolution maçonnique et son athéisme satanique militant. Est-il utile de citer les coupables commanditaires des lois anti-chrétiennes, comme l’avortement, le mariage pour tous, bientôt la PMA et GPA… ?
Je suis personnellement pour le débat critique sur tous les sujets possibles, mais seulement dans un cadre respectueux. Je demanderais juste à ces contradicteurs de ne pas… mentir, car lorsqu’on a raison pourquoi devrait-on recourir à ce péché ?
Bref, l’image ci-dessous montre bien qui est l’ennemi des catholiques et de la chrétienté, il s’agit bien de la révolution maçonnique et son athéisme satanique militant. Est-il utile de citer les coupables commanditaires des lois anti-chrétiennes, comme l’avortement, le mariage pour tous, bientôt la PMA et GPA… ?
Je suis personnellement pour le débat critique sur tous les sujets possibles, mais seulement dans un cadre respectueux. Je demanderais juste à ces contradicteurs de ne pas… mentir, car lorsqu’on a raison pourquoi devrait-on recourir à ce péché ?
Nouveau roman à succès en France avec 50 000 exemplaires vendus fin 2010 [1] et un succès non démenti depuis, Le prix à payer est un récit autobiographique de Joseph Fadelle, ancien musulman irakien converti au christianisme à la fin des années 1980.
Le but de cet article n’est pas d’émettre un quelconque jugement à
propos d’un parcours personnel qui mérite en soi tolérance, mais de
mettre en relief un ensemble de procédés et d’idées présentés comme
faisant partie intégrante de l’islam pour justifier sa propre démarche,
et contribuant à nourrir incompréhension et intolérance entre chrétiens
et musulmans. Ce n’est donc pas en tant que démarche individuelle, mais
dans la mesure où Joseph Fadelle semble vouloir déduire des lois
universelles d’un vécu personnel que nous abordons la critique de cet
ouvrage, comme il l’affirme sans ambages dans un entretien : « L’islam comme religion ou comme idée est la plus mauvaise chose que l’humanité ait pu produire » [2] tout en appelant à sa « destruction » [3].
Présentation de l’auteur et résumé de l’ouvrage
Mohammad al-Sayyid al-Moussaoui, devenu Joseph Fadelle après sa
conversion, est né en 1964 dans une famille chiite irakienne renommée et
influente. A la suite d’une rencontre avec un chrétien, Massoud, avec
qui il partage sa chambre lors de son service militaire, il décide de se
convertir au christianisme. Le prix à payer se présente au
premier abord comme le récit d’un parcours personnel, où son auteur
expose les raisons l’ayant conduit à se convertir au christianisme : une
rencontre avec un chrétien, suivie d’un rêve, d’une relecture
« critique » du Coran, puis de la découverte des Évangiles… Il va alors
devoir affronter sa famille qui fait tout pour s’opposer à son choix :
intimidations psychologiques et physiques puis la prison, des menaces de
mort, conjointes à la grande réticence de l’Église d’Irak d’accueillir
un nouveau converti. Il finira par fuir son pays pour aller en Jordanie
accompagné de sa femme, elle aussi convertie, et de leurs deux enfants,
avant de rejoindre la France où il réside depuis 2001.
Critique de l’ouvrage
Dès le début de l’ouvrage, qui s’ouvre sur une scène-choc et
énigmatique, on ne peut que constater la présence d’une certaine mise en
scène teintée de sensationnalisme digne d’un scénario hollywoodien :
nous sommes dans le désert jordanien, un homme est face aux siens qui
lui disent : « - Ta maladie, c’est le Christ, et il n’y a pas de
remède. Tu ne pourras jamais en guérir… Mon oncle Karim sort un revolver
et le tend vers ma poitrine. Je retiens mon souffle. Derrière lui,
quatre de mes frères me défient du regard. Nous sommes seuls dans cette
vallée désertique. » (p. 7) [4]
Dès ces premières lignes, nous trouvons exposées toutes les grandes
thématiques qui seront distillées tout au long de l’ouvrage :
intolérance absolue, violence, inhumanité. Loin de se confiner à ne
décrire qu’une famille et un événement biographique particulier, ces
réalités vont être identifiées à l’islam même et à ses adeptes. Ainsi,
la volonté à peine voilée d’enfermer l’ensemble d’une religion dans de
telles catégories fait de ce livre non pas une incitation à la
compréhension mutuelle et à la tolérance, mais un écrit contribuant au
contraire à dresser de nouvelles barrières, si besoin en était,
nourrissant cette fois-ci en Occident ces mêmes sentiments
d’intolérance, de violence et de haine que son auteur prétend dénoncer.
Le recours à des idées fausses et biaisées pour étayer un parcours personnel
Comme nous l’avons évoqué, la conversion de Joseph Fadelle se
déroule à la suite d’une rencontre avec un chrétien avec qui il partagea
sa chambre durant son service militaire. En filigrane d’une démarche
personnelle que nous ne cherchons encore une fois aucunement à juger,
nous découvrons tout au long de l’ouvrage de nombreuses incohérences et
mêmes idées fausses sur l’islam, notamment concernant la question de la
relation avec l’autre. A titre d’exemple, lorsqu’il comprend avec qui il
va partager sa chambre, M. Fadelle évoque qu’il est pris d’un sentiment
d’horreur soi-disant né de ce que sa religion lui aurait inculqué : « -
Tu crois que moi, un Moussaoui, je vais dormir avec un chrétien ? La
frayeur m’envahit et m’ôte toute raison. Chez moi, les chrétiens sont
considérés comme des parias impurs, des moins que rien avec qui il faut
éviter à tout prix de se mélanger. » (pp. 13-14). Après avoir passé quelques jours auprès de lui, il écrit : « Je
suis même surpris de ne pas être incommodé par l’odeur car dans ma
famille, c’est une chose acquise : un chrétien se reconnaît à ce qu’il
sent mauvais. » (pp. 15-16). Cette position est de nouveau
clairement exprimée dans l’un de ses entretiens où il affirme plus
clairement que le Coran même (et non pas seulement des traditions
familiales) est la source d’un tel comportement : « Avant de
rencontrer le Christ, je voyais les chrétiens à travers le Coran, je les
considérais comme on me demandait de les considérer. C’est-à-dire comme
des impurs qu’il faut combattre et tuer. » [5]
L’idée que l’islam enjoindrait à ses adeptes de ne pas se mélanger
avec les chrétiens, qu’ils seraient impurs, sentiraient mauvais ou, pire
encore, qu’il faudrait les tuer, est absolument fausse et éminemment
dangereuse. Concernant tout d’abord la supposée « impureté »,
l’écrasante majorité des autorités musulmanes actuelles rejette une
telle position. En outre, le Coran souligne expressément que les
musulmans peuvent consommer la nourriture des « Gens du livre »
(c’est-à-dire notamment des juifs et des chrétiens) : « Vous est permise la nourriture des gens du Livre, et votre propre nourriture leur est permise. » (5:5). Comment donc serait-il permis de consommer la nourriture préparée et donc touchée par une personne en soi impure ? [6]
En outre, si les chrétiens sont des « parias impurs », comment
expliquer le désir de M. Fadelle de le convertir, et donc de le compter
parmi les siens (pp. 16-17) ? Une conversion ferait-elle miraculeusement
disparaître la supposée « mauvaise odeur » qu’il évoque ?!
Entre ces deux attitudes extrêmes – c’est-à-dire rejet absolu de
l’autre ou volonté de le rendre identique à soi-même en lui niant le
droit à toute altérité -, l’islam invite au contraire à cohabiter avec
les « Gens du livre » dont font partie les chrétiens, et souligne que
les croyants vertueux parmi eux seront sauvés : « Ceux qui ont cru,
ceux qui se sont judaïsés, les Sabéens, et les Chrétiens, ceux parmi eux
qui croient en Dieu, au Jour dernier et qui accomplissent les bonnes
œuvres, pas de crainte sur eux, et ils ne seront point affligés » (5:69). [7] Le Coran pose également les bases d’un respect mutuel invitant à une coexistence [8] : « Que l’animosité pour un peuple ne vous incite pas à être injustes. Pratiquez l’équité : cela est plus proche de la piété » (5:8) ; « Quiconque
tuerait une personne non coupable d’un meurtre ou d’une corruption sur
la terre, c’est comme s’il avait tué tous les hommes. » (5:32). Le
Coran reconnaît aussi la valeur de la diversité des communautés
religieuses, diversité voulue par Dieu afin qu’elles puissent rivaliser
en charité et en bonnes actions : « Si Dieu avait voulu, certes Il
aurait fait de vous tous une seule communauté. Mais Il veut vous
éprouver en ce qu’Il vous donne. Concurrencez donc dans les bonnes
œuvres. C’est vers Dieu qu’est votre retour à tous ; alors Il vous
informera de ce en quoi vous divergiez. » (5:48). Au lieu de souligner les traits d’union et ce qui rassemble, l’auteur du Prix à payer semble vouloir attiser les antagonismes et rendre tout dialogue impossible.
En outre, lorsque Joseph Fadelle raconte la naissance de son
intérêt pour le christianisme, il évoque qu’un jour où son compagnon de
chambre chrétien s’était absenté, il découvrit un petit livre intitulé Les miracles de Jésus sur son étagère : « Sur
la couverture, on y voit la photo d’un homme souriant, entouré d’un
halo lumineux. Je ne connais pas ce Jésus, mais enhardi par les sirènes
d’une bonne lecture distrayante, j’emporte l’ouvrage sur ma couche et
entame la première page, oubliant au passage toutes mes préventions à
l’égard de ce que Massoud représente. Jamais, dans mes précédents
livres, je n’ai entendu parler de miracles, et encore moins d’un dénommé
Jésus. Même dans le Coran et dans la vie de Mahomet, je ne me souviens
d’aucune allusion à ce genre de manifestations. » (p. 22).
Pourtant, M. Fadelle évoque quelques pages plus haut qu’il « lit le Coran tous les jours »
(p. 19) – or, le Coran évoque en des termes très clairs de nombreux
miracles, dont ceux de Moïse (notamment la transformation de son bâton
en serpent, l’ouverture de la mer Rouge…), mais aussi divers miracles de
Jésus lui-même : « Et quand Dieu dira : « Jésus, fils de Marie,
rappelle-toi Mon bienfait sur toi et sur ta mère quand Je te fortifiais
du Saint-Esprit. Au berceau tu parlais aux gens, tout comme en ton âge
mûr. Je t’enseignais le Livre, la Sagesse, la Thora et l’évangile. Tu
fabriquais de l’argile comme une forme d’oiseau par Ma permission ;
puis tu soufflais dedans. Alors par Ma permission, elle devenait oiseau.
Et tu guérissais par Ma permission, l’aveugle-né et le lépreux. Et par
Ma permission, tu faisais revivre les morts. » (5:110). Point
besoin d’être un grand commentateur pour comprendre le sens de ce
verset. Comment Joseph Fadelle peut-il donc affirmer n’avoir jamais
entendu parler de miracles « dans le Coran« , alors que nous y trouvons des dizaines d’exemples de ce genre de manifestations ? [9]
La soi-disant incompatibilité entre islam et réflexion personnelle
Autre idée fausse véhiculée par Joseph Fadelle dans son ouvrage,
l’idée que l’islam prohiberait toute réflexion et recherche dans le
domaine de la religion : « Les imams m’ont toujours enseigné que
c’est la lecture du Coran de bout en bout qui sera récompensée au jour
du jugement, beaucoup plus que la compréhension du texte. Ainsi, le
déchiffrage d’une seule lettre permet d’avancer dans la piété, de gagner
dix indulgences, même si on ne saisit pas le sens du mot entier (sic). » (p. 24). Lorsqu’il décide de relire le Coran, il écrit : « J’aurais dû me méfier, et écouter la recommandation, tirée d’un verset du Coran, de ne pas approfondir ce qui peut perturber la foi. » (p. 27). Il attribue donc cette idée directement à un « verset du Coran » qu’il s’abstient cependant de citer.
Au contraire, l’une des caractéristiques du Coran est justement son
invitation continuelle à la réflexion et à la compréhension : « [Voici] un Livre béni que Nous avons fait descendre vers toi, afin qu’ils méditent sur ses versets et que les doués d’intelligence réfléchissent ! » (38:29) ; « Très certainement Nous avons exposé [tout ceci] dans ce Coran afin que [les gens] réfléchissent. » (17:41) ; « En effet, Nous avons rendu le Coran facile pour la méditation. Y a-t-il quelqu’un pour réfléchir ? » (54:17), etc.
Une simple étude de l’histoire de l’islam permet également de se
rendre compte de la masse de commentaires écrits à propos du Coran et
des différents aspects de la religion en vue d’en comprendre les
différentes significations, et ce tant dans les milieux chiites que
sunnites. L’immense littérature d’ouvrages religieux et de commentaires
ne s’est pas tarie et continue de constituer le sujet de nombreux écrits
jusqu’à aujourd’hui. La source principale de dissension en islam n’a
donc pas été le caractère licite de la réflexion à propos de la religion
ou du Coran, acceptée par tous sauf à de rares moments de l’histoire,
mais bien la façon et la méthode utilisée pour commenter le Coran ou
plus généralement pour mener une vraie réflexion religieuse. [10]
Conversion, conversions
Chaque changement de conviction peut être le fruit de divers
facteurs : intellectuels, sentimentaux, psychologiques, historiques…
Ainsi, changer de religion peut être le résultat de recherches
intellectuelles approfondies mais aussi d’un rêve, d’une rencontre, d’un
mariage, etc. Certains facteurs sociaux ou psychologiques peuvent
également favoriser ce genre de décision comme par exemple la volonté de
fuir sa famille, sa culture, une envie de changement… Sans porter un
quelconque jugement de valeur, il apparaît nécessaire ici de mettre en
relief certains faits clairement exposés par Joseph Fadelle
l’auteur lui-même afin de mieux comprendre sa démarche. Ainsi, avant
même sa conversion, nous sentons chez l’auteur du Prix à payer un
certain rejet de sa famille et de ses coutumes, qui se manifeste dès
les premières pages du livre à travers l’emploi de mots très durs
concernant certains membres de sa famille. Le ton est donné dès le
premier chapitre, où M. Fadelle explique qu’il vient d’une grande
famille musulmane chiite, soulignant que dès son plus jeune âge, il a
été destiné à prendre la suite de son père et que cela lui pèse : « Mais
cette ascendance aristocratique a très tôt pesé sur mes épaules, dès
lors que mon père m’a désigné pour lui succéder lorsqu’il serait trop
vieux pour gouverner le clan [...] Je n’ai donc pas le souvenir d’avoir
eu une enfance heureuse, insouciante, avec des jeux, des rires, des
bêtises… Pour moi, ce fut plutôt le devoir, très vite la compagnie des
adultes dans la grande salle de réunion à côté de la maison, et donc une
certaine forme d’ennui. »(p. 18). Il y décrit un père au caractère
dominateur non exempt d’une certaine duplicité (p. 18), des frères
jaloux (p. 19), une mère violente et autoritaire (p. 20) et des sœurs
réduites à l’état de bonnes qui n’ont même pas le droit de partager la
tablée de leurs frères (p. 19).
Il semble souffrir de la tension entre des apparences à préserver
et une pratique religieuse qu’il décrit dès le départ comme étant
exempte de sens profond pour lui et sa famille : « Chez les Moussavi,
on se doit de donner l’image d’une famille pieuse même si, en fait, on
pratique la religion d’une manière assez formelle. Je lis certes le
Coran tous les jours dans ma chambre, mais pour moi il s’agit surtout de
« jouer à la prière » (sic), de faire semblant. Ma prière n’exige pas
une réelle adhésion du cœur, même une compréhension profonde du texte« (p. 19). [11] Après sa conversion, il qualifie de même « la » (et non plus « sa ») prière musulmane à un acte purement formel : « Au lieu de préceptes et d’obligations formelles,
comme celle de la prière cinq fois pas jour, les mots du Notre Père de
l’Evangile résonnent dans ma tête et mon cœur comme un baume apaisant. » (p. 36).
Lorsque l’on parle de conversion, il faut ici établir une
distinction entre le fait d’être né dans une communauté religieuse sans
pour autant connaître vraiment les principes de sa religion ni y adhérer
en toute conscience puis en choisir une autre à la suite d’un rêve par
exemple, et le fait de se convertir sur la base d’une réflexion
personnelle et d’une connaissance approfondie de la religion que l’on
quitte et de celle que l’on embrasse. C’est seulement dans ce dernier
cas que le mot « conversion » prend tout son sens. On peut donc ici
douter de la justesse de l’emploi de ce terme au sujet de Joseph Fadelle
qui semble, par ses propres aveux, ignorer ou plutôt découvrir pour la
première fois la religion dans laquelle il a été élevé pour tout réduire
à des « formalités ». La suite de l’ouvrage ne fait que confirmer une
telle hypothèse, notamment le récit de sa « relecture » du Coran.
- « Ceux qui ont cru, ceux qui se sont judaïsés, les sabéens, et les chrétiens, ceux parmi eux qui croient en Dieu, au Jour dernier et qui accomplissent les bonnes œuvres, pas de crainte sur eux, et ils ne seront point affligés » (5:69).
Pris de doute au sujet de sa foi et sur le conseil de Massoud, M. Fadelle décide de relire le Coran : « Ce
faisant, je me retrouve aussi pour la première fois de ma vie seul,
face à moi-même, sans échappatoire ni distraction, obligé de me
confronter en vérité à ce qui constitue une grande part de mon
identité : l’islam. Et c’est là que les ennuis ont commencé. » (p. 27). Pourtant, quelques pages plus haut, M. Fadelle affirmait : « Je lis certes le Coran tous les jours dans ma chambre »
(p. 19). M. Fadelle continue de décrire son étonnement sur un livre
qu’il a selon lui lu tous les jours, mais qu’il semble cependant
découvrir : « Les premières lignes d’Al-Fâtiha, qui constitue le
prologue du Coran, ne me posent pas de difficulté particulière. C’est la
prière [12] la plus connue, celle que récitent chaque jour des milliers de musulmans. Mais dès que j’aborde la deuxième sourate, dite de la Vache, ou Al-Baqara,
les choses se compliquent. Je bute sur quasiment tous les versets,
plein de perplexité, et ma lecture en est rendue extrêmement difficile
et lente. Ainsi je ne comprends pas pourquoi verset après verset, Allah
s’abaisse à définir les règles de la répudiation, les délais, autant de
détails très procéduriers et, à mon sens, sans aucune réelle valeur
religieuse. » (pp. 27-28).
Nous pouvons ici constater deux points : tout d’abord, une vision
réductrice du Coran, qui est loin de se limiter à la définition de
règles religieuses. Ensuite, le jugement de M. Fadelle apparaît hâtif et
péremptoire : comment une seule lecture peut-elle permettre de déclarer
dénuées de valeur religieuse certaines règles qui ont constitué l’objet
de profonds débats théologiques durant des siècles ? De manière
générale, comment prétendre à la compréhension d’un livre sacré, quel
qu’il soit, en une seule lecture ?
En outre, il est surprenant que M. Fadelle ne retienne de cette
sourate que les règles du divorce qui n’apparaissent qu’à la moitié de
la sourate, après plus de 200 versets ! Ainsi, si nous lisons la sourate
« La vache », nous trouvons d’abord une description très claire des
pieux et des incroyants (versets 2-21) puis un verset indiquant que tout
ce qui a été créé par Dieu l’a été pour l’homme « C’est Lui qui vous
a fait la terre pour lit, et le ciel pour toit ; qui précipite la pluie
du ciel et par elle fait surgir toutes sortes de fruits pour vous
nourrir » (verset 22) dont se fait l’écho ce verset « C’est Lui qui a créé pour vous tout ce qui est sur la terre »
(verset 29). Le début de cette sourate contient aussi l’annonce de la
résurrection (verset 28), le récit de la création d’Adam comme
« lieu-tenant de Dieu sur terre » (versets 30-35), celui du péché d’Adam
et son pardon par Dieu (verset 37), la descente d’Adam et Eve sur terre
et l’envoi par Dieu de « guides » (prophètes) permettant à l’homme
d’être sauvé (versets 38-39), l’injonction à la prière et à l’aumône
(verset 46), le récit de la délivrance du peuple d’Israël des mains de
Pharaon (versets 47-61)… Tout cela exprimé dans une langue très claire.
Si une personne ne comprend pas de tels versets, comment pourrait-elle
donc comprendre la Genèse et les récits bibliques ?! Les versets
suivants évoquent Salomon, Abraham, les relations entre juifs, chrétiens
et musulmans, le sens profond de la création… Nous n’arrivons à la
description de « règles » qu’à la moitié de la sourate, et la question
du divorce qu’au verset 228 ! Nous ne pouvons donc que constater de la
part de l’auteur une volonté de ne mettre en relief que certaines
choses, et encore de manière biaisée, pour en passer d’autres totalement
sous silence.
M. Fadelle évoque ensuite la question du statut de la femme en islam, point qui lui pose problème : « Autre point conflictuel pour moi, je ne saisis pas l’insistance du Coran à définir la supériorité et le pouvoir
des hommes sur les femmes, considérées la plupart du temps comme des
inférieures, possédant la moitié du cerveau d’un homme, et parfois
impures, quand elles ont leurs règles. » (p. 28). Le type
d’expression utilisée, c’est-à-dire ici, « la moitié d’un cerveau »,
confirme la tendance de l’auteur à utiliser un procédé de simplification
tournant à la caricature comme base de son argumentaire contre l’islam.
On pourrait aussi objecter à l’auteur que le christianisme même est
exposé à sa critique. Dans la Première Epître de Paul aux Corinthiens,
nous pouvons lire : « Je veux cependant que vous sachiez que Christ est le chef de tout homme, que l’homme est le chef de
la femme […] Toute femme, au contraire, qui prie ou qui prophétise, la
tête non voilée, déshonore son chef : c’est comme si elle était rasée.
[…]L’homme ne doit pas se couvrir la tête, puisqu’il est l’image et la
gloire de Dieu, tandis que la femme est la gloire de l’homme. En effet,
l’homme n’a pas été tiré de la femme, mais la femme a été tirée de
l’homme ; et l’homme n’a pas été créé à cause de la femme, mais la femme
a été créée à cause de l’homme. C’est pourquoi la femme, à cause des
anges, doit avoir sur la tête une marque de l’autorité dont elle dépend » (11:3-10) ou encore dans l’Epître de Paul aux Ephésiens : « Car le mari est le chef de la femme, comme Christ est le chef de l’Eglise » (5:23), ou la Première Epître de Paul à Timothée : « Que
la femme écoute l’instruction en silence, avec une entière soumission.
Je ne permets pas à la femme d’enseigner, ni de prendre autorité sur
l’homme ; mais elle doit demeurer dans le silence. Car Adam a été formé
le premier, Eve ensuite ; et ce n’est pas Adam qui a été séduit, c’est
la femme qui, séduite, s’est rendue coupable de transgression. Elle sera
néanmoins sauvée en devenant mère, si elle persévère avec modestie dans
la foi, dans la charité, et dans la sainteté » (2:11-15). Il n’est
pas ici question d’établir la moindre comparaison entre islam et
christianisme ni de nous lancer dans de l’exégèse comparée, mais
simplement de souligner les incohérences, les raccourcis et le regard
mutilé que porte l’auteur tant sur l’islam que sur le christianisme, en
n’y puisant que ce qui lui permet d’agrémenter au mieux son réquisitoire
sur l’islam.
Joseph Fadelle évoque en ces termes la suite de sa critique du statut de la femme en islam : « Je me rends compte que j’ai vécu pendant toutes ces années au milieu d’une ségrégation, en l’acceptant très bien d’ailleurs. Mais je n’avais pas pris conscience que cela venait tout droit du Coran et de ses prescriptions. » Il cite ensuite plusieurs versets, dont « Vos femmes sont comme un champ de labour pour vous, allez-y comme vous l’entendez » (2:223), et s’improvise soudain en commentateur en disant : « Ce qui signifie que les hommes peuvent faire d’elles ce qu’ils veulent, y compris sexuellement »
(p. 28). Une telle interprétation est fausse et abusive. Si l’on s’en
réfère aux grands commentateurs du Coran, notamment Allâmeh Tabâtabâ’i [13],
ce verset doit être compris dans le cadre des versets évoquant les
principes généraux fondant les rapports entre les hommes et les femmes
sur l’affection, le respect mutuel et la miséricorde, que s’abstient de
citer M. Fadelle : « Et parmi Ses signes Il a créé de vous, pour vous, des épouses pour que vous viviez en tranquillité avec elles et Il a mis entre vous de l’affection et de la bonté. » (30:21). Dans ce sens, les versets décrivant les règles régissant les rapports entre les époux, l’expression « bima’rûf »
pouvant être traduite par « de façon convenable » est constamment
répétée : même en cas de divorce, le respect et la considération
mutuelle ne doivent jamais être érodés. [14] D’autres versets, tels que « Elles [les femmes] sont un vêtement pour vous et vous un vêtement pour elles » (2:187) évoquent l’idée de réciprocité et de complémentarité entre l’homme et la femme. [15]
Autre idée fausse : celle que les femmes musulmanes seraient très attachées à leurs bijoux, étant donné que « c’est le seul bien qu’elles sont autorisées à posséder »
(p. 130). Bien au contraire, le droit de propriété de la femme est un
droit absolu en islam reconnu par toutes les écoles, et aucun homme n’a
le droit de lui extorquer ses biens ni même son propre salaire si elle
travaille. Le régime matrimonial de l’islam est basé sur le don d’une
dot (mahr) qui est la propriété absolue de la femme (« Et
donnez aux épouses leur dot, de bonne grâce. Si de bon gré elles vous en
abandonnent quelque chose, disposez-en alors à votre aise et de bon
cœur. » (4:4)) et sur le régime de la séparation des biens qui
garantit à la femme la préservation de la propriété de ses biens et de
tout ce que lui a donné son mari même en cas de divorce : « Et il ne vous est pas permis de reprendre quoi que ce soit de ce que vous leur aviez donné. » (2:229) ». La femme peut également être propriétaire de n’importe quel bien, et en disposer librement.
Nous observons le même recours à des idées fausses et des
réductions abusives constituant parfois même une insulte aux fidèles de
toute une communauté religieuse, notamment lorsque Joseph Fadelle évoque
qu’il relit la biographie de Mohammad et en conclut qu’elle n’est qu’
« une accumulation d’adultères, de vols » (p. 30).
Un Dieu dénué d’amour ?
Dans la suite de l’explication de son passage progressif du christianisme à l’islam, Joseph Fadelle nous explique qu’il a « en tête tous les noms d’Allah donnés par le Coran. [16] Il
y en a quatre-vingt-dix-neuf connus : Eternel, Inengendré, Unique,
Inaccessible, Ferme, Invincible, Glorieux, Sage, Bienveillant,
Miséricordieux mais aussi Vengeur… En revanche, il en existe un autre, le centième nom, que personne ne connaît. Ce nom d’Allah mystérieux et inconnu, j’ai l’impression de le découvrir aujourd’hui, c’est l’Amour. »
(pp. 36-37). Nous avons ici une confirmation claire que Joseph Fadelle
présente des idées totalement fausses à propos du Coran et de son
contenu, qui regorge de versets évoquant Dieu comme amour ainsi que
l’amour étant comme le fondement de Sa relation avec l’homme : « Mon Seigneur est vraiment Miséricordieux et plein d’amour » (11:90) ; « A ceux qui croient et font de bonnes œuvres, le Tout Miséricordieux accordera son amour. » (19:96) ; ou encore « Dis : “Si vous aimez vraiment Dieu, suivez-moi, Dieu vous aimera alors et vous pardonnera vos péchés » (3:31) qui exprime l’idée d’une relation d’amour réciproque ; « Dieu aime, en vérité, ceux qui Lui font confiance. » (3 :159) ; « Dieu aime, certes, les bienfaisants. » (5:13) ; « Dieu aime les pieux. » (9:4). Selon un hadith qodsî [17] bien connu en islam, la base de la création fut l’amour de Dieu : « J’étais un trésor inconnu, J’aimai (ahbabtu) à être connu ; J’ai donc créé les créatures, Je Me suis fait connaître d’elles et par Moi elles Me connurent » [18]. Outre le mot « amour », le Coran fait constamment référence à la miséricorde (rahma) de Dieu, inséparable de Son amour, de Son pardon, de Son affection… : « et Ma miséricorde embrasse toute chose. » (7:156) ; « C’est Lui le Pardonneur, le Tout Affectueux » (85:14).
Un concentré de l’ensemble des clichés sur l’islam
De façon générale, l’ouvrage semble avoir intentionnellement
concentré, au travers de la description d’une famille, toutes les images
négatives possibles et imaginables que l’Occident peut avoir sur
l’islam : domination masculine absolue (pp. 18-20) [19],
concupiscence effrénée à travers l’exemple du grand-père demandant à
prendre une quatrième femme à 109 ans alors qu’il est mourant (p. 19) [20],
duplicité dans la pratique religieuse (pp. 18-19), père qui répudie ses
trois femmes ne pouvant lui donner d’enfant (p. 19), importance du clan
(p. 20), relégation absolue de la femme aux tâches ménagères et son
absence de la société (p. 20), violence omniprésente, même chez les
femmes (p. 20) [21],
mensonge et corruption à travers l’exemple de « l’achat » indirect des
bulletins de note (p. 20) et, de manière générale, absence totale
d’amour dans des relations familiales basées sur la domination et la
violence. Nous trouvons donc résumées en trois pages l’ensemble des
supposées « tares » assimilées à l’islam. Car c’est bien d’une critique
de l’islam dans son ensemble qu’il s’agit, et non seulement d’une
famille : « Elle [la mère de Joseph Fadelle] a su asseoir à l’intérieur le pouvoir qu’elle ne possède pas à l’extérieur, dans la société musulmane. »
(p. 20). La relégation de la mère de Joseph Fadelle à la sphère privée
n’est pas liée à son père ou à des coutumes particulières, mais bien à
« la société musulmane » dans son ensemble.
Tout au long de l’ouvrage, nous constatons donc un glissement
permanent du particulier (certaines croyances et pratiques de la famille
de Joseph Fadelle) à l’universel (l’islam comme religion), et à une
identification des deux domaines. Transposée à un autre contexte, une
telle logique reviendrait à identifier l’Inquisition ou les tortures
pratiquées au Moyen Age contre certains penseurs par l’Église au
christianisme même ! M. Fadelle identifie des pratiques particulières à
une religion dans son ensemble, ce qui est évidemment biaisé. Son livre
ne contient aucune analyse, aucune référence hormis quelques versets sur
la femme. Loin d’inciter à la réflexion et au discernement, il ne fait
qu’entraîner son lecteur dans un manichéisme abusif.
Nous retrouvons le même ton à la fin de l’ouvrage : « Je pense chaque jour à lui [l’un de ses frères devenu athée], ainsi qu’à tous les miens qui continuent de vivre dans l’obscurité de l’islam » (p. 219), et exprime ses désirs en ces termes : « Je
rêve qu’un jour le clan Moussaoui tout entier puisse se convertir… Pour
cela il faudrait que la société elle-même change, avec ses lois, mais
hélas, le verrou de l’islam l’en empêche » (p. 219). Il n’est
pas ici question de traditions particulières, mais bien d’une religion
dans son ensemble qui se voit ici réduite à un simple « verrou »
empêchant le changement de la société et qu’il suffirait de faire
« sauter » pour que tout le monde puisse se convertir au christianisme !
Tout se passe comme si les gens n’étaient musulmans que par défaut,
victimes d’une « obscurité » ou pour sauver les apparences, tandis qu’un
simple changement des codes sociaux suffirait à tout remettre en
cause : singulière conception de la religion… Cette idée est également
sous-entendue dans ce passage : « Ce n’est pas à cause du Christ que
j’ai souffert, mais du fait de l’absence de liberté qu’impose la société
musulmane, dont ma famille n’a pas osé se défaire, par orgueil et par
souci de respectabilité. » (p. 219). Cette conception se trouve
confirmée par les propos tenus par M. Fadelle dans un entretien
présentant les musulmans en des sortes de « victimes » de l’islam. [22]
Loin d’être le simple récit d’une conversion, cet ouvrage est avant
tout un réquisitoire, une longue et sombre critique d’une famille et, à
travers elle, de l’ensemble d’une religion.
Enfin, dans plusieurs passages de son ouvrage et dans les
entretiens qu’il a pu donner ces derniers mois, Joseph Fadelle affirme
que selon le Coran, toute personne ayant quitté l’islam doit être tuée :
« Tout musulman qui suit la règle coranique a le devoir de me tuer
puisque j’ai quitté l’islam pour embrasser la religion chrétienne. » [23]
Il faut encore et toujours souligner avec insistance que l’islam
reconnaît la liberté de conscience comme un principe absolu, comme
l’exprime ce verset : « Nulle contrainte en religion » (2:256).
C’est sur cette base que des communautés chrétiennes ou juives existent
et cohabitent depuis des siècles dans différents pays musulmans. Si des
affrontements ont parfois lieu, ils sont le fait de personnes, et non de
l’islam en lui-même qui promeut une coexistence pacifique avec les
« Gens du livre », et non une conversion forcée qui n’a aucun sens ni
valeur. En outre, un musulman qui se convertit au christianisme et
pratique chez lui n’est en aucun cas menacé de mort par l’islam tant
qu’il limite sa décision à une sphère individuelle au sein de laquelle
la liberté de conscience est absolue ; le problème se pose lorsqu’il
donne une dimension sociale à sa décision et décide de faire du
prosélytisme ou de s’employer à détruire son ancienne religion dans la société
– principe qui n’est d’ailleurs pas étranger dans un sens à la logique
laïque ! Comme le soulignent Michel Cuypers et Geneviève Gobillot, « la
croyance religieuse seule ne fait de personne la cible potentielle
d’une attaque […] Le simple fait qu’une personne ne soit pas musulmane
n’a jamais été un légitime casus belli dans la loi ou la foi islamique conformément au Coran : « Nulle contrainte en religion »
(2:256). Les musulmans peuvent et doivent vivre paisiblement avec leurs
voisins, sans que cela exclue l’autodéfense légitime et le maintien de
la souveraineté : « Et s’ils inclinent à la paix, incline vers celle-ci (toi aussi) et place ta confiance en Dieu. » (8:61) ». [24]
Conclusion
Pour conclure, nous souhaitions de nouveau insister sur ce point
essentiel : ceux qui prétendent dénoncer l’intolérance et la violence ne
font souvent que l’alimenter et la renforcer. Qu’apporte un tel ouvrage
à part un renforcement de l’incompréhension et des pires préjugés
pouvant exister sur une religion ? L’acharnement dont Joseph Fadelle
fait preuve contre l’islam n’est-il pas à comparer avec ce qu’il prétend
dénoncer ? Prouve-t-on le bien-fondé de sa religion en détruisant celle
de l’autre ? Car c’est bien à cela qu’aspire l’auteur du Prix à payer : « Je
veux détruire l’islam, d’abord pour sauver les musulmans. La
distinction entre les deux est encore une fois primordiale. C’est le
salut des musulmans qui m’importe. » [25]
Plus insidieux, Joseph Fadelle identifie totalement islam et
islamisme ; la source de toute violence se trouvant selon lui dans le
Coran même, venant corrompre l’humanité des musulmans : « Certains
musulmans ignorent ce que dit l’islam (sic) et sont bons car leur
humanité leur dicte de faire des choses bonnes […] Les musulmans
« mauvais » ou extrémistes sont justement ceux qui lisent et appliquent
le Coran« . [26]
Outre ces propos d’une incohérence patente, que signifie « musulman qui
ignore l’islam » ? Ou encore le fait de qualifier de « mauvais
musulman » celui qui lit son livre sacré ? Aurait-on l’idée de qualifier
de « mauvais chrétien » celui qui lit la Bible ?
De par son ouvrage ainsi que ses multiples interventions dans les
médias et institutions diverses, Joseph Fadelle contribue également à
cristalliser la méfiance et la haine contre les musulmans non plus
seulement d’Irak, mais de France, en présentant chaque croyant comme un individu potentiellement criminel : « En
France, les autres sont des musulmans qui connaissent le Coran. Ils
semblent modérés parce qu’ils sont pour l’instant en minorité et ne
peuvent donc pas appliquer le Coran. Mais ceux que l’on appelle « bons
musulmans » seront poussés à tuer comme les autres lorsqu’ils liront le Coran, ou ils quitteront l’islam comme je l’ai fait. » [27] Il pousse également la psychose jusqu’à entrevoir la création d’un gouvernement islamique en France : « Il
y a en plus le danger de la démocratie en France. Les musulmans
cherchent une identité qui ne soit pas la France et se réfugient donc
dans l’islam. Le jour où ils seront majoritaires au Parlement, ils
voteront la charia ! » [28]
La personnalité et l’histoire de Joseph Fadelle, qui, rappelons-le,
s’est converti en 1987, soit il y a plus de 20 ans, semble venir à
point nommé pour renforcer certains préjugés et servir un processus de
deshumanisation de l’autre parfaitement en accord avec les intérêts
d’une certaine classe politique, comme ce fut le cas un temps du Jamais sans ma fille
de Betty Mahmoody. Les procédés sont les mêmes : choix du genre
romanesque permettant de rendre une histoire attractive au plus grand
nombre en ayant recours à des procédés de dramatisation et d’exagération
en s’aidant bien souvent d’idées ostensiblement fausses permettant de
réduire une réalité complexe aux notions de « bien » et de « mal ».
Ce manichéisme à outrance a même entraîné certaines réactions au
sein même de la communauté chrétienne, notamment de la part du père
Christophe Roucou, responsable du Secrétariat pour les Relations avec
l’Islam (SRI) à la Conférence des évêques de France, qui a évoqué le
risque que fait peser un tel ouvrage sur le dialogue islamo-chrétien :
« Les prêtres conseillent ce livre à leurs paroissiens. Fadelle lui-même est invité à donner des conférences partout. Et pas simplement pour parler de son itinéraire qui est tout à fait respectable, mais pour dire que l’islam est l’œuvre du diable. On
sent se renforcer chez les catholiques – comme chez l’ensemble des
Français – un courant d’hostilité à l’islam. Nous sommes attaqués comme
naïfs vis-à-vis des musulmans parce que nous discutons avec eux, alors
que c’est notre mission. Ma position, en tant que SRI, c’est de dire que
je n’ai pas à choisir entre ma solidarité avec les chrétiens du
Proche-Orient et l’amitié avec les musulmans d’ici. » [29]
Dans un contexte où la préservation de ce dialogue, de cette amitié ou
du moins de ce respect mutuel entre chrétiens et musulmans est une
nécessité vitale, ce genre d’ouvrage ne fait que renforcer les pires
clichés sur l’islam et contribue dangereusement à la diabolisation de
l’autre, prélude à toutes sortes de haines et dérives dont nous ne
pouvons malheureusement que constater l’augmentation. Est-ce ainsi que
l’amour et la tolérance envers le prochain peuvent triompher ?
*Le prix à payer, L’œuvre éditions, 2010, 224 p.
Notes
[2] Entretien avec Joseph Fadelle réalisé par Faustine des Lys, http://www.citeetculture.com/article-interview-de-joseph-fadelle-chretiens-francais-reveillez-vous-61708795.html
[3] Ibid.
[4] L’ensemble des citations suivies de « p. » sont issues de l’ouvrage Le Prix à Payer, sauf indication du contraire.
[5] Entretien avec Joseph Fadelle réalisé par Faustine des Lys.
[6] En
islam, certains éléments ou aliments sont considérés comme impurs,
comme l’alcool ou la viande de porc. C’est dans le sens où il ne faut
pas entrer en contact avec ces éléments, dont la consommation ne rend
cependant pas « en soi » une personne impure.
[7] Le
catholicisme a au contraire mis beaucoup de temps avant de pouvoir
envisager la question du salut des non chrétiens et des personnes non
baptisées. L’exemple extrême est sans doute celui des sanctuaires à
répit qui ont fonctionné jusqu’au début du XXe siècle en Europe et en
France. Ils étaient destinés aux enfants morts-nés et n’ayant pu être
baptisés. Selon la croyance, ils étaient donc destinés à errer dans les
limbes, une sorte d’enfer, pendant l’éternité. On disposait les enfants
dans ce sanctuaire en attendant le moindre signe d’un retour temporaire à
la vie pour pouvoir les baptiser et leur éviter une errance éternelle.
Le concept de limbes n’a été définitivement aboli que récemment par le
Vatican. On voit donc que durant de nombreux siècles, le concept de
salut allait jusqu’à exclure les nouveau-nés chrétiens ! La question du
salut des non-chrétiens a reçu une réponse plus ouverte lors du concile
Vatican II, qui envisage les autres religions comme des « semences de
l’esprit saint » qui ne font cependant que « disposer » les âmes des
non-chrétiens au salut, la voie ultime demeurant le Christ et celle de
l’Eglise catholique.
[8] D’autres
versets du Coran sont souvent cités hors de leur contexte pour dénoncer
la soi-disant « intolérance » de l’islam, notamment « Après que les
mois sacrés expirent, tuez les associateurs où que vous les trouviez.
Capturez-les, assiégez-les et guettez-les dans toute embuscade. Si
ensuite ils se repentent, accomplissent la Salat et acquittent la Zakat,
alors laissez-leur la voie libre, car Dieu est Pardonneur et
Miséricordieux. » (9:5). Ce verset a été révélé à la suite de la
conquête de La Mecque par Mohammad et les musulmans – ville dont les
habitants s’étaient jurés d’anéantir Mohammad et ses partisans jusqu’au
dernier. Nous sommes donc dans un contexte de guerre. Lorsque La Mecque
est conquise, au lieu de tuer ou d’emprisonner les vaincus qui voulaient
l’assassiner, le prophète Mohammad fait un discours devant les
habitants de la ville, ceux-là même donc qui l’avait chassé et voulaient
l’éliminer. Une partie de ce discours est évoquée par Martin Lings : « Le
Prophète leur adressa alors les mêmes paroles de pardon que celles que
Joseph avait prononcées lorsque, selon ce que rapporte le Coran, ses
frères étaient venus le trouver en Egypte : « En Vérité, Je vous dirai
ce qu’a dit mon frère Joseph : Il ne vous sera fait ce jour ni blâme ni
reproche. Dieu vous pardonne, et Il est le plus Miséricordieux des
miséricordieux » (Martin Lings (Le Prophète Muhammad, Sa vie d’après les sources les plus anciennes,
Seuil, p. 493). Mohammad invite donc au pardon ceux-là même qui
voulaient l’éliminer. C’est dans ce contexte qu’il donne ensuite quatre
mois (les mois sacrés) à ces gens-là pour se convertir ou partir : ce
qui est une tolérance énorme et rarement vue dans une guerre ! Ensuite,
ceux qui restent et demeurent malgré tout sans avoir changé leurs
desseins sont dès lors un réel danger, d’où l’injonction du verset de
les éliminer : c’est un cas de réelle légitime défense, car lorsque l’on
donne l’occasion à une personne qui veut nous tuer de partir, et si
elle reste sans avoir changé d’idée, sa présence devient un réel danger.
Il est cependant encore dit ensuite que ces mêmes personnes se
repentent, la liberté doit leur être donnée. Ce verset fait référence à
une situation historique particulière et, si l’on regarde son contexte,
ne vient pas contredire les principes universels de tolérance et de
respect mutuel tels que « Que l’animosité pour un peuple ne vous incite pas à être injustes. Pratiquez l’équité : cela est plus proche de la piété » (5:8) ; « Et s’ils inclinent à la paix, incline vers celle-ci (toi aussi) et place ta confiance en Dieu. » (8:61) » ; « Quiconque
tuerait une personne non coupable d’un meurtre ou d’une corruption sur
la terre, c’est comme s’il avait tué tous les hommes. » (5:32) ou
encore d’autres versets évoquant encore une fois que la base des
relations avec les personnes d’autres religions ou ayant des idées
différentes est la tolérance et le dialogue respectueux : « Par la sagesse et la bonne exhortation appelle (les gens) au sentier de ton Seigneur. Et discute avec eux de la meilleure façon. » (16:125).
[9] Il
évoque de nouveau ce même aspect quelques lignes plus bas, lorsqu’il
relate sa discussion avec son compagnon de chambre lorsque ce dernier
revient :
« Qui est ce Jésus dont parle ton livre ?
-C’est Issa ibn Mariam, le fils de Marie…
Réponse totalement inattendue et incompréhensible pour moi. Issa
je le connais, il figure fans le Coran, parmi d’autres prophètes venus
avant Mahomet. Mais je n’ai jamais entendu dire qu’il portait un autre nom, ni que ce Jésus/Issa avait fait des miracles aussi extraordinaires » (p. 23).
Il faut ici distinguer plusieurs aspects de la question. Joseph
Fadelle affirme : 1. Au départ, qu’il ne connaît pas ce « Jésus », ce
qui peut être concevable si l’on prend en compte le fait que Jésus est
parfois appelé différemment dans le Coran et par les chrétiens du Moyen
Orient ; 2. Qu’il n’a jamais entendu parler de miracles au sens absolu
(ce qui est impossible pour toute personne ayant tant soit peu lu le
Coran ; 3. Même après avoir compris que le Issâ du Coran est le Jésus
des chrétiens, il affirme ne jamais avoir entendu qu’il ait fait des
miracles d’une telle ampleur, alors que le Coran évoque on ne peut plus
clairement le fait que Jésus parlait alors qu’il n’était qu’un
nouveau-né, qu’il guérissait les malades, ressuscitait les morts, etc.
Nous pouvons donc ici formuler deux hypothèses : soit M. Fadelle n’a pas
lu le Coran, ce qui serait surprenant pour un musulman, soit il fait
clairement preuve de mauvaise foi.
[10] Lire notamment à ce propos Cuypers, Michel ; Gobillot, Geneviève, Le Coran, idées reçues, Le cavalier Bleu éditions, 2007, pp. 69-72.
[11] Un peu plus loin, il écrit à propos que la prière en islam : « l’essentiel de ce que j’en ai retenu était dans le respect des ablutions, très extérieures » (p. 40).
[12] Ici le langage utilisé est plus qu’approximatif : Al-Fâtiha ou « L’ouverture » est la première sourate du Coran qui est récitée pendant la prière, mais elle n’est pas une prière en soi.
[13] Si
l’on se réfère au plus grand commentateur chiite du Coran contemporain,
’Allâmeh Tabâtabâ’i, s’inspirant lui-même de nombreux commentateurs,
souligne que le champ est une image symbolisant la vie et la permanence
de l’espèce humaine, grâce auquel la graine prend vie et la vie demeure.
L’importance centrale de la femme comme « mère de l’homme » et
permettant la survie de l’espèce humaine est ici soulignée. Concernant
la seconde partie du verset, ’Allâmeh Tabâtabâ’i souligne que l’homme
peut avoir des rapports sexuels avec sa femme quand il le souhaite (sauf
exception par exemple lors du jeûne du Ramadan), cependant, ces
rapports s’inscrivent dans le cadre de l’amour, du respect mutuel et de
la miséricorde que Dieu a créée entre les époux (et non dans le sens où
l’homme pourrait disposer librement de sa femme comme il l’entendrait,
sans aucune considération à son égard). Tabâtabâ’i, Mohammad-Hossein, Al-Mizân, Vol. 2, Traduction persane, p. 319.
[14] Comme l’atteste ce verset : « Le divorce est permis pour seulement deux fois [avec la même personne]. Alors, c’est soit la reprise conformément à la bienséance, d’une belle manière ou la libération avec gentillesse. Et il ne vous est pas permis de reprendre quoi que ce soit de ce que vous leur aviez donné. » (2:229) ». L’expression bima’rouf
est également utilisée dans ce verset, qui nous apprend aussi qu’il est
interdit au mari de retenir sa femme contre son gré si elle veut
divorcer : « Et quand vous divorcez d’avec vos épouses, et que leur délai expire, alors, reprenez-les conformément à la bienséance (bima’rouf), ou libérez-les conformément à la bienséance (bima’rouf). Mais ne les retenez pas pour leur faire du tort : vous transgresseriez alors et quiconque agit ainsi se fait du tort à lui-même. Ne prenez pas en moquerie les versets de Dieu. » (2:231)
[15] Il
faut également rappeler que selon le Coran, c’est à la fois Adam et Eve
qui ont péchés, contrairement au récit de la Genèse où seule Eve est à
l’origine du péché et induit son mari en erreur : « La femme vit que l’arbre était bon à manger et agréable à la vue, et qu’il était précieux pour ouvrir l’intelligence ; elle prit de son fruit, et en mangea ; elle en donna aussi à son mari, qui était auprès d’elle,
et il en mangea. […] L’Eternel Dieu dit : Qui t’a appris que tu es nu ?
Est-ce que tu as mangé de l’arbre dont je t’avais défendu de manger ?
L’homme répondit : La femme que tu as mise auprès de moi m’a donné de l’arbre, et j’en ai mangé. »
(Genèse, 3:6-13). Les conséquences d’un tel péché sont notamment
perceptibles dans la Première Epître de Paul à Timothée (2:11-15) citée
plus haut.
Dans le Coran, il n’y a aucune différence entre l’homme et la femme
concernant le péché originel : ils en sont tous les deux également
responsables : « Puis le Diable, afin de leur rendre visible ce qui leur était caché – leurs nudités – leur
chuchota, disant : “Votre Seigneur ne vous a interdit cet arbre que
pour vous empêcher de devenir des Anges ou d’être immortels !”. Et il
leur jura : “Vraiment, je suis pour vous deux un bon conseiller”. Alors il les fit tomber par tromperie. Puis, lorsqu’ils eurent goûté de l’arbre,
leurs nudités leur devinrent visibles ; et ils commencèrent tous deux à
y attacher des feuilles du Paradis. Et leur Seigneur les appela : “Ne vous avais-Je pas interdit cet arbre ? Et ne vous avais-Je pas dit que le Diable était pour vous un ennemi déclaré ?” » (7:20-22).
[16] Ce
qui semble ici attester sa connaissance du Coran… et vient renforcer
les contradictions sur le fait qu’il ignorait la présence de versets sur
des miracles, ou encore sa relecture du Coran qui semble presque être
une découverte…
[17] Un hadith qodsi est une parole de Dieu exprimée selon les mots du prophète Mohammad.
[18] Nous reprenons ici la traduction de Christian (Yahyâ) Bonaud, Le soufisme, Maisonneuve et Larose, 2002, p. 23.
[19] Un exemple parmi d’autres : « Les
hommes, mes frères, échappent à cette autorité [de la mère] grâce à
leur sexe, qui leur donne pouvoir sur toutes les femmes, mère comprise » (p. 20). M. Fadelle ne semble cependant pas outre mesure souffrir de cette situation, mais plutôt en profiter : « Avec
elle [sa mère] je profite sans vergogne de ma situation privilégiée. Je
salive encore au souvenir des cinq délicieux pains cuits spécialement
par ma mère, à ma demande« . (p. 20).
[20] Ce passage mérite d’être cité : « Mon
grand-père paternel certes avait le même caractère dominateur, mais
c’était aussi un jouisseur, aimant mordre la vie à pleines dents. Il est
mort à 109 ans, en demandant qu’on le marie une quatrième fois, pendant
qu’on lui versait des gouttes d’eau dans la bouche et que son fils lui
faisait la lecture du Coran ! » (pp. 18-19). Se trouvent ici
associées les idées de religion, de sensualité et de domination dans un
mélange virant à l’absurde. En partant de l’opinion que cet exemple soit
vrai, il ne fait que confirmer l’existence d’une volonté de caricaturer
en permanence un milieu que Joseph Fadelle semble dès le départ
rejeter.
[21] Il écrit ainsi à propos de sa mère : « Elle
supervise la cuisine, le linge, donne ses ordres à ses sept
belles-filles et à mes sœurs non mariées, parfois même violemment,
jusqu’à les frapper. » (p. 20).
[22] « Je
veux détruire l’islam, d’abord pour sauver les musulmans. La
distinction entre les deux est encore une fois primordiale. C’est le
salut des musulmans qui m’importe. » Entretien avec Joseph Fadelle réalisé par Faustine des Lys, www.citeetculture.com/article-interview-de-joseph-fadelle-chretiens-francais-reveillez-vous-61708795.html
[23] Ibid.
[24] Cuypers, Michel ; Gobillot, Geneviève, Le Coran, idées reçues, Le cavalier Bleu éditions, 2007, p. 104.
[25] Entretien avec Joseph Fadelle réalisé par Faustine des Lys, www.citeetculture.com/article-interview-de-joseph-fadelle-chretiens-francais-reveillez-vous-61708795.html
[26] Ibid.
[27] Ibid.
[28] Ibid.
[29] Christophe Roucou, www.perepiscopus.org/islam/le-temoignage-de-joseph-fadelle-inquiete-le-sri
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