Les services de renseignement en voie de restructuration
Quel avenir pour le DRS ?
Siège du ministère de la Défense nationale.
Pour vendre l’idée, confuse, de passage vers un Etat «civil», les
partisans de Abdelaziz Bouteflika ne lésinent pas sur les moyens.
A commencer par l’organisation de fuites sur certains sites médiatiques
pour vendre l’option d’introduire, dans la future Constitution, un
article portant sur la redéfinition des missions des Services secrets.
La rumeur, qui supplante une information rarement fournie par les
autorités à cause notamment de la sensibilité du sujet, prête au
président de la République les velléités de restructurer «profondément»
les puissants services de renseignement. D’autres sources, relayées par
des médias électroniques, évoquent la «dissolution» pure et simple de la
«police politique», dont l’existence légale n’a jamais été admise bien
que décriée par l’opinion publique et la classe politique.
Depuis que le chef de l’Etat a décidé, en septembre 2013, de déposséder
le Département du renseignement et de la sécurité (DRS) de certains de
ses services, notamment ceux de la presse et de la police judiciaire, on
susurre, dans des salons feutrés de la capitale, que la prochaine
«victime» de cette réorganisation d’un corps qui suscite autant de
fantasmes que d’appréhensions est le général Mohamed Mediène, dit
Toufik, en personne. «Une option très possible», explique l’ancien
général Hocine Benhadid, contacté hier par téléphone. «Maintenant qu’il
(le général Toufik) a été passif, il peut même être mis à la retraite ou
renvoyé chez lui !», dit le retraité de l’ANP qui avait fait une
vigoureuse incursion médiatique très commentée lors de la précampagne
pour la présidentielle.
Ce dernier confirme, à demi-mot, l’existence d’une restructuration de
ce département qui relève du ministère de la Défense : «Je sais que Gaïd
Salah (chef d’état-major et vice-ministre de la Défense, ndlr)
s’apprête à envoyer beaucoup d’officiers à la retraite. Mais ce ne sera
pas facile pour lui.»
La police politique dépend de la Présidence
Selon certaines indiscrétions, le chef de l’Etat s’apprêterait donc à
introduire, dans la prochaine révision de la Constitution, un article
qui portera sur le rôle des services secrets. Il s’agirait de la
restructuration qui vise à «éloigner» de la vie politique ce service
dont la mission devrait être confinée à «protéger» le pays contre toute
agression. Pour opérer cette mue, un service serait particulièrement
visé. Il s’agirait de la Direction centrale de la sécurité intérieure
(DCSI). Ce sont les agents qui travaillent pour le compte de cette aile
qui sont envoyés dans différentes entreprises et autres institutions
pour s’acquitter de la mission de surveiller tout ce qui s’y passe.
Or, cette direction dépend, depuis 1989, de la présidence de la
République. Après les événements d’Octobre 1988, le président Chadli
Bendjedid, qui avait nommé Mohamed Betchine chef des Services secrets,
avait fait rattacher la DCSI à la Présidence. «Les prérogatives de
sécurité de l’Etat relèvent aussi des politiques et ces derniers doivent
assumer pleinement leurs responsabilités», rappelait, dans ce sens, le
général Khaled Nezzar, lors d’une récente intervention télévisée. Cela
confirme que le chef de l’Etat peut revoir la restructuration des
Services sans passer par un référendum populaire.
Evoquant les récents changements opérés dans ce corps de sécurité, un
officier militaire à la retraite, qui a requis l’anonymat, affirme que
«l’important fut de l’avoir éloignée de l’armée, qu’importe de qui la
DCSI dépendra à l’avenir, l’essentiel est de rappeler tous les
militaires se trouvant au niveau des entreprises et c’est à ce titre que
nous pourrons dire que l’armée a été éloignée de la politique».Si la
restructuration du DRS peut être opérée par simple décret, lier une
telle opération à une révision de la Constitution relève du mystère.
«Nous allons vers un Etat de droit», aime à rappeler Amar Saadani,
secrétaire général du FLN, premier à lancer cette croisade contre le
patron du DRS.
Ne s’agit-il pas d’une simple opération de diversion qui vise à
détourner l’attention sur une éventuelle difficulté de trouver un
consensus politique pour faire passer la nouvelle Constitution ? Une
option plausible. Surtout que le plan de restructuration de l’armée, et
en particulier du DRS, serait fin prêt depuis plusieurs années déjà !
Ali Boukhlef
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