L’impunité au pouvoir
le 26.04.14
Bienvenue en dictature !» C’était le véritable slogan de la dernière
campagne électorale. «Circulez, il n’y a plus rien à voir !», ajouteront
aujourd’hui les ex-tribuns de la même campagne présidentielle. Ni
transition démocratique ni manifestation pour tamazight ou pour les
libertés. Sonnés par les coups de matraque de dimanche dernier, les
initiateurs de la marche du 20 Avril ont presque oublié la revendication
de l’officialisation de tamazight et tentent de rassembler leurs forces
pour redescendre dans la rue et dénoncer les violences policières. Loin
d’accéder à la revendication identitaire, le régime en place n’est pas
près, non plus, de reconnaître et d’enrayer la brutalité qui lui est
inhérente.
L’issue du dernier scrutin présidentiel paraît de plus en plus comme
une défaite intégrale et une fin de non-recevoir pour toutes les
revendications politiques, sociales et culturelles. Les autorités, qui
annoncent la suspension «provisoire» des agents de police impliqués dans
les violences de dimanche à Tizi Ouzou en attendant les conclusions
d’une enquête qui va sans doute chevaucher d’autres épisodes de
répression, sont en réalité en train de dire : «Nous revendiquons
l’impunité, c’est dans notre programme.» Il suffit de rappeler que les
gendarmes auteurs des 126 assassinats en 2001 en Kabylie n’ont pas été
jugés ; ils ont simplement été «délocalisés».
Or, les fusillades à balles explosives sur des manifestants sont plus
graves que les scènes de brutalité policière filmées dimanche à Tizi
Ouzou. Les atermoiements des autorités pour déterminer les
responsabilités dans les dérapages du 20 avril sont soutenus par un
dispositif de manipulation agissant à partir des réseaux sociaux, où la
vidéo montrant le déchaînement de violence des policiers a été
promptement présentée comme étant un document ancien, datant d’avant la
révolution numérique. La même pollution politico-médiatique tend à faire
croire que les vrais coupables sont ceux qui filment les actes de
violence et non ceux qui les commettent, en distillant que l’auteur
«présumé» de la vidéo a été arrêté.
Le régime évolue quasiment sur du velours. La société civile est
déstructurée, la classe politique groggy. Il n’y a pas de collectifs
d’avocats ou de forces politiques qui aillent au-delà du simple
communiqué de condamnation. Pendant ce temps, le pouvoir continue son
œuvre d’embrigadement et de gestion policière des masses. Même dans les
dictatures du siècle passé, il était possible d’aller librement voir un
match de football. Dans notre pays, il a été décidé qu’il faut
s’inscrire dans une APC ou auprès d’un comité interlope pour assister à
la finale de la Coupe d’Algérie de jeudi prochain.
Les tickets et le transport sont payés et assurés par la wilaya de Tizi
Ouzou pour les supporters de la JSK inscrits et éligibles pour aller au
stade de Blida. Un public clés en main pour une rencontre de football
politiquement normalisée. Dans ce 4e mandat, les walis et les présidents
d’APC seront exemptés des tâches de développement local mais seront
réquisitionnés pour des missions de mise sous contrôle de la société.
Djaffar Tamani
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