Les diplomates européens à Tel-Aviv ne sont pas des
militants BDS, ils représentent des États qui sont fortement engagés aux côtés
d'Israël. Dans leur rapport annuel à «usage interne», ils parlent d'accélération
sans «précédent de la colonisation» à Jérusalem-Est depuis la reprise du
«processus de paix» en juillet dernier sous la houlette des Américains. Pour
illustrer cette accélération, ils soulignent que les autorisations de
construction de logements à Jérusalem-Est entre août 2013 et janvier 2014 ont
été aussi importantes que durant les quatre années précédentes.
Quand les diplomates de pays amis d'Israël font ce
genre de constat, cela signifie qu'il n'existe plus aucune raison de négocier.
Et ils s'attendent à ce qu'Israël œuvre à remettre en cause le statuquo autour
de l'esplanade de la Mosquée d'Al-Aqsa. «Il existe un risque significatif pour
que des incidents sur l'esplanade des Mosquées (...) ne suscitent des réactions
extrêmes aussi bien localement qu'à travers le monde arabo-musulman». Ce
rapport européen montre à quel point les dirigeants palestiniens aiment se
duper autour du rôle de «médiateur» des Etats-Unis qui n'a jamais existé, même
sous Obama. Les dernières négociations de «paix» relancées par John Kerry ne
diffèrent en rien de toutes celles menées précédemment, elles sont l'écran de
fumée derrière lequel se poursuit une entreprise méthodique d'occupation et de
purification ethno-religieuse de la Palestine. L'accélération de la colonisation
de Jérusalem-Est, survenant de pair avec un morcellement de la Cisjordanie, se
fait avec l'aval tacite de l'administration américaine et le soutien franc de
l'establishment américain.
Il ne faut pas s'attendre à ce que le rapport des
diplomates européens se traduise par des mesures pratiques même s'il contient
quelques recommandations sur l'étiquetage des produits venant des colonies et
le non-octroi de visas aux colons «reconnus coupables» de violences contre les
Palestiniens. Mais encore une fois ce rapport qui met clairement en corrélation
la fiction de la négociation sous supervision US et l'accélération de la
colonisation soulève des questions sur la démarche, aberrante, de l'Autorité
palestinienne. Que peuvent-ils espérer d'un processus vicié à la base et dans
un contexte de divisions internes qui réduit à néant la capacité de «négocier»
de l'Autorité palestinienne. Celle-ci a pourtant tous les éléments en main pour
savoir qu'il n'en sortira rien de ces négociations censées se terminer en
avril.
Nabil Chaat, responsable des relations
internationales au Fatah, fait un constat sans appel sans en tirer les
conclusions qui s'imposent. Il constate en effet que les «Américains n'ont pas
joué honnêtement leur rôle de médiateur» et que l'administration Obama colle
encore plus fortement aux exigences israéliennes que ne l'ont été les
administrations de George Bush senior et Bill Clinton. Cette lucidité du
constat ne se traduit pas par une politique adaptée. On continue de courir
derrière l'administration tout en retardant, par les actes, le processus de
réconciliation avec le Hamas. Nabil Chaat a agité la possibilité de «suivre la
voie de l'Afrique du Sud» et de soutenir un boycott total d'Israël et de
reprendre les démarches pour une reconnaissance par les organismes
internationaux et notamment par la Cour pénale internationale.
Tout cela est énoncé comme une vague possibilité dans
l'espoir, vain, d'être entendu par une administration américaine qui fait de la
surenchère dans la défense d'Israël. Cela dépasse la naïveté, on est dans la
faute politique qui se perpétue. Et le fait que l'Autorité palestinienne est
devenue une instance de fait à la légitimité populaire ébranlée est pour
beaucoup dans cette fuite en avant. Il est patent qu'il n'y a strictement plus
rien à négocier. La seule chose à faire est de reconstruire l'union nationale
et de résister.
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