Hicham Aboud écrit à Sellal : «Pourquoi humilier l’Algérie ?»
Quelques heures après son refoulement par la PAF à l'aéroport
international d'Alger alors qu'il devait se rendre en Tunisie pour
participer à une émission télé, le premier responsable des deux
quotidiens Jaridati et Mon journal, Hicham Aboud, adresse une
lettre ouverte au Premier ministre dans laquelle il s'interroge sur
"l"acharnement administratif, judiciaire et policier" pour lequel il
fait l'objet.
Lettre ouverte à Monsieur le premier ministre
Pourquoi humilier l’Algérie ?
Monsieur,
Je viens de faire l’objet, aujourd’hui 26 juin, d’une interdiction de
sortie du territoire national sans que ne me soit indiqué le motif de
cette décision illégale et arbitraire. Une décision qui vient dans la
suite de l’interdiction des deux quotidiens nationaux que je dirige,
«Jaridati » et « Mon journal » de la publicité institutionnelle depuis
le 6 juin et de l’annonce d’une série d’accusations qui réduisent
l’Algérie à une taille qui n’est guère la sienne. Est-ce que l’Algérie
qui a combattu et vaincu l’une des plus grandes puissances militaires et
ses alliés est-elle devenue si faible pour qu’une déclaration de presse
d’un simple journaliste puisse constituer une menace à sa sécurité et à
son intégrité territoriale ? Pour ma part, je n’oserai jamais me sentir
au niveau d’un Etat de la grandeur de l’Algérie pour prétendre à
menacer sa sécurité et son intégrité territoriale.
Monsieur le premier ministre,
Malgré un exil forcé de 15 ans, je n’ai jamais pensé un seul instant à
me naturaliser ni même mon épouse et mes enfants n’ont pensé le faire
pour la simple raison que je me suis, toujours, senti fier d’appartenir à
la Grande Algérie. Et dire qu’ils sont nombreux ces hauts responsables
de l’Etat qui ont la double nationalité et certains d’entre eux siègent
au gouvernement. Cette même fierté d’appartenance à l’Algérie a fait que
lors de ma participation à la 23ème session de la Commission des Droits
de l’Homme de l’ONU qui s’est déroulée à Genève du 27 mai au 14 juin,
je me sentais dans une gêne profonde en voyant des participants évoquer
les accusations dont on m’accable dans mon pays. J’ai tout fait pour
minimiser ces accusations tellement j’avais honte pour mon pays
Aujourd’hui, je suis victime d’un acharnement qui n’honore guère l’Etat
algérien. Et je me demande quel est l’intérêt de l’Algérie à ce que soit
entravée ma liberté de circulation ? Cela ne fera que ternir l’image de
mon pays.
Au moment où ceux qui ont dilapidé les deniers publics et dont leur
implication dans de scandaleuses affaires de corruption ne sont
nullement inquiétés et circulent en toute liberté, un journaliste fait
l’objet d’un acharnement administratif, judiciaire et policier dont
les auteurs doivent, au moins, expliquer leurs motivations. C’est en
votre qualité de premier ministre chargé des plus hautes fonctions en
l’absence du chef de l’Etat, que je vous prie de bien vouloir éclairer
ma lanterne et celle de l’opinion publique sur les raisons de ce
harcèlement et sur ses auteurs, afin que les responsabilités soient
situées. Et que cesse l’humiliation de l’Algérie à travers des mesures
illégales en contradiction avec les principes d’un Etat de droit.
Elwatan.com
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