In KalimaDZ
L’Algérie devrait ouvrir son secteur audiovisuel au secteur privé.
C’était la bonne nouvelle annoncée en septembre dernier. Un projet de
loi adopté en conseil des ministre le 12 septembre à propos de la
liberté de la presse, et c’était, en soi, une petite révolution. Le
régime s’était engagé à ouvrir les médias audiovisuels au secteur privé.
Ouverture réelle , ou réforme cosmétique? L’expérience des
correspondants pour la presse étrangère en Algérie démontre qu’au
contraire, le régime algérien n’est pas prêt de déverrouiller le secteur
de l’information audiovisuelle en Algérie, qui relève selon lui d’une
question de sécurité nationale.
Par Ahmed Tazir
Journaliste, ancien correspondant en Algérie de la chaîne France 24.
Depuis l’indépendance en 1962, la télévision et la radio sont un
monopole d’État en Algérie où la diversité politique est absente. Pour
ce qui concerne la télévision, les téléspectateurs algériens ont droit à
ce que la rue algérienne appelle « l’Unique » ou « l’Itima »
l’orpheline en arabe : il désigne l’ENTV ( Entreprise Nationale de
Télévision ) qui se découpe en plusieurs chaînes ( une Hertzienne,
d’autres par satellite arabophone, francophone, berbère et religieuse
).Toutes ont la même politique éditoriale et le journal de 20h, repris
par tous les canaux, est une exemple très révélateur de la ligne
éditoriale: les premières 15 minutes du journal se résume à l’énoncée de
communiqués de la présidence de la république « Le président Bouteflika
souhaite ses meilleurs vœux aux président du Mali à l’occasion de
l’anniversaire de la fête nationale de son pays …le président Bouteflika
reçoit le président de l’Assemblée Nationale du Kirghizstan … » Après
ces deux minutes d’images commentées par le présentateur pour informer
le téléspectateur de cette actualité « incontournable », s’en suit des
reportages vantant les réalisations des différents ministres :un tronçon
d’autoroute terminé permet à Amar Ghoul, le ministre des transports, de
débarquer dans la petite lucarne, pour se féliciter du projet et faire
taire les mauvaises langues qui reprocheraient le coût exorbitant de
cette autoroute ( 11 milliard de dollars ) et les pots -de-vin
alourdissant la facture. Tout le journal consacre les activités
officielles des dirigeants. Rien sur la société civile, rien sur la vie
de tous les jours des algériens, pas ou peu de reportage sur les faits
divers de société, alors que chaque jour des manifestions, des
rassemblements dénoncent des licenciements, la politique sociale quasi
inexistante, le système éducatif à l’abandon. Aucune de ces
manifestations n’est reprise dans les journaux de l’ENTV, même la
culture est traitée selon la vision des équipes d’encadrement de l’ENTV,
soucieuses de me pas déplaire au régime. Les artistes ( écrivains,
chanteurs …) qui ne sont dans la ligne officielle du régime n’ont donc
aucun droit de citée sur l’ENTV.
Le colonel Fawzi à la manœuvre
Le régime affirme aujourd’hui son intention d’ouvrir le secteur
audiovisuel au privé et donc de donner plus de liberté dans le
traitement de l’information sur les questions liées à ce pays.
L’expérience du traitement par les autorités algériennes des
correspondants pour des chaînes étrangères en Algérie renseigne beaucoup
sur les velléités du régime à verrouiller l’accès à l’information et
renforce le sentiment d’illusion quant aux prétendues réformes
algériennes de l’audiovisuel. Correspondant pour la chaîne France 24 en
Algérie depuis décembre 2007, j’ai sollicité trois fois une
accréditation pour pouvoir couvrir librement l’actualité en Algérie :
activités officielles et reportages sur le terrain. Le ministère
algérien de la communication m’a indiqué que mon dossier était en cours.
Deux années après, je reçois, par téléphone, une réponse négative. Je
réclame, aussitôt, une notification écrite que je n’aurais jamais. Pour
toute réclamation, il faut s’adresser au réel décideur pour tout ce qui
concerne la presse ( locale et étrangère ). Il s’agit d’un certain
Colonel Fawzi, directeur de la communication au sein du DRS (
Département de la Sécurité et du Renseignement) qui délivre, ou pas, de
façon discrétionnaire, les accréditations. Un militaire qui fait la
pluie et le beau temps dans un domaine qui ne le concerne guère à
première vue. C’est là aussi, une originalité du régime algérien. Je
comprendrais ce refus plus tard.
Je décide malgré tout de continuer à travailler et de couvrir
l’actualité,voir les dossiers jugés « tabous » par les autorités
algériennes .Le cas des disparus pendant la guerre civile algérienne des
années 90 m’intéresse depuis longtemps. La pratique des disparitions
forcées a été l’un des instruments principaux de la « sale guerre »
déclenchée en janvier 1992 par les généraux algériens contre les
opposants et la population civile. Les ONG de défense des droits humains
estiment aujourd’hui de 15 000 à 20 000 le nombre de « disparus »,
principalement entre 1994 et 1996. Je m’ intéresse, par ailleurs, à la
naissance d’une association « Mich’al » qui regroupe les enfants de
disparus de Jijel ( 400 km à l’Est d’Alger ). Je rencontre le
responsable de cette association, Moussa Bourefis. Il estime le nombre
de disparus des années 90 dans la région de Jijel à environ un millier (
souvent des proches des milieux islamistes, sympathisants du Front
Islamique du Salut dissous, voire simples notables religieux … et aussi
des citoyens sans affinitées politiques particulières ). Cependant, de
nombreux cas n’ont pu à ce jour être répertoriés en raison des craintes
des familles dues à l’isolement géographique et à la forte présence de
militaires dans la région.
La réconciliation pour éviter la vérité
La loi de 2006 sur la Paix et la Réconciliation Nationale instaure un
cadre légal pour l’impunité persistante dont bénéficient les auteurs
des atrocités de cette période. La loi érige en infraction pénale le
fait de critiquer les institutions de l’État ou les forces de sécurité
pour la façon dont elles se sont conduites au cours de la période des
troubles politiques, condamnant donc potentiellement tous ceux qui
affirment que les forces de sécurité se sont rendues coupables de
violations des droits humains.
La loi offre également, des indemnisations aux familles des personnes «
disparues ». Moussa Bourefis, explique que l’octroi d’indemnisations
prévues par la loi sur la réconciliation nationale proposé et acté par
Abdelaziz Bouteflika, a, en réalité, souvent été présenté comme une aide
sociale afin de pousser les familles sans ressources à faire les
démarches nécessaires et tenté de briser leur résistance. Selon lui, de
nombreuses familles de la région de Jijel ont été convoquées et menacées
de représailles si elles ne déclaraient pas au niveau des tribunaux que
leur proche avaient été arrêté par un groupe armé dont l’identité est
inconnue ou par un groupe terroriste. Or dans la majorité des cas, les
familles savent que ce sont des agents de l’Etat, souvent, des
militaires, qui sont responsables des enlèvements. Très souvent, elles
connaissent, même leurs noms. J’ai enregistré de nombreux témoignages
d’enfant de disparus. Celui d’un jeune homme de 29 ans qui me raconte,
les larmes aux yeux, qu’il ne dort jamais avant deux heures du matin,
dans l’espoir que sont père, enlevé à son domicile en 1996, ne frappe un
jour à la porte. A ce jour il n’a toujours pas de nouvelles. De retour à
Alger, pour « monter » mon sujet pour l’émission « Une semaine au
Maghreb » diffusée sur la chaîne France 24, je reçois une un coup de fil
du ministère algérien de la communication. Je pense à une réponse
positive pour mon accréditation, je suis bien naïf. Arrivé au ministère
de la communication, la responsable du service audiovisuel me reçoit
pour me lancer « Je sais que vous avez interviewé Monsieur Bourefis à
Jijel et d’autre personnalités, aujourd’hui vous avez à faire à moi. La
prochaine fois vous aurez à faire aux services de sécurité » et de me
lancer laconiquement « akhdem ala bladek! », comprenez « travaille pour
ton pays !». Tout un programme. Le sujet ne sera pas diffusé, je ne
voulais pas abattre mes cartes pour d’autres sujets à venir mais
l’expérience a été perturbante.
Said Bouteflika, le président bis
J’ai en effet réalisé de nombreux reportages, notamment pendant la
campagne présidentielle d’Abdelaziz Bouteflika pour son troisième mandat
en 2009 sans accréditation. Une campagne, gérée par l’œil du roi, son
petit frère Said, que nous filmions dans nos reportages en montrant
l’ascendant important que ce dernier avait pris dans la gestion du
pourvoir présidentiel et que nous qualifions dans les reportages de «
président bis ». Pas ou peu de réaction des autorités. Je fais un
reportage mettant en cause l’armée algérienne dans la disparition de
citoyens algériens à Jijel dans les années 90 et me voilà convoqué des
menaces, à peine voilées. C’est à ce type d’expérience, je suppose, que
l’ on comprend qui gouverne réellement en Algérie.
Ce genre d’atteinte à la liberté de la presse n’est pas un cas unique.
De nombreux correspondants de presse étrangère subissent le même sort et
rechignent à travailler en Algérie de façon permanente en résidant sur
place .
L ‘ancienne correspondante en Algérie du journal « Le monde « Florence
Beaugé, se plaindra dans les colonnes du journal El Watan du refus
répétés des autorités algériennes, de lui accorder un visa pour pouvoir
travailler en Algérie. « Je suis obligée de faire du journalisme à
distance » confiera-t- elle lors d’un entretien paru dans ce journal le
17 mars 2009.
Le cas du journaliste Arezki Ait Larbi, est également intéressant. Il
vit et habite en Algérie, mais fait l’objet depuis plusieurs années
d’un harcèlement répété de la part des autorités algériennes. Sur les
colonnes du Journal El Watan, il raconte le 4 avril 2010 ses demandes
répétées d’accréditation. « En 1996, je dépose un autre dossier
d’accréditation au nom du « Figaro ». Le fonctionnaire du ministère des
Affaires étrangères, en charge des accréditations, m’informe qu’une
éventuelle réponse positive était subordonnée à une « entretien amical »
avec un certain commandant Fawzi (qui deviendra colonel par la suite )
dont il se proposait de me remettre le numéro de téléphone pour «
convenir d’un rendez-vous et prendre un café ». Pour avoir refusé de me
soumettre à cette curieuse procédure, qui n’est prévue par aucun texte
de loi, mon dossier restera bloqué. Le même sort sera réservé à deux
nouvelles demandes, en 1998 et en 2003. Il se dit aussi que le colonel
Fawzi détient le pouvoir de vie ou de mort sur de nombreux titres de la
presse… Que pour obtenir le précieux sésame pour lancer une publication,
il fallait rentrer au préalable dans les bonnes grâces du colonel. En
février 2005, j’ai déposé auprès du procureur de Hussein Dey un dossier
pour la création d’un hebdomadaire. Première entorse à la loi, le
magistrat a refusé de me délivrer le récépissé prévu par le code de
l’information. Depuis cinq ans, je suis ballotté entre le ministère de
la Justice et celui de la Communication. On a même refusé de me notifier
une réponse négative pour me permettre de faire valoir mes droits
devant le Conseil d’Etat. L’année dernière, plusieurs nouveaux journaux
ont été autorisés à paraître, sauf le mien. Il y a quelques mois, j’ai
eu le fin mot de l’histoire. Des fonctionnaires des ministères de la
Justice comme de la Communication, m’ont avoué que mon cas les
dépassait, avant de me conseiller de voir le colonel Fawzi qui, selon
eux, est le seul à pouvoir débloquer mon dossier. Je ne connais pas ce
colonel et je n’ai aucune raison de me soumettre à une démarche qui
n’est prévue par aucun texte de loi »
La nouvelle loi muselle les citoyens
En matière de législation, les autorités algériennes viennent
d’édicter des textes qui musellent encore plus la presse, notamment
lorsqu’il s’agit pour les journalistes de parler des dossiers qui
fâchent.
Le 15 janvier 2012 a été publiée la loi organique n° 12-05 du 12 janvier
2012 relative à l’information, après avis du Conseil Constitutionnel.
Les associations non agrées comme, SOS-Disparus ( qui milite notamment
pour savoir ce que sont devenus les milliers de disparus, pour la
plupart enlevés par l’armée algérienne pendant la sale guerre des années
90 ), seront interdites de diffuser de l’information, activité réservée
aux associations « agrées » (article 4). Par conséquent, l’exercice de
la liberté d’expression des associations est soumis au bon vouloir des
autorités qui ne se privent pas en générale de refuser l’enregistrement
légal d’un certain nombre d’associations. En dépit de certaines
références dans le texte aux principes des libertés fondamentales, un
grand nombre de dispositions ne respectent pas le droit des algériens de
diffuser de l’information et d’être informés. Les libertés
fondamentales des journalistes mais aussi de toute personne diffusant de
l’information, tels que les partis politiques, militants des droits de
l’homme, les associations sont ainsi violées. Tout d’abord, l’exercice
dit « libre » (article 2) de l’activité d’information est encadré par le
respect de douze conditions, très imprécises, dont celui « l’identité
nationale et des valeurs culturelles de la société, la souveraineté
nationale et l’unité nationale, les exigences de l’ordre public, les
intérêts économiques du pays et les missions et obligations de service
public. » Une telle disposition peut être interprétée si largement
qu’elle risque d’être prétexte à une censure injustifiée ou d’amener les
personnes diffusant de l’information à pratiquer une forme
d’autocensure, mettant ainsi un terme au libre exercice de la liberté de
s’exprimer et d’informer. Enfin, si la nouvelle loi ne prévoit plus de
peine d’emprisonnement en matière d’infractions commises par voie de
presse, le montant des amendes a considérablement augmenté. Par
ailleurs, le délit de diffamation, est toujours prévu aux articles 296
et 298 du code pénal et s’applique à tout individu y compris aux
journalistes algériens. Le délit de diffamation est puni de 25000 à
50000 DA d’amende et de 2 à 6 mois de prison. N’oublions pas également
que l’article 46 de ordonnance 06-01 portant application de la charte
pour la paix et la réconciliation nationale est lui aussi toujours en
vigueur et vient s’ajouter aux violations de la liberté d’expression
consacrée par les textes législatifs algériens. Il menace de 250 000 à
500 000 DA d’amende et de trois à cinq ans de prison emprisonnement,
«quiconque qui [...] utilise ou instrumentalise les blessures de la
tragédie nationale, pour porter atteinte aux institutions de la
République algérienne démocratique et populaire, fragiliser l’Etat,
nuire à l’honorabilité de ses agents qui l’ont dignement servie, ou
ternir l’image de l’Algérie sur le plan international. » En conséquence,
si un journaliste algérien s’avisait de faire une reportage sur les
disparus des années 90 ou mettre en cause l’armée (« agents qui ont
dignement servie l’Etat » selon les textes ), il sera sous le coup de la
loi algérienne ( amendes et prison ). Un texte qui n’est pas conforme à
la constitution algérienne et au droit international car en
contradiction de la liberté d’expression, elle même, garantie par la
constitution algérienne, ainsi que les conventions internationales de
protection des droits de l’homme, qui ont une valeur supérieure au droit
national algérien. A noter que sur le plan juridique , les
correspondants de presse ayant la double nationalité franco- algérienne (
c’est mon cas ) ne sont pas protégés en cas de litige en territoire
algérien. Ils sont algériens, et donc sont soumis à la loi algérienne et
ne bénéficient pas de la protection diplomatique française.En
définitive, le DRS, le Département Renseignements et Sécurité algérien (
ex Sécurité Militaire ), dépendant du ministère algérien de la défense,
dont est issu le colonel Fawzi, joue un rôle prépondérant dans le
contrôle de la presse écrite et audiovisuelle, même étrangère en
territoire algérien, comme dans la vie sociale et politique en général.
Ce service considère le contrôle des informations diffusées par les
médias audiovisuels concernant l’Algérie comme relevant de la sécurité
nationale. Les médias étrangers sur place sont scrutés sur ce qu’ils
envoient aux télévisions étrangères. Et attention au « dérapage ».
L’ambassadeur de France en Algérie : « j’ai les mains liées »
Chaîne très regardée en Algérie, Al Jazeera n’est plus présente à
Alger depuis l’année 2004. Son bureau a été fermé par les autorités qui
lui reprochaient notamment de donner régulièrement la parole à d’anciens
déserteurs de l’armée comme le colonel Mohamed Samraoui, ou d’anciennes
figures de l’ex-FIS, comme Mourad Dhina et Abassi Madani. Pour avoir
couvert de nombreux sujets « tabous » comme le harcèlement par les
autorités algériennes des chrétiens évangélistes qui voyaient leur lieu
de culte fermés, ou la difficile réconciliation nationale qui force,
désormais, des familles victimes du terrorisme à côtoyer, des ancien
terroristes, indemnisés et protégés par l’État algérien, je
n’obtiendrais jamais mon accréditation après quatre ans de travail sur
place. Ce sésame est indispensable en Algérie, car contrairement à la
presse écrite, les reportages sur le terrains se font avec du matériel (
caméra, trépied ) bien visible. Il est impossible de sortir ce matériel
à Alger sans attirer un troupeau de policier qui vous réclame ladite
accréditation. A contrario le correspondant arabophone de France 24, a
obtenu, son accréditation en bonne et du forme de la part des autorité
algériennes. J’ai interpellé l’ambassadeur de France en Algérie pour lui
faire du refus des autorités algériennes d’accréditer le correspondant
de France 24, une chaine française. Il me répondra penaud « j’ai les
mains liées » . J’en ai déduit, que la liberté de la presse en Algérie
n’était pas une priorité pour les diplomates français, plus soucieux de
se battre pour vendre les Renault et Alstom que de défendre « l’
Audiovisuel Extérieur » de la France ( l’expression étant elle même
sujet à caution, car en définitive, il ne s’agit que de journalisme).
Voilà comment le régime algérien se débarrasse, sans trop de fracas,
d’un correspondant de presse étrangère, gênant.
Ce type d’expérience renseigne bien sur le caractère illusoire d’une
ouverture réelle de l’audiovisuel au privé. En Algérie, le régime pense
que la maitrise des images diffusées depuis le pays est fondamentale
pour le maintien du statu quo. Même les images diffusées par des
correspondants étrangers doivent être
Inédit : Ahmed TAZIR, correspondant de presse témoigne!
[
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In KalimaDZ
L’Algérie devrait ouvrir son secteur audiovisuel au secteur privé.
C’était la bonne nouvelle annoncée en septembre dernier. Un projet de
loi adopté en conseil des ministre le 12 septembre à propos de la
liberté de la presse, et c’était, en soi, une petite révolution. Le
régime s’était engagé à ouvrir les médias audiovisuels au secteur privé.
Ouverture réelle , ou réforme cosmétique? L’expérience des
correspondants pour la presse étrangère en Algérie démontre qu’au
contraire, le régime algérien n’est pas prêt de déverrouiller le secteur
de l’information audiovisuelle en Algérie, qui relève selon lui d’une
question de sécurité nationale.
Par Ahmed Tazir
Journaliste, ancien correspondant en Algérie de la chaîne France 24.
Depuis l’indépendance en 1962, la télévision et la radio sont un
monopole d’État en Algérie où la diversité politique est absente. Pour
ce qui concerne la télévision, les téléspectateurs algériens ont droit à
ce que la rue algérienne appelle « l’Unique » ou « l’Itima »
l’orpheline en arabe : il désigne l’ENTV ( Entreprise Nationale de
Télévision ) qui se découpe en plusieurs chaînes ( une Hertzienne,
d’autres par satellite arabophone, francophone, berbère et religieuse
).Toutes ont la même politique éditoriale et le journal de 20h, repris
par tous les canaux, est une exemple très révélateur de la ligne
éditoriale: les premières 15 minutes du journal se résume à l’énoncée de
communiqués de la présidence de la république « Le président Bouteflika
souhaite ses meilleurs vœux aux président du Mali à l’occasion de
l’anniversaire de la fête nationale de son pays …le président Bouteflika
reçoit le président de l’Assemblée Nationale du Kirghizstan … » Après
ces deux minutes d’images commentées par le présentateur pour informer
le téléspectateur de cette actualité « incontournable », s’en suit des
reportages vantant les réalisations des différents ministres :un tronçon
d’autoroute terminé permet à Amar Ghoul, le ministre des transports, de
débarquer dans la petite lucarne, pour se féliciter du projet et faire
taire les mauvaises langues qui reprocheraient le coût exorbitant de
cette autoroute ( 11 milliard de dollars ) et les pots -de-vin
alourdissant la facture. Tout le journal consacre les activités
officielles des dirigeants. Rien sur la société civile, rien sur la vie
de tous les jours des algériens, pas ou peu de reportage sur les faits
divers de société, alors que chaque jour des manifestions, des
rassemblements dénoncent des licenciements, la politique sociale quasi
inexistante, le système éducatif à l’abandon. Aucune de ces
manifestations n’est reprise dans les journaux de l’ENTV, même la
culture est traitée selon la vision des équipes d’encadrement de l’ENTV,
soucieuses de me pas déplaire au régime. Les artistes ( écrivains,
chanteurs …) qui ne sont dans la ligne officielle du régime n’ont donc
aucun droit de citée sur l’ENTV.
Le colonel Fawzi à la manœuvre
Le régime affirme aujourd’hui son intention d’ouvrir le secteur
audiovisuel au privé et donc de donner plus de liberté dans le
traitement de l’information sur les questions liées à ce pays.
L’expérience du traitement par les autorités algériennes des
correspondants pour des chaînes étrangères en Algérie renseigne beaucoup
sur les velléités du régime à verrouiller l’accès à l’information et
renforce le sentiment d’illusion quant aux prétendues réformes
algériennes de l’audiovisuel. Correspondant pour la chaîne France 24 en
Algérie depuis décembre 2007, j’ai sollicité trois fois une
accréditation pour pouvoir couvrir librement l’actualité en Algérie :
activités officielles et reportages sur le terrain. Le ministère
algérien de la communication m’a indiqué que mon dossier était en cours.
Deux années après, je reçois, par téléphone, une réponse négative. Je
réclame, aussitôt, une notification écrite que je n’aurais jamais. Pour
toute réclamation, il faut s’adresser au réel décideur pour tout ce qui
concerne la presse ( locale et étrangère ). Il s’agit d’un certain
Colonel Fawzi, directeur de la communication au sein du DRS (
Département de la Sécurité et du Renseignement) qui délivre, ou pas, de
façon discrétionnaire, les accréditations. Un militaire qui fait la
pluie et le beau temps dans un domaine qui ne le concerne guère à
première vue. C’est là aussi, une originalité du régime algérien. Je
comprendrais ce refus plus tard.
Je décide malgré tout de continuer à travailler et de couvrir
l’actualité,voir les dossiers jugés « tabous » par les autorités
algériennes .Le cas des disparus pendant la guerre civile algérienne des
années 90 m’intéresse depuis longtemps. La pratique des disparitions
forcées a été l’un des instruments principaux de la « sale guerre »
déclenchée en janvier 1992 par les généraux algériens contre les
opposants et la population civile. Les ONG de défense des droits humains
estiment aujourd’hui de 15 000 à 20 000 le nombre de « disparus »,
principalement entre 1994 et 1996. Je m’ intéresse, par ailleurs, à la
naissance d’une association « Mich’al » qui regroupe les enfants de
disparus de Jijel ( 400 km à l’Est d’Alger ). Je rencontre le
responsable de cette association, Moussa Bourefis. Il estime le nombre
de disparus des années 90 dans la région de Jijel à environ un millier (
souvent des proches des milieux islamistes, sympathisants du Front
Islamique du Salut dissous, voire simples notables religieux … et aussi
des citoyens sans affinitées politiques particulières ). Cependant, de
nombreux cas n’ont pu à ce jour être répertoriés en raison des craintes
des familles dues à l’isolement géographique et à la forte présence de
militaires dans la région.
La réconciliation pour éviter la vérité
La loi de 2006 sur la Paix et la Réconciliation Nationale instaure un
cadre légal pour l’impunité persistante dont bénéficient les auteurs
des atrocités de cette période. La loi érige en infraction pénale le
fait de critiquer les institutions de l’État ou les forces de sécurité
pour la façon dont elles se sont conduites au cours de la période des
troubles politiques, condamnant donc potentiellement tous ceux qui
affirment que les forces de sécurité se sont rendues coupables de
violations des droits humains.
La loi offre également, des indemnisations aux familles des personnes «
disparues ». Moussa Bourefis, explique que l’octroi d’indemnisations
prévues par la loi sur la réconciliation nationale proposé et acté par
Abdelaziz Bouteflika, a, en réalité, souvent été présenté comme une aide
sociale afin de pousser les familles sans ressources à faire les
démarches nécessaires et tenté de briser leur résistance. Selon lui, de
nombreuses familles de la région de Jijel ont été convoquées et menacées
de représailles si elles ne déclaraient pas au niveau des tribunaux que
leur proche avaient été arrêté par un groupe armé dont l’identité est
inconnue ou par un groupe terroriste. Or dans la majorité des cas, les
familles savent que ce sont des agents de l’Etat, souvent, des
militaires, qui sont responsables des enlèvements. Très souvent, elles
connaissent, même leurs noms. J’ai enregistré de nombreux témoignages
d’enfant de disparus. Celui d’un jeune homme de 29 ans qui me raconte,
les larmes aux yeux, qu’il ne dort jamais avant deux heures du matin,
dans l’espoir que sont père, enlevé à son domicile en 1996, ne frappe un
jour à la porte. A ce jour il n’a toujours pas de nouvelles. De retour à
Alger, pour « monter » mon sujet pour l’émission « Une semaine au
Maghreb » diffusée sur la chaîne France 24, je reçois une un coup de fil
du ministère algérien de la communication. Je pense à une réponse
positive pour mon accréditation, je suis bien naïf. Arrivé au ministère
de la communication, la responsable du service audiovisuel me reçoit
pour me lancer « Je sais que vous avez interviewé Monsieur Bourefis à
Jijel et d’autre personnalités, aujourd’hui vous avez à faire à moi. La
prochaine fois vous aurez à faire aux services de sécurité » et de me
lancer laconiquement « akhdem ala bladek! », comprenez « travaille pour
ton pays !». Tout un programme. Le sujet ne sera pas diffusé, je ne
voulais pas abattre mes cartes pour d’autres sujets à venir mais
l’expérience a été perturbante.
Said Bouteflika, le président bis
J’ai en effet réalisé de nombreux reportages, notamment pendant la
campagne présidentielle d’Abdelaziz Bouteflika pour son troisième mandat
en 2009 sans accréditation. Une campagne, gérée par l’œil du roi, son
petit frère Said, que nous filmions dans nos reportages en montrant
l’ascendant important que ce dernier avait pris dans la gestion du
pourvoir présidentiel et que nous qualifions dans les reportages de «
président bis ». Pas ou peu de réaction des autorités. Je fais un
reportage mettant en cause l’armée algérienne dans la disparition de
citoyens algériens à Jijel dans les années 90 et me voilà convoqué des
menaces, à peine voilées. C’est à ce type d’expérience, je suppose, que
l’ on comprend qui gouverne réellement en Algérie.
Ce genre d’atteinte à la liberté de la presse n’est pas un cas unique.
De nombreux correspondants de presse étrangère subissent le même sort et
rechignent à travailler en Algérie de façon permanente en résidant sur
place .
L ‘ancienne correspondante en Algérie du journal « Le monde « Florence
Beaugé, se plaindra dans les colonnes du journal El Watan du refus
répétés des autorités algériennes, de lui accorder un visa pour pouvoir
travailler en Algérie. « Je suis obligée de faire du journalisme à
distance » confiera-t- elle lors d’un entretien paru dans ce journal le
17 mars 2009.
Le cas du journaliste Arezki Ait Larbi, est également intéressant. Il
vit et habite en Algérie, mais fait l’objet depuis plusieurs années
d’un harcèlement répété de la part des autorités algériennes. Sur les
colonnes du Journal El Watan, il raconte le 4 avril 2010 ses demandes
répétées d’accréditation. « En 1996, je dépose un autre dossier
d’accréditation au nom du « Figaro ». Le fonctionnaire du ministère des
Affaires étrangères, en charge des accréditations, m’informe qu’une
éventuelle réponse positive était subordonnée à une « entretien amical »
avec un certain commandant Fawzi (qui deviendra colonel par la suite )
dont il se proposait de me remettre le numéro de téléphone pour «
convenir d’un rendez-vous et prendre un café ». Pour avoir refusé de me
soumettre à cette curieuse procédure, qui n’est prévue par aucun texte
de loi, mon dossier restera bloqué. Le même sort sera réservé à deux
nouvelles demandes, en 1998 et en 2003. Il se dit aussi que le colonel
Fawzi détient le pouvoir de vie ou de mort sur de nombreux titres de la
presse… Que pour obtenir le précieux sésame pour lancer une publication,
il fallait rentrer au préalable dans les bonnes grâces du colonel. En
février 2005, j’ai déposé auprès du procureur de Hussein Dey un dossier
pour la création d’un hebdomadaire. Première entorse à la loi, le
magistrat a refusé de me délivrer le récépissé prévu par le code de
l’information. Depuis cinq ans, je suis ballotté entre le ministère de
la Justice et celui de la Communication. On a même refusé de me notifier
une réponse négative pour me permettre de faire valoir mes droits
devant le Conseil d’Etat. L’année dernière, plusieurs nouveaux journaux
ont été autorisés à paraître, sauf le mien. Il y a quelques mois, j’ai
eu le fin mot de l’histoire. Des fonctionnaires des ministères de la
Justice comme de la Communication, m’ont avoué que mon cas les
dépassait, avant de me conseiller de voir le colonel Fawzi qui, selon
eux, est le seul à pouvoir débloquer mon dossier. Je ne connais pas ce
colonel et je n’ai aucune raison de me soumettre à une démarche qui
n’est prévue par aucun texte de loi »
La nouvelle loi muselle les citoyens
En matière de législation, les autorités algériennes viennent
d’édicter des textes qui musellent encore plus la presse, notamment
lorsqu’il s’agit pour les journalistes de parler des dossiers qui
fâchent.
Le 15 janvier 2012 a été publiée la loi organique n° 12-05 du 12 janvier
2012 relative à l’information, après avis du Conseil Constitutionnel.
Les associations non agrées comme, SOS-Disparus ( qui milite notamment
pour savoir ce que sont devenus les milliers de disparus, pour la
plupart enlevés par l’armée algérienne pendant la sale guerre des années
90 ), seront interdites de diffuser de l’information, activité réservée
aux associations « agrées » (article 4). Par conséquent, l’exercice de
la liberté d’expression des associations est soumis au bon vouloir des
autorités qui ne se privent pas en générale de refuser l’enregistrement
légal d’un certain nombre d’associations. En dépit de certaines
références dans le texte aux principes des libertés fondamentales, un
grand nombre de dispositions ne respectent pas le droit des algériens de
diffuser de l’information et d’être informés. Les libertés
fondamentales des journalistes mais aussi de toute personne diffusant de
l’information, tels que les partis politiques, militants des droits de
l’homme, les associations sont ainsi violées. Tout d’abord, l’exercice
dit « libre » (article 2) de l’activité d’information est encadré par le
respect de douze conditions, très imprécises, dont celui « l’identité
nationale et des valeurs culturelles de la société, la souveraineté
nationale et l’unité nationale, les exigences de l’ordre public, les
intérêts économiques du pays et les missions et obligations de service
public. » Une telle disposition peut être interprétée si largement
qu’elle risque d’être prétexte à une censure injustifiée ou d’amener les
personnes diffusant de l’information à pratiquer une forme
d’autocensure, mettant ainsi un terme au libre exercice de la liberté de
s’exprimer et d’informer. Enfin, si la nouvelle loi ne prévoit plus de
peine d’emprisonnement en matière d’infractions commises par voie de
presse, le montant des amendes a considérablement augmenté. Par
ailleurs, le délit de diffamation, est toujours prévu aux articles 296
et 298 du code pénal et s’applique à tout individu y compris aux
journalistes algériens. Le délit de diffamation est puni de 25000 à
50000 DA d’amende et de 2 à 6 mois de prison. N’oublions pas également
que l’article 46 de ordonnance 06-01 portant application de la charte
pour la paix et la réconciliation nationale est lui aussi toujours en
vigueur et vient s’ajouter aux violations de la liberté d’expression
consacrée par les textes législatifs algériens. Il menace de 250 000 à
500 000 DA d’amende et de trois à cinq ans de prison emprisonnement,
«quiconque qui [...] utilise ou instrumentalise les blessures de la
tragédie nationale, pour porter atteinte aux institutions de la
République algérienne démocratique et populaire, fragiliser l’Etat,
nuire à l’honorabilité de ses agents qui l’ont dignement servie, ou
ternir l’image de l’Algérie sur le plan international. » En conséquence,
si un journaliste algérien s’avisait de faire une reportage sur les
disparus des années 90 ou mettre en cause l’armée (« agents qui ont
dignement servie l’Etat » selon les textes ), il sera sous le coup de la
loi algérienne ( amendes et prison ). Un texte qui n’est pas conforme à
la constitution algérienne et au droit international car en
contradiction de la liberté d’expression, elle même, garantie par la
constitution algérienne, ainsi que les conventions internationales de
protection des droits de l’homme, qui ont une valeur supérieure au droit
national algérien. A noter que sur le plan juridique , les
correspondants de presse ayant la double nationalité franco- algérienne (
c’est mon cas ) ne sont pas protégés en cas de litige en territoire
algérien. Ils sont algériens, et donc sont soumis à la loi algérienne et
ne bénéficient pas de la protection diplomatique française.En
définitive, le DRS, le Département Renseignements et Sécurité algérien (
ex Sécurité Militaire ), dépendant du ministère algérien de la défense,
dont est issu le colonel Fawzi, joue un rôle prépondérant dans le
contrôle de la presse écrite et audiovisuelle, même étrangère en
territoire algérien, comme dans la vie sociale et politique en général.
Ce service considère le contrôle des informations diffusées par les
médias audiovisuels concernant l’Algérie comme relevant de la sécurité
nationale. Les médias étrangers sur place sont scrutés sur ce qu’ils
envoient aux télévisions étrangères. Et attention au « dérapage ».
L’ambassadeur de France en Algérie : « j’ai les mains liées »
Chaîne très regardée en Algérie, Al Jazeera n’est plus présente à
Alger depuis l’année 2004. Son bureau a été fermé par les autorités qui
lui reprochaient notamment de donner régulièrement la parole à d’anciens
déserteurs de l’armée comme le colonel Mohamed Samraoui, ou d’anciennes
figures de l’ex-FIS, comme Mourad Dhina et Abassi Madani. Pour avoir
couvert de nombreux sujets « tabous » comme le harcèlement par les
autorités algériennes des chrétiens évangélistes qui voyaient leur lieu
de culte fermés, ou la difficile réconciliation nationale qui force,
désormais, des familles victimes du terrorisme à côtoyer, des ancien
terroristes, indemnisés et protégés par l’État algérien, je
n’obtiendrais jamais mon accréditation après quatre ans de travail sur
place. Ce sésame est indispensable en Algérie, car contrairement à la
presse écrite, les reportages sur le terrains se font avec du matériel (
caméra, trépied ) bien visible. Il est impossible de sortir ce matériel
à Alger sans attirer un troupeau de policier qui vous réclame ladite
accréditation. A contrario le correspondant arabophone de France 24, a
obtenu, son accréditation en bonne et du forme de la part des autorité
algériennes. J’ai interpellé l’ambassadeur de France en Algérie pour lui
faire du refus des autorités algériennes d’accréditer le correspondant
de France 24, une chaine française. Il me répondra penaud « j’ai les
mains liées » . J’en ai déduit, que la liberté de la presse en Algérie
n’était pas une priorité pour les diplomates français, plus soucieux de
se battre pour vendre les Renault et Alstom que de défendre « l’
Audiovisuel Extérieur » de la France ( l’expression étant elle même
sujet à caution, car en définitive, il ne s’agit que de journalisme).
Voilà comment le régime algérien se débarrasse, sans trop de fracas,
d’un correspondant de presse étrangère, gênant.
Ce type d’expérience renseigne bien sur le caractère illusoire d’une
ouverture réelle de l’audiovisuel au privé. En Algérie, le régime pense
que la maitrise des images diffusées depuis le pays est fondamentale
pour le maintien du statu quo. Même les images diffusées par des
correspondants étrangers doivent être maitrisées. Ces images, le régime,
les considèrent comme une prolongations de son audiovisuel à lui, car
c’est une spécificité bien algérienne : un fonctionnaire algérien me
fera cette confidence : « En Algérie, ce sont les autorités qui
choisissent les correspondants étrangers,et non pas pas les rédactions
». Le régime veut tout verrouiller en matière de diffusion
d’informations par l’image, c’est, selon lui, sa survie qui est en jeu.
Une gestion qui relève en Algérie plus de la paranoïa que de la gestion
raisonnable de la sécurité publique. Trop soucieux d’éviter un
ébranlement du système en place depuis 1962 par la diffusion d’images
qui le fragiliserait, le régime algérien, préférera toujours garder la
main mise sur ce « médias lourd » comme on l’appelle en Algérie .
Ahmed Tazir
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