L'admission de l'Iran au sein du SCO ouvre beaucoup d'options pour l'Iran et la région. Du fait d'être membre du SCO, l'Iran pourra participer aux projets de celui-ci, ce qui veut dire en retour avoir accès à une technologie très recherchée, aux investissements, au développement du commerce et des infrastructures. Ceci aura des implications majeures pour la sécurité énergétique mondiale.
Le SCO a mis sur pied une commission de travail comprenant des experts avant la réunion au sommet de juin pour développer une stratégie commune du SCO en Asie, discuter des projets de pipelines, d'exploration pétrolière et d'activités liées. L'Iran se trouve sur la deuxième plus importante réserve de gaz du monde, et la Russie a la plus grande. La Russie est le deuxième plus important producteur de pétrole après l'Arabie Saoudite. Tout ceci, ce ne sont pas de petits mouvements.
L'Inde a désespérément besoin d'un accord avec l'Iran pour son approvisionnement en énergie, mais est aussi sous pression de Washington de ne pas le faire.
L'année dernière, l'administration Bush a essayé d'obtenir le « statut d'observateur » au SCO mais sa demande a été repoussée. Ceci, avec les demandes du SCO que Washington réduisent sa présence militaire en Asie Centrale, la coopération plus profonde entre la Russie et la Chine, et les déboires de la diplomatie américaine en Asie Centrale – ont accéléré une réévaluation de la politique de Washington.
Apres son tour en Asie centrale en octobre 2005, Rice a annoncé une réorganisation du bureau de l'Asie du sud du département d'état, pour inclure les états d'Asie centrale, et un nouveau plan américain d' « Asie centrale élargie ».
Washington essaie d'éloigner les états d'Asie centrale de la Russie et de la Chine. Le gouvernement du président Hamid Karzai à Kabul n'a pas répondu aux ouvertures faites par le SCO. Etant donné ses liens avec Washington, il a peu de choix.
Gennady Yefstafiyev, un ancien général des services secrets russes a dit : « les objectifs à long terme américains en Iran sont évidents : de provoquer la chute du régime actuel, d'établir son contrôle sur le pétrole et le gaz, et d'utiliser le territoire iranien comme la route la plus courte pour le transport des hydrocarbures sous contrôle américain des régions d'Asie centrale et de la mer caspienne, en contournant la Russie et la Chine. Ceci sans oublier la signification stratégique et militaire de l'Iran.
Washington a basé sa stratégie sur le fait que le Kazakhstan soit son partenaire clé en Asie centrale. Les Etats-Unis veulent étendre leur contrôle physique sur les réserves en pétrole de ce pays, et concrétiser le transport du pétrole Kazakh via le pipeline Baku-Ceyhan, de même que se créer un rôle dominant dans la sécurité de la mer Caspienne. . Mais le Kazakhstan ne joue pas le jeu. Le président Nursultan Nazarbayev s'est rendu à Moscou le 3 avril pour réaffirmer sa dépendance continue aux pipelines russes. De même, la Chine passe des accords importants en matière d'énergie et de pipeline avec le Kazakhstan.
Pour rendre pire les problèmes géopolitiques de Washington, bien que s'étant assuré d'un accord militaire d'utilisation d'une base en Uzbekistan après septembre 2001, les relations de Washington avec l'Uzbekistan sont désastreuses. Les efforts de Washington pour isoler le président Islam Karimov, en utilisant les mêmes tactiques de la « révolution orange » ukrainienne, ne fonctionnent pas. Le premier ministre indou Manmohan Singh s'est rendu à Tashkent le mois dernier.
De même, le Tajikistan dépend étroitement du soutien de la Russie. Au Kirghizstan, malgré des tentatives clandestines de créer des dissensions au sein du régime, l'alliance du président Kurmanbek avec le premier ministre Félix Kulov qui a le soutien de Moscou, tient.
En l'espace de 12 mois, la Russie et la Chine ont réussi à bouger leurs pièces sur l'échiquier géopolitique d'Eurasie de telle sorte que ce qui était au départ un avantage géostratégique en faveur de Washington devienne l'opposé, avec des Etats-Unis de plus en plus isolés.
C'est potentiellement la plus grande défaite stratégique de projection de la puissance des Etats-Unis de la période post seconde guerre mondiale. C'est aussi la toile de fond de la ré-émergence de cette soi disante faction réaliste dans la politique US.
F. William Engdahl
Article paru le 9 mai 2006 sous le titre « The US's géopolitical nightmare « sur la site Asia times on line www.atimes.com. Copyright Asia Times traduction bénévole pour information à caractère non commercial par MD pour Planète Non Violence.
F.William Engdahl est auteur de « A Century of War: Anglo-American Oil Politics and the New World Order, Pluto Press Ltd.
Pour le contacter : www.engdahl.oilgeopolitics.net.
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