Encore un autre scandale explose sur Internet. L’administration de l’encyclopédie libre Wikipedia a retiré l’article d’un chercheur russe qui s’est livré à l’évaluation du nombre de citoyens Étasuniens disparus à la suite de la Grande Dépression de 1932-1933. Les blogueurs outrés ont commencé à diffuser massivement des articles dans la partie russe du service de rédaction de blogs populaires de Livejournal. Le texte a déclenché des débats houleux, pendant que l’ainsi nommée mobilisation éclair historique se poursuit.
Le chercheur russe Boris Borisov a abordé un sujet extrêmement brûlant avec son texte sur l’évaluation du nombre de victimes de la Grande Dépression étasunienne, qui a apparemment provoqué une réaction très vive des modérateurs de Wikipedia ainsi qu’une activité accrue des blogueurs russophones. Dans son article intitulé « L’Holodomor américain », se basant sur l’analyse des données statistiques, Borisov a évalué le nombre de victimes de la crise financière aux USA à plus de 7 millions. C’est le premier chercheur qui a comparé directement l’incident des USA en 1932-1933 à l’Holodomor de 1932-1933 en URSS.
« D’après la dynamique de la croissance de la population, si les statistiques étasuniennes sont justes, en dix ans, de 1931 à 1940, les USA ont perdu pas moins de 8.553.000 habitants ; par ailleurs, au tournant 1930-1931, les statistiques de la population ont doublé par rapport à l’année précédente, puis sont tombées et se sont figées à ce niveau pendant exactement dix ans … On ne trouve aucune explication dans les centaines de pages de l’énorme «Statistical Abstract of the United States» tenu par le Département du commerce US, » dit B. Borisov. « Peu de gens savent … exactement à la même époque, environ cinq millions d’agriculteurs étasuniens (près d’un million de familles) ont été chassés par les banques à cause des dettes foncières, mais le régime ne les a pas secourus avec de la terre ou du travail ou l’aide sociale ou la retraite – absolument rien », poursuit l’auteur.
Des opinions différentes peuvent naturellement se présenter concernant cela. Il est peu probable qu’on acceptera ces allégations à Washington. Ils présenteront leur propre point de vue, comme toujours confirmé par les « statistiques officielles ». Or, sous les ordres de la Maison Blanche, la version officielle pourrait être débattue pour adapter la situation à ce qui convient à Washington, afin de fournir la version toujours « requise aujourd’hui ».
C’est pourquoi nous n’attendrons pas les informations manipulées de Washington, nous regarderons simplement nous-mêmes et verrons ce qui se passe aujourd’hui aux USA, non pas d’après les exposés officiels contrôlés par la Maison Blanche, mais selon l’actualité étasunienne.
Par exemple, le site d’information AlterNet a publié récemment un nouvel article consacré aux problèmes sociaux et économiques de 22 villes étasuniennes. La Conférence des maires des villes [un organisme indépendant représentant les intérêts des localités de plus de 30 mille habitants] a présenté son nouveau rapport, « Problèmes de la faim et des sans-abri », qui présente des informations sur la vie dans différentes parties des USA pour la période allant du 1er septembre de 2014 au 31 août 2015. Ce rapport souligne en particulier que la pénurie de logements abordables, un problème s’aggravant toujours dans le pays, est la principale raison faisant que des familles étasuniennes avec enfants deviennent sans-abri. Alors s’ensuit la pauvreté, la faim, le chômage et les emplois mal rémunérés.
Dans 50% des villes étudiées, les maires disent s’attendre à une augmentation « modérée » du nombre de sans-abri l’année prochaine. Dans 65% des villes, les autorités prévoient une augmentation « modérée » de la demande d’aide alimentaire d’urgence dans les 12 prochains mois. Selon le Financial Times, un adulte sur cinq vit à présent au bord de la pauvreté et la faim est sa condition quotidienne. Depuis la crise financière mondiale, les rangs des Étasuniens dotés des revenus les plus bas du pays ont été rejoints par 5,7 millions de gens.
Beaucoup de pauvres ou de gens en situation de quasi-pauvreté, le sont devenus malgré « la reprise économique aux USA ». Plus de 45% d’entre eux, soit 2,5 millions d’adultes, sont parmi ceux qui ont les revenus les plus bas depuis 2011, c’est-à-dire après la prétendue fin de la récession. De nos jours, la catégorie des familles aux revenus les plus faibles comprend 48,9 millions d’Étasuniens. Selon le Bureau des statistiques, entre 2009 et 2012 plus d’un tiers du pays a connu une période de pauvreté de deux mois ou plus et, en gros, a souffert de la faim.
Comme le rapportent un certain nombre d’organes de presse, le Congrès devrait être bouffi de honte et de culpabilité devant l’énorme différence de bien-être entre Étasuniens, au moment où la moitié des gens vivent juste au seuil de la pauvreté et de la famine. Après tout, les données publiées par les médias parlent de l’aggravation de la pauvreté aux USA, et la tendance n’a fait que se détériorer dans les 12 derniers mois. C’est pourquoi un certain nombre d’observateurs étasuniens font ressortir qu’étant coupable de l’énorme disparité de richesse entre citoyens – qui font des USA un pays du tiers monde –, le Congrès devrait avoir honte.
La pauvreté et la misère sociale, qui s’intensifient vraiment aux USA après le crash économique de 2008, sont aussi évoquées dans le rapport de The Century Foundation : « Architecture de la ségrégation : Troubles sociaux, concentration de la pauvreté et politique publique ». Ce rapport soutient que le nombre d’Étasuniens vivant dans les franges de pauvreté extrême (plus de 40% de la population en dessous du seuil de pauvreté fédéral) a presque doublé depuis 2000, passant de 7,2 à 13,8 millions. Le degré de pauvreté s’est aggravé avec le krach de Wall Street en octobre 2008, bien que cela soit énergiquement étouffé par la presse officielle, qui préfère parler de la « reprise économique ».
La pauvreté a commencé à se creuser dans quasiment toutes les grandes villes étasuniennes ; elle empire surtout dans les milieux urbains ayant une population de 250 000 à 1 million de gens. Un million et demi de ménages et trois millions d’enfants sont en situation de désespérance économique et de famine. Le nombre d’Étasuniens en état de pauvreté extrême, vivant avec moins de 2 dollars par jour, a doublé depuis 1996. Un livre récent, $2.00 a Day: Living on Almost Nothing in America, écrit par Kathryn J. Edin en collaboration avec Luc H. Schaefer, examine la situation des citoyens confrontés à cette extrême pauvreté. Selon les auteurs, le nombre de gens extrêmement pauvres, qui vivent avec 2 dollars ou moins par jour, ayant doublé depuis 1996, ces gens sont dans une situation économique désespérée et carrément au bord de la famine.
D’après les médias, une personne sur sept aux USA n’a pas les moyens de se nourrir. Wallethub, le site des droits de l’Homme, a analysé les 150 villes les plus peuplées des USA afin d’identifier celles qui ont le plus grand nombre de citoyens dans le besoin ; les critères utilisés étaient du genre : absence de sécurité alimentaire, taux de sans-abri et de pauvreté chez les enfants. Comme l’on pouvait s’y attendre, de nombreuses villes en déconfiture analysées se trouvent dans le Sud des USA, où l’on trouve un taux de pauvreté historiquement grand.
Raw Story compare les quartiers riches et pauvres de New York, qualifiée de ville d’extrême inégalité. Selon l’étude, la pauvreté tue : les New-yorkais pauvres vivent 11 ans de moins que les gros bonnets de Wall Street.
Le blog The Economic Collapse suggère que l’augmentation de la pauvreté aux USA est devenue hors de contrôle.
Comme ça, à la lecture des publications étasuniennes, il apparaît que « le pays le plus riche de la planète » abrite une formidable flopée de gens en souffrance, systématiquement affamés, suspendus entre la vie et la mort. Et la situation empire chaque année.
Avec tout ça, le régime étasunien ne se souvient de l’état critique de son peuple qu’au retour des élections, et tout le reste du temps, il dépense le budget de l’État et l’argent du contribuable pour initier de nouvelles interventions militaires, installer de nouvelles bases militaires dans les États baltes et d’autres pays européens et asiatiques, et pour satisfaire uniquement les appétits du complexe militaro-industriel – qui, de l’avis de la Maison Blanche, n’a pas le droit de crever de faim.
Quant à ses propres citoyens, il y a une théorie (développée avec la participation diligente de la Maison Blanche) des « milliardaires dorés », qui parle des seules personnes qui doivent vivre dans la prospérité sur la planète, tandis que le reste de la population est méprisée par les autorités, le permis de l’affamer ayant été délivré depuis belle lurette. C’est en cela que réside le secret de la « démocratie étasunienne ».
Vladimir Platov, expert sur le Moyen-Orient, en exclusivité pour le magazine en ligne New Eastern Outlook
Original : journal-neo.org/2016/01/05/holodomor-in-the-united-states/
Traduction Petrus Lombar
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