ELWATAN-ALHABIB
jeudi 26 novembre 2015
 
TUNISIE, ENTRE PEUR ET ABANDON





par Yazid Alilat
L'AVION DE CHASSE RUSSE ABATTU EN TURQUIE A FAIT LA UNE HIER DE LA PRESSE INTERNATIONALE, TV AU PREMIER RANG, ALORS QUE LES POLITIQUES SE PERDAIENT EN CONJECTURES SUR CET INCIDENT. L'ATTENTAT TERRORISTE DE TUNIS, LUI, A ETE ZAPPE. RIEN, AUCUN MOUVEMENT DE SOUTIEN, ENCORE MOINS DES DEBATS PASSIONNES SUR LES PLATEAUX TV. JUSTE QUELQUES FLASHS TV RAPIDES.

LA TUNISIE NE SUSCITE PAS DE REACTIONS, NI DE COMPASSION. NE CRISTALLISE PAS NON PLUS LA COLERE, NI A PARIS, NI A BERLIN, NI A LONDRES OU MOSCOU. ET ENCORE MOINS A TEL-AVIV OU WASHINGTON. LA TUNISIE EST UN PETIT PAYS AU NORD DE L'AFRIQUE, DANS LE MAGHREB, PRES DE LA LIBYE, AVEC UNE FRONTIERE AVEC L'ALGERIE. AVEC UN TOUT PETIT PIB, UNE CROISSANCE ECONOMIQUE DE MOINS DE DEUX POINTS ET DES IDE MODESTES APRES LA REVOLUTION DE JASMIN. NON, ELLE N'A PAS LES INGREDIENTS GEOPOLITIQUES POUR QU'ELLE S'ATTIRE LA COMPASSION ET LES PLEURNICHERIES DU MONDE OCCIDENTAL APRES L'ATTENTAT TERRORISTE QUI AVAIT CIBLE MARDI A TUNIS UN BUS DES MEMBRES DE LA GARDE PRESIDENTIELLE. APRES CEUX TERRIBLES DU BARDO ET SOUSSE, 60 MORTS.

LA TERRIBLE EPREUVE DES TUNISIENS, ILS LA SUBIRONT TOUS SEULS. D'AUTANT QUE CETTE FOIS-CI, IL N'Y A EU QUE DES TUNISIENS PARMI LES VICTIMES, PAS D'ANGLAIS, NI DE FRANÇAIS ET D'AUSTRALIENS. ON PEUT FERMER LA PORTE. DE L'AUTRE COTE DE LA MEDITERRANEE, LES FRANÇAIS ET LES BELGES SONT ENTRES EN TRANSE, DANS UNE SORTE DE PARANOÏA ET DE CHASSE AUX TERRORISTES. C'EST TOUT JUSTE SI LES BELGES NE SONT PAS RENTES CHEZ EUX, ET ATTENDRE LA FIN DE LA TEMPETE, ALORS QU'EN FRANCE ET DANS LE RESTE DE L'EUROPE, DES LOIS SONT EN TRAIN D'ETRE CHANGEES, LES PROTOCOLES DE SECURITE MODIFIES ET LES MUSULMANS EPIES.

AVEC LA TUNISIE, AUCUNE SOLIDARITE, AUCUNE OFFRE D'AIDE N'A ETE ENREGISTREE AUPRES DES EUROPEENS APRES CETTE AUTRE AGRESSION TERRORISTE CONTRE UN PAYS AUX FAIBLES MOYENS FINANCIERS, INDUSTRIELS, TECHNOLOGIQUES POUR REAMORCER SA CROISSANCE ECONOMIQUE. C'EST COMME SI DAECH, AQMI OU TOUTE AUTRE ENTITE TERRORISTE S'ACHARNAIENT CONTRE LES TUNISIENS, QUI ETAIENT HIER DES AMIS DES EUROPEENS, QUI LES ONT AUJOURD'HUI ABANDONNES A LEUR TRISTE SORT. FATALITE ? NON, JUSTE LA REALITE CRUE, REELLE, VRAIE DE LA REALPOLITIK DES EUROPEENS QUI MONTRENT AUJOURD'HUI QU'ILS NE SE SONT JAMAIS SOUCIES DE LA SECURITE ET ENCORE MOINS DE L'AVENIR DE CEUX QU'ILS APPELAIENT A ALLER GUERROYER EN SYRIE, EN IRAK, AU NOM DE LA DEMOCRATIE, DU PRIMAT DE LA LIBERTE SUR LA TYRANNIE.

MAINTENANT QUE LE LEVIATHAN, PEU IMPORTE SON NOM, DAECH, AQMI, A ETE REVEILLE PAR L'INCONSCIENCE ET LA LEGERETE DES HOMMES POLITIQUES OCCIDENTAUX, ILS SE DEBINENT TOUS, ABANDONNENT LEURS ANCIENS ALLIES ET SE CALFEUTRENT CHEZ EUX. CAR L'ATTENTAT DE L'AVENUE MOHAMED V DE TUNIS A DEMONTRE FORT OPPORTUNEMENT QUE LES EUROPEENS ONT TOUJOURS ABORDE LA MENACE TERRORISTE SOUS LE PRISME DE LEUR PROPRE SECURITE. QUI AIDERA LES TUNISIENS A SE RELEVER ? 
 
lundi 23 novembre 2015
 

Les fondements du terrorisme international - Il faut Soigner les causes






Chems Eddine Chitour
Lundi 23 Novembre 2015


Les fondements du terrorisme international 
Il faut Soigner les causes 
  

«Une vie ne vaut rien, mais rien ne vaut une vie.» 
  
André Malraux 
  
 Dans la nuit du 13 au 14 novembre, Paris a connu plusieurs attentats terroristes aveugles qui ont fauché des dizaines de vies et blessé plus de trois cent personnes. Au-delà de l'horreur à laquelle la conscience humaine ne peut s'habituer  - en Algérie nous avons connu cela pendant la décennie noire-  iI y a lieu de s'interroger pourquoi ces meurtres de masse? Pourquoi des jeunes? Pourquoi plus généralement des dizaines de jeunes de par le monde sont fauchés? Rappelons qu'en l'espace d'à peine un mois, le deuil, la souffrance et les larmes ont touché la Turquie, le Liban, la Russie et maintenant la France. Un coupable: Daesh. 
  
Les causes invoquées 
  
     La mort de personnes innocentes  qui ne  sont pas partie prenante du conflit, est  inexcusable quelques soient le lieu ou elles tombent dans les pays riches où la vie semble ne pas avoir la même valeur que dans les pays pauvres misérables minées par les geurres et le desespoir. Pourtant le deuil est le même, la souffrance est indélébile et il n’y a pas de mercuriale dans l’échelle de la douleur et il n’ya pas lieu de faire dans la concurrence victimaire. Toutes les morts se valent il n’y  a pas, -malgré des tapages indécents ad nauseam, plus faits pour attiser les haines et amalgamer les non dits- des morts qui valent plus que d’autres . Rien ne vaut une  vie aurait dit Malraux.   
  
Il  faut, cependant,  remonter aux causes pour tenter de comprendre  ce qui a amené des jeunes ces extrémités pour faire le sacrifice suprême. On invoque l’instinct de mort du à l’endoctrinement. C’est d’ailleurs une analogie que l’on fait  en parlant de kamikazes ces jeunes pilotes japonais qui vont jusqu’au sacrifice   pour la défense de leur  pays. Mais est ce suffisant ? On peut aussi invoquer le fait que les donneurs d’ordre ne sont pas en première ligne et se contentent d’envoyer à la mort des jeunes  endoctrinés au nom d’une certaine idée de la religion  musulmane. Mais ce n’est pas suffisant , le terreau dans lequel les marchands de mort par procuration prospèrent  est là où il y a malvie. Là où les jeunes sentent qu’il y a un plafond de verre au dessus de leur tête , invisible mais qui obère toute possibilité pour ces jeunes de s’épanouir  de  participer à la vie de la société de prétendre à des miettes de bonheur .La crise est certainement passée par là et  une fois de plus ce sont les allogènes qui servent de variables d’ajustement  
  
Pour l’éditorialiste du  journal Le Monde diplomatique: «Les auteurs de ces attentats, souvent des jeunes Français musulmans, ont motivé leur acte en invoquant l'intervention militaire de leur pays en Syrie contre l'Organisation de l'Etat islamique (OEI). Et, dorénavant, le gouvernement français comme l'opposition de droite s'accordent sur la nécessité de multiplier les «frappes» en Syrie. L'urgence de mener sur le front intérieur une «guerre» implacable ne les distingue pas davantage.(...) La politique étrangère française, dont le crédit a été largement atteint par une succession d'hypocrisies et de maladresses, paraît à présent se rallier à l'idée d'une alliance aussi large que possible. Tous (Sarkozy et les autres) exigeaient il y a encore quelques mois, ou quelques semaines, le départ préalable du président syrien Bachar Al-Assad; tous y ont dorénavant renoncé. (...) Faudra-t-il alors imaginer une nouvelle intervention pour séparer (ou pour détruire) certains des ex-coalisés? L'autre question fondamentale tient à la légitimité et à l'efficacité des interventions militaires occidentales par rapport même aux buts qu'elles s'assignent. (...) Au demeurant, à moins d'imaginer que l'objectif que visent à présent les Etats-Unis, la France, le Royaume-Uni, etc., soit simplement de s'assurer que le Proche-Orient et les monarchies obscurantistes du Golfe demeureront un marché dynamique pour leurs industries de l'armement, comment ne pas avoir à l'esprit le bilan proprement calamiteux des dernières expéditions militaires auxquelles Washington, Paris, Londres, etc. ont participé, ou que ces capitales ont appuyées?» (1) 
  
Les racines du terrorisme viennent de la destruction des Etats 
  
«Entre 1980 et 1988, lit on, toujours  sur l’éditorial du Monde Diplomatique,  lors de la guerre entre l'Iran et l'Irak, les pays du Golfe et les puissances occidentales ont largement aidé le régime de Saddam Hussein. Quinze ans plus tard, en 2003, une coalition emmenée par les Etats-Unis et le Royaume-Uni (mais sans la France) détruisait l'Irak de Saddam Hussein. Résultat: ce pays, ou ce qu'il en reste, est devenu un allié très proche... de l'Iran. Et plusieurs centaines de milliers de ses habitants ont péri, principalement des suites d'affrontements confessionnels entre sunnites et chiites. Pour que le désastre soit tout à fait complet, l'OEI contrôle une partie du territoire irakien. Même scénario en 2011 quand, outrepassant le mandat d'une résolution de l'Organisation des Nations unies, les Occidentaux ont provoqué la chute de Mouammar Kadhafi. Ils prétendaient ainsi rétablir la démocratie en Libye, comme si ce souci  avait jamais déterminé la conduite de leur politique étrangère dans la région. Aujourd'hui, la Libye n'est plus un pays, mais un territoire où s'affrontent militairement deux gouvernements.(1) 
  
Pour Alain Gresh, les bombardements occidentaux en Irak et en Syrie annoncent une campagne de longue durée contre l'Organisation de l'Etat islamique.: «La rhétorique de l'administration Obama rappelle chaque jour davantage celle du président George W. Bush. dont la politique a mené au désastre actuel. Qu'on ne s'y trompe pas. C'est à une relance de la «guerre contre le terrorisme» que l'on assiste au Proche-Orient, dans la droite ligne de la croisade déclenchée par George Bush au lendemain des attentats du 11 septembre 2001.» (2) 
On oublie trop souvent que Daesh s'était fait signaler rien que pour le dernier mois par quatre attentats sanglants comme a tenu à le rappeler John Kerry à sa sortie de l'Elysée. Dans l'ordre: Ankara - plus de 100 morts- Sinaï, un avion explose; 224 morts; Beyrouth, 41 morts des centaines de blessés et enfin Paris 130 morts. Claude Jacqueline Herdhuin écrit en pointant du doigt la responsabilité non assumée de l'Occident qui s'étonne du retour de manivelle: «Je suis atterrée par ce carnage et révoltée que des innocents et des innocentes aient payé de leur vie ce que nos dirigeants ont délibérément laissé faire. Depuis le 11 septembre 2001, la guerre contre le terrorisme a fait du monde un terrain de combat. Les États-Unis ont su créer un climat de terreur, aux États-Unis d' abord, puis à l'échelle de la planète. Bien sûr, ils allèguent agir au nom de la justice. De la démocratie. Pour le bien de tous les peuples. Pourtant, il a été démontré que le 11 septembre est un coup organisé par le gouvernement américain. (...) Avec la chute du bloc de l'Est, les États-Unis n'avaient plus personne pour les arrêter. Ils pouvaient régner en seigneur et maître. Les attentats d'hier sont le résultat de cette omnipotence (...) Tout le monde parle de la menace d'une troisième guerre mondiale. Mais nous sommes en pleine troisième guerre mondiale. Une guerre qui ébranle toute la planète et qui stigmatise des populations. Dans les années 1930, les méchants étaient les juifs, aujourd'hui, ce sont les musulmans. Nous assistons aux mêmes campagnes de diabolisation. (...) Mon coeur pleure pour les victimes et leurs familles. Il pleure aussi pour les victimes en Syrie, au Liban, au Kenya et partout dans le monde. Je refuse tout amalgame entre réfugiés, musulmans, Arabes et terroristes. J'espère que tous les coupables seront punis, tous.». (3) 
  
Même analyse de Bruno Adrie qui déclare : «Nous allons devoir être très vigilants car, dans ce genre de situation, c'est la démocratie qui va vite se trouver en danger. N'oublions pas qu'en temps de «crise», de salaires en baisse, d'emplois précarisés et de maintien, voire d'augmentation, des bénéfices des détenteurs de la production de richesse, il peut devenir nécessaire, afin de garantir un ordre social injuste, de trouver des raisons pour corseter le mécontentement et bâillonner les voix dissonantes. Ces fusillades et ces explosions, qu'on peut sans hésiter qualifier de terroristes puisqu'elles ne peuvent qu'inspirer de la terreur dans l'esprit du public, risquent d'être rapidement utilisées, quels qu'en soient les commanditaires et les exécutants, contre les libertés et contre la démocratie, au nom, précisément, des libertés et de la démocratie. Le temps est sans doute venu de relire Fahrenheit 451.» (4) 
  
Edwy Plenel fondateur du site Médiapart a fait un exposé remarquable où il a situé les enjeux tout en appelant à ne pas faire d'amalgame: «Vendredi 13 novembre, toute une société fut la cible du terrorisme: notre société, notre France, faite de diversité et de pluralité, de rencontres et de mélanges. Et c'est elle qu'il me faut défendre car elle est notre plus sûre et plus durable protection. (...) Au-delà de la France, de sa politique étrangère ou de ceux qui la gouvernent, leur cible était cet idéal démocratique d'une société de liberté, parce que de droit: droit d'avoir des droits; égalité des droits, sans distinction d'origine, d'apparence, de croyance; droit de faire son chemin dans la vie sans être assigné à sa naissance ou à son appartenance. Une société d'individus, dont le «nous» est tissé d'infinis «moi» en relation les uns avec les autres. Une société de libertés individuelles et de droits collectifs.(...) C'est cette société ouverte que les terroristes veulent fermer. Leur but de guerre est qu'elle se ferme, se replie, se divise, se recroqueville, s'abaisse et s'égare, se perde en somme. C'est notre vivre ensemble qu'ils veulent transformer en guerre intestine, contre nous-mêmes. Quels que soient les contextes, époques ou latitudes, le terrorisme parie toujours sur la peur. (...) Pour mieux le combattre, pour ne pas tomber dans son piège, pour ne jamais lui donner raison, par inconscience ou par aveuglement provoquer par la terreur un chaos encore plus grand dont il espère, en retour, un gain supplémentaire de colère, de ressentiment, d'injustice... Nous le savons, d'expérience vécue, et récente, tant la fuite en avant nord-américaine après les attentats de 2001 est à l'origine du désastre irakien d'où a surgi l'organisation dite État islamique, née des décombres d'un État détruit et des déchirures d'une société violentée. (...) Car, devant ce péril qui nous concerne tous, nous ne pouvons délaisser notre avenir et notre sécurité à ceux qui nous gouvernent. S'il leur revient de nous protéger, nous ne devons pas accepter qu'ils le fassent contre nous, malgré nous, sans nous.(5) 

La politique étrangère de la France Méconnaissable ! 
  
Beaucoup d'analyses ont été faites concernant la politique étrangère actuelle de la France qui serait responsable de ces conséquences.  On se plait à la comparer à celle du général  de Gaulle,  faite d’indépendance, de libre arbitre et de pondération voire d’équilibre subtil s’agissant du Moyen Orient 
  
Edwy Plenel s'interroge, ensuite, sur la politique étrangère: «(...) Si l'on nous dénie le droit d'interroger une politique étrangère d'alliance avec des régimes dictatoriaux ou obscurantistes (Égypte, Arabie saoudite), des aventures guerrières sans vision stratégique (notamment au Sahel), des lois sécuritaires dont l'accumulation se révèle inefficace, des discours politiques de courte vue et de faible hauteur (sur l'islam notamment, avec ce refoulé colonial de «l'assimilation»), qui divisent plus qu'ils ne rassemblent, qui alimentent les haines plus qu'ils ne rassurent, qui expriment les peurs d'en haut plus qu'ils ne mobilisent le peuple d'en bas. Faire face au terrorisme, c'est faire société, faire muraille de cela même qu'ils veulent abattre. Défendre notre France, notre France arc-en-ciel, forte de sa diversité et de sa pluralité, cette. France capable de faire cause commune dans le refus des amalgames et des boucs émissaires. (...) En Grande-Bretagne, lors des attentats de 2005, la société s'était spontanément dressée autour du slogan inventé par un jeune internaute: «We're Not Afraid.» Non, nous n'avons pas peur. Sauf de nous-mêmes, si nous y cédions. La société que les tueurs voudraient fermer, nous en défendons l'ouverture, plus que jamais.» (5) 
  
Interviewé par Hassina Mechaï, Pierre Conesa, ancien haut fonctionnaire du ministère de la Défense, analyse les attentats de Paris. «Depuis la présidence de Nicolas Sarkozy déclare-t-il, la France s'est totalement alignée sur la stratégie américaine. Paris a joué le fer de lance d'une espèce de défense européenne dans le monde arabo-musulman. On l'a vu avec l'affaire de la Libye, mais également avec François Hollande et ses déclarations sur la Syrie. Les islamistes de l'EI ont pu penser, que par rapport à Jacques Chirac qui avait refusé d'aller faire la guerre à l'Irak, désormais les néo-conservateurs étaient au pouvoir avec Nicolas Sarkozy et François Hollande. Forcément, cette position a fait remonter la France dans la hiérarchie des ennemis. La seconde raison est une simple question d'accessibilité. La France est un pays d'immigration. On y trouve la plus importante communauté chinoise, juive, arménienne, et musulmane de l'ensemble des pays de l'Union européenne.» (6) 
  
«Dans cette affaire, c'est moins la question de l'Islam que celle du Salafisme qui se pose. J'ai rédigé l'année dernière mon rapport intitulé «Quelle politique de contre-radicalisation en France» dans lequel je notais la fracture entre ces gens qui prétendent parler pour l'ensemble des musulmans et une classe moyenne française de culture musulmane qui a sa place en France, qui y réussit, fournit ses élites, artistes, écrivains, ingénieurs...Cette classe moyenne se trouve confrontée à ces salafistes qui les qualifient de traîtres, d'auxiliaires de police. Cette classe moyenne s'était déjà mobilisée contre ces salafistes. D'ailleurs, au passage, ces derniers assassinent plus de musulmans que de non-musulmans.» (6) 

Les amalgames entretenus par Daesh  et les Extrêmes Droties : Un même combat 
  
«L'El alimente la suspicion en prétendant mobiliser l'ensemble des musulmans, ils créent de fait un amalgame qui va forcément beaucoup plaire aussi à l'extrême droite. 
(...) il y a plus que jamais nécessité de discuter avec les Français musulmans pour éviter de refaire des erreurs. (...) II faut aussi un discours de la dé-victimisation, puisque les salafistes surfent précisément sur cette idée de victimisation des musulmans français (...) Il faut se rappeler qu'il y a une tradition d'interventionnisme des Occidentaux dans les pays du Moyen-Orient. Les musulmans ont pu dès lors considérer qu'il y avait une politique du double standard, les Occidentaux intervenant pour leurs intérêts, mais jamais pour défendre les Palestiniens. Sur un site salafiste, j'ai pu lire par exemple: «1000 morts à Gaza, on ne fait rien, quatre Occidentaux égorgés, on envoie l'Armée. (...) Si on leur suggérait par exemple que l'Arabie saoudite aurait pu intervenir en Irlande du Nord pour séparer les Catholiques des Protestants, ils auraient parlé de folie. Or c'est exactement ce que font les Occidentaux. (...) si on attaque l'EI parce qu'il décapite, coupe des mains, interdit les autres religions, opprime les femmes, pourquoi défendre l'Arabie saoudite, qui fait la même chose?» (6) 
  
Pierre Conesa reconnaît que l'Occident qui, en s'immisçant dans des affaires qui ne le regarde pas, a déclaré la guerre: «(...) C'est nous qui avons déclaré la guerre. Il y avait quand même 15 Saoudiens sur 19 terroristes impliqués dans les attentats du 11 septembre et c'est pourtant l'Iran, l'Irak et la Corée du Nord qui ont été désignés comme «Axe du Mal» (...) Il faut résoudre les situations politiquement. L'Histoire le montre: le terrorisme algérien s'est arrêté avec l'Indépendance par exemple. Il faut entamer un processus politique. Chaque fois qu'on estime qu'il ne faut pas discuter avec les terroristes, on sait qu'à la fin, si on n'a pas les moyens de les exterminer, on sera acculé. Plus on s'enferme dans la logique militaire, plus on aura d'attentats. Il faut engager un processus politique. On ne peut choisir son interlocuteur.(...) Un processus politique, c'est aussi reconnaître que l'adversaire a aussi une légitimité à ce qu'il prétend.» (6) 
  
Dominique de Villepin, ancien ministre des Affaires étrangères, en septembre 2014 sur le plateau. Ce soir ou jamais rappelait les responsabilités d'une politique américaine dans laquelle il n'y a rien à sauver depuis 15 ans, et dénonce un suivisme français contre nature. La guerre n'est pas notre vocation, notre vocation c'est la paix et la diplomatie car nous n'avons aucunement besoin d'ennemis pour exister et nous imposer. L'Elysée, Matignon et le Quai d'Orsay sont occupés par des hommes incapables de penser un monde en dehors de la Pax Americana et la nécessité aujourd'hui de nous en éloigner pour mieux retrouver au plus vite notre indépendance et notre tradition diplomatique de recherche d'équilibre.»(7) 

Les Français de confession musulmane sont avant tout des Français et c'est à la République de les protéger. Leur intimer chaque fois l'ordre de se disculper est porteur de division. Ils se doivent d'être associés pour dénoncer le terrorisme. Les attentats de Paris devraient être un moment de recueillement de tous les Français. Rien ne saurait justifier. Il est important cependant de signaler que le terreau du terrorisme est celui du manque de perspectives de ces jeunes Français en pleine errance. La République intégratrice a le devoir de les récupérer


1.    http://www.monde-diplomatique.fr/carnet/2015-11-16-Paris 
  
2.   http://www.monde-diplomatique.fr/2014/ 10/GRESH/50885 

3.Claude Jacqueline Herdhuin Mondialisation.ca, 15 novembre 2015 

4.Bruno Adrie Mondialisation.ca, 14 novembre 2015 Le blog de Bruno Adrie 

5 . http://www.mediapart.fr/journal/france/141115/la-peur-est-notre-ennemie 

6.Pierre Conesa: «C'est nous qui avons déclaré la guerre» Middle East Eye Novembre 2015 


7. http://www.mondialisation.ca/dominique-de-villepin-a-propos-de-letat-islamique-6-minutes-dinteligence-et-de-lucidite/5489562 
  
Article de référence : http://www.lexpressiondz.com/chroniques/analyses_du_professeur_ chitour/229852-il-faut-soigner-les-causes.html 
  
Professeur Chems Eddine Chitour 
Ecole Polytechnique enp-edu.dz

En savoir plus sur http://www.alterinfo.net/Les-fondements-du-terrorisme-international-Il-faut-Soigner-les-causes_a118906.html#caVmAwE9uBRojLOY.99
 
samedi 21 novembre 2015
 

POURQUOI CERTAINS FRANÇAIS COMPRENNENT MAL L’ISLAM ?








Hollande SarkoNabil de S’BIHA
« L’ignorance mène à la peur, la peur mène à la haine et la haine conduit à la violence. Voilà l’équation. »Averroès
Suite aux derniers attentats qui ont secoué la France, et d’autres pays bien avant, certaines personnes, parfois très connues, osent insulter les musulmans en évoquant, sans vergogne, leur implication dans ces abominables atrocités. Des paroles et des actes qui véhiculent la haine et le mépris des musulmans, qu’on désigne comme responsables, voire même comme une  « cinquième colonne » !
Avant toute chose, je souhaite mettre au clair certains points. Il s’agit, en fait, de dire haut et fort que ces criminels barbares, qui tuent des personnes se trouvant sur leurs routes en évoquant Allah et son Prophète Mohamed, n’ont rien avoir avec les musulmans et se trouvent à des années lumières des préceptes de l’islam. On peut même oser dire qu’ils vivent comme les Koraïchites d’avant l’islam. Donc, il ne faut pas dire qu’ils sont des musulmans, car ils ont cessé d’être des Hommes avant même d’être des apostats.
Il faut savoir que le Coran est catégorique sur cette question : « C’est pourquoi Nous avons prescrit pour les Enfants d’Israël que quiconque tuerait une personne non coupable d’un meurtre ou d’une corruption sur la terre, c’est comme s’il avait tué tous les hommes. Et quiconque lui fait don de la vie, c’est comme s’il faisait don de la vie à tous les hommes… » (Sourate 5, V. 32). L’Homme est sacré pour Dieu. Le tuer sans une véritable cause est un énorme sacrilège : « … et ne tuent pas la vie que Dieu a rendu sacrée, sauf à bon droit » (Sourate 25, V. 68).
Nul ne peut nier le fait que le Prophète avait aussi éclairé davantage notre compréhension en matière du meurtre. Al-Boukhari rapporte d’après Abou Hourayra que le Prophète a dit : « La première chose pour laquelle on jugera entre les gens le Jour de la Résurrection, c’est assurément les affaires liées à l’effusion du sang ». Ces barbares de Daech tuent en premier lieu les musulmans, sunnites comme chiites, alors que le Prophète a dit : « Tout musulman est sacré pour le musulman : sa vie, ses biens et son honneur », (rapporté par Mouslim). C’est pour vous dire à quel point est délirante leur compréhension de l’islam.
Cela étant dit, je vais essayer d’analyser, à travers cette humble contribution, un sujet compliqué. Je ne prétends aucunement que je vais le faire d’une manière exhaustive. Je vais centrer mon analyse sur trois causes: l’école, les mass-médias et la propagande antimusulmans.
– Le rôle de l’école dans l’ignorance
Certaines Français font un lien entre terrorisme et islam à cause, entre autres, de leur ignorance de l’islam comme religion et de l’Islam comme civilisation. Il suffit juste de regarder ce qui se dit sur les réseaux sociaux pour se rendre compte. L’ignorance, étant une source de la peur, ne doit jamais être négligée quand on traite cette question de l’islam en Occident.
L’une des causes qui ont amplifié cette ignorance est l’agissement de l’école française. Je dis agissement parce qu’on n’a pas considéré utile de revoir cette politique de laïcisation tous azimuts de l’école. Cette dernière n’assure plus le minimum de connaissances requises en la matière, car elle n’enseigne plus le fait religieux ou, du moins, l’étude comparative des religions.
Contrairement aux autres pays européens, la France considère l’enseignement du fait religieux comme une atteinte à la « sacro-sainte » laïcité. Cependant, comme le montre une enquête de 2008 sur ce sujet, les jeunes Français sont favorables, car, d’après eux, ces connaissances leur sont utiles dans le cadre du vivre-ensemble [1]. Je rappelle, chemin faisant, que la deuxième religion en France est l’islam. Avec 7 millions de musulmans, le poids de la communauté musulmane n’est pas négligeable dans la société française [2].
Le Pr Mohamed Arkoun, entre autres, avait toujours regretté le fait que l’école n’aborde pas le fait religieux. Selon cet historien, l’absence de ce genre de cours à l’école est une « catastrophe » pour l’ensemble de la société française. Ce manque de connaissances en la matière empêche tout dialogue constructif et intelligent. Chose que je partage, bien évidemment, avec lui.
A cause de cette erreur monumentale (voulue peut-être par certaines personnes ?!), on voit même des universitaires français qui racontent de sordides histoires, des analyses débiles ! Mais, tout en les blâmant, je comprends aussi leurs situations. Car on remarque aisément leur faible connaissance de la chose (l’islam et/ou l’Islam) qu’ils abordent sous l’allure de « spécialistes » ! Des imposteurs ! Donc, à défaut de connaissances précises dans le fait religieux, c’est juste un charlatan qui parle.
Par ailleurs, je ne peux blâmer les simples citoyens Français. Avec la crise économique actuelle, ces derniers ont du mal à joindre les deux bouts. Donc, ils ont d’autres chats à fouetter que d’y aller chercher la « vérité » sur un sujet qui ne les concerne pas de près. C’est une mauvaise attitude de leur part, bien évidemment, qui est liée plutôt à cette arrogance que prône l’eurocentrisme.
Je tiens, quand-même, à rappeler qu’il y a aussi des français qui ont bien compris le message de l’islam et ne jettent pas le bébé avec l’eau de bain. Vous avez peut-être vu cette dame sur BFM tv. Elle soutient les musulmans de France, tout en soulignant la rigueur de la lutte contre le terrorisme. Il y a aussi des politiques qui ne ratent pas l’occasion pour rappeler aux Français que l’islam n’est pas ce que font ces assassins de Daech.
A cet effet, combattre les idées reçues est un travail de longues haleines, qu’il faut mener avec beaucoup de patience et de courage. C’est la tâche qui incombe notamment aux intellectuels français. Tout en excluant les faussaires parmi eux, qu’on peut facilement repérer à l’aide de Pascal Boniface. Les musulmans doivent y participer pour mener à bien cette mission.
– Les méfaits des mass-médias
En fait, après une longue journée de travail, ce que désirent un simple citoyen français (musulman ou non) est le divertissement illimité, afin d’oublier sa fatigante journée. A cet effet, réfléchir devient une activité si épuisante que personne n’ose s’y aventurer.  Mais son erreur centrale est la suivante: en se délivrant à sa télévision, et en étant un acteur passif devant celle-ci, il devient un sujet facilement manipulable.
En effet, devant une chaîne tv qui organise des débats sur ces questions, le spectateur, étant confiant de l’expertise apportée, est souvent acquis aux thèses défendues par les différents protagonistes sur le plateau. Au final, il y a peu de chance qu’il se demande si toutes les thèses possibles étaient traitées. Au final, comme disait Malcolm X, « Si vous n’êtes pas vigilants, les médias arriveront à vous faire détester les gens opprimés et aimer ceux qui les oppriment. »
A ce propos, je vais vous raconter une petite anecdote. Après l’attaque contre Charlie Hebdo du 7 janvier, un collègue Français m’a dit  que « le Coran avait été rassemblé pour la première fois en 1926 ». Le gars était sûr de lui et ne pouvait concevoir autre chose. Mais, je me suis rendu compte qu’il avait vu un documentaire qu’il a mal interprété. C’est pour vous dire à quel point certains Français ignorent la religion musulmane, mais jouent les experts.
Pour des questions de rentabilité, les mass-médias préfèrent des personnes qui ont, certes, le talent d’excellents orateurs, sans jamais maîtriser le sujet. Les médias font du commerce avec cette question de l’islam et le plus important pour eux c’est de faire le « buzz ». Il faut savoir qu’un professeur des universités aura du mal à expliquer sérieusement ce sujet en si peu de temps devant un journaliste, souvent imbécile et inculte mais arrogant, qui n’essaie que de lui couper la parole. C’est une des raisons qui a poussé de nombreux universitaires de notoriété mondiale à boycotter les mass-médias.
Lors de ces récents événements, vous avez tous remarqué que les mass-médias français ont beaucoup appris des méthodes américaines et font uniquement de la surenchère, effleurant même la fiction.
En France, Eric Zemmour est le préféré des médias quand il faut critiquer l’islam. Il sait vendre sa marchandise au public. Ce journaliste, adapte de mensonges, explique, avec deux versets coraniques tirés par-ci et par là, que le Coran est un message de haine et de violence ! Devant lui, pour le contrarier, si le jeu est organisé ainsi, un autre journaliste va lui sortir la phrase du rituel : « mais toutes les religions font appels à la violence… ». La boucle est bouclée. De même pour Onfray ou Finkielkraut. Et la liste est longue. Les néoconservateurs à la française font de l’islam une question centrale. La dette souvraine ne les intéresse pas du tout, alors qu’elle range l’économie française.
Pourquoi agissent-ils ainsi ? Je ne peux sonder leur foi. Il faut savoir qu’ils sont des ignorants arrogants, du moins sur la question de l’islam. Car ils citent, par exemple, un verset coranique dans lequel il y a un appel à la guerre, mais sans citer le contexte et la raison de sa révélation.
Cependant, ils ne sont pas les seuls dans cette sale besogne, parce que les praticiens chevronnés sont surtout les musulmans. A chaque coin de rue, vous pouvez tomber sur un musulman qui peut incérer un verset coranique entre chaque deux phrases, mais sans arriver à vous expliquer son contexte ni la signification admise par la majorité des savants musulmans. Voilà aussi une des erreurs fatales qui nuisent à l’islam et aux musulmans.
On peut remarquer facilement un procédé très malhonnête dans les mass-médias. En effet, ils invitent rarement des spécialistes concernés par la question débattue. Par exemple, sur l’islam on trouve, au mieux, des islamologues (non pas de savants musulmans !) pour débattre avec d’autres invités qui n’ont jamais fait des études religieuses. Parfois, on a affaire à des « philosophes marxistes » pour parler du religieux qui ne les concerne pas du tout ! Ça arrive même qu’on invite des politiciens, de toutes tendances politiques, pour parler de l’islam en France, mais tout en « omettant » d’impliquer des Français musulmans. Sinon, au mieux ils font appel à un soi-disant imam (je pense, entre autres, à Chalghoumi), qui fait de sa vocation un job.
 – La propagande de l’extrême droite
Aux deux causes, école et mass-médias, on peut rajouter une troisième, qui n’est pas, à mon avis, de moindre importance. Il s’agit de la propagande islamophobe des groupuscules d’extrême droite française. Crise économique aidant, ils montrent souvent les musulmans comme les seuls responsables des problèmes sociaux et sociétaux. Caractérisés par leur discours de haine, ces groupes n’ont pas hésité à utiliser la violence contre les musulmans après le 07 janvier 2015[3]. Il ne faut pas oublier qu’ils investissent les réseaux sociaux pour répandre leur discours antimusulmans. Sur leurs sites et blogs, on trouve des écrits qui diffament l’islam et les musulmans.
– Le devoir des musulmans
Néanmoins, une chose est sûre. D’ici quelques mois, ou quelques années, on va assister à la fin de l’histoire de ces criminels, terroristes infâmes qui sèment la terreur et la corruption. Mais, la communauté musulmane en générale et de France en particulier, qui n’a rien à voir avec ces individus  barbares, faut-il encore le rappeler, ne va pas s’en sortir indemne. Daniel BELL disait que « La société étant fragile, un seul acte, une bombe qui explose, peut la réduire en miettes, détruire les rôles de tous les personnages et livrer les hommes à leurs seules impulsions».
Les problèmes quotidiens des musulmans de France « viennent juste de commercer » et ces attentats seront, malheureusement, instrumentalisées pour stigmatiser davantage tous les musulmans, quelles que soient leurs opinions et leurs visions de l’islam. Elles seront préparées à toutes les sauces politico-politiciennes, comme le font déjà certains politiques sans scrupules.
Cela dit, les musulmans de France et d’ailleurs doivent faire preuve de calme, de patience et de courage. Ne pas répondre aux provocations, qui risquent d’être le quotidien. Et il ne faut pas hésiter, cependant, à réclamer, sans ambiguïté aucune, que l’islam n’a rien à voir avec ces criminels. Les musulmans doivent également redoubler d’efforts pour expliquer à leurs compatriotes non-musulmans le message authentique de l’islam et barrer la route à des délinquants dégénérées sous l’effet de Captagon et autres drogues[4], qui veulent mettre la Terre à feu et à sang.
Pour en finir, je tiens à dire que c’est aussi aux musulmans d’écrire leur propre Histoire, et ne pas attendre une quelconque aide. Un proverbe africain illustre bien ce propos : « Tant que les lions n’auront pas leurs propres historiens, les histoires de chasse continueront à glorifier le chasseur.» Effectivement, c’est aux musulmans d’éradiquer cette tumeur cancéreuse qui les range d’intérieur. Oui, ces criminels de Daech est une tumeur qui fait plus de mal aux musulmans. Alors finissons-en une fois pour toutes.
Paix aux âmes de toutes les victimes de ces barbares, partout dans le monde !
Nabil de S’BIHA
Notes:
[1]http://www.la-croix.com/Actualite/France/Les-eleves-apprecient-la-religion-a-l-ecole-_NG_-2008-09-26-678156
[2]http://www.lemonde.fr/societe/article/2015/04/05/le-president-du-conseil-francais-du-culte-musulman-veut-doubler-le-nombre-de-mosquees_4609881_3224.html
[3]http://info.yamar.org/2015/10/22/de-janvier-a-septembre-2015-augmentation-de-200-des-actes-anti-musulmans-en-france
[4]http://www.sciencesetavenir.fr/sante/cerveau-et-psy/20151116.OBS9569/qu-est-ce-que-le-captagon-la-drogue-des-djihadistes.html

 
mercredi 18 novembre 2015
 

Farhad Khosrokhavar : « Une Europe du djihadisme menace une Union mal coordonnée »






LE MONDE | Par 

Un combattant de l'Etat islamique, près de Palmyre en Syrie.

Les attentats du 13 novembre soulèvent deux questions fondamentales  : qui les a commandités et qui les a exécutés. Le commanditaire est Daech, ce prétendu Etat islamique qui répand la terreur, massacre musulmans et non-musulmans, détruit monuments historiques légués par plusieurs siècles d’histoire et présente l’amalgame entre un totalitarisme obscurantiste et un islam mythologique, sans assise dans l’histoire de cette religion, même chez les sectes les plus extrémistes qu’a connues la religion d’Allah.

La menace et le danger de cette nouvelle entité ont été constamment sous-estimés avant les attentats meurtriers du 13 novembre. Le constat s’impose : il faut qu’elle soit détruite sur le sol syrien et irakien avant qu’elle ne contamine durablement d’autres parties du monde, de la Libye à l’Afghanistan et à l’Asie centrale.
Al-Qaida n’est qu’un nabot comparé à Daech qui compte de nombreux atouts : assise territoriale, trésor de guerre de quelques milliards de dollars, contribution d’une jeunesse mondiale d’environ 25 000 volontaires et, surtout, une stabilité, une administration et un appareil de propagande qu’Al-Qaida n’a jamais eus.
Jusque-là les Américains, atteints par le syndrome d’insuccès en raison de leurs interventions malheureuses en Afghanistan et en Irak, ont refusé toute mobilisation des troupes au sol, et l’Europe, résignée à sa secondarité structurelle, n’a pas eu de politique unifiée contre cet Etat-truand. Il faudrait dépasser ce sentiment d’impuissance collective et prendre des mesures draconiennes pour l’annihiler sur son territoire.

Une armée de réserve

Mais la seconde question est tout aussi fondamentale : ceux qui ont perpétré les attentats sont des Européens, belges et français. Ils sont originaires des « banlieues » en France et de leur équivalent en Belgique. Ils sont animés d’une haine inextinguible contre cette Europe qui les a vus naître et les a plus ou moins mal éduqués.
Dans un sens pervers, ils sont plus européens que les Européens : ils réalisent l’union européenne des djihadistes là où l’Europe peine à se doter d’une police et d’un service de renseignement unifiés qui puissent, par-delà les frontières de chaque Etat, révéler leur efficacité dans la lutte contre le fléau terroriste.
Il existe en Europe une armée de réserve djihadiste dont les acteurs sont les jeunes déclassés des cités ou des poor inner cities (« quartiers populaires du centre-ville »).
A court terme, on pourra lutter contre cette armée de réserve par des arrestations et des placements en prison, mais, sur le long terme, il faudra la neutraliser par des mesures socio-économiques, faire sortir du ghetto les jeunes et inventer un nouveau mode d’urbanisme et de socialisation. Ces jeunes s’identifient au djihadisme moins pour des raisons religieuses qu’identitaires et sociales, l’islam devenant le symbole de résistance là où aucune autre idéologie ne peut leur apporter un supplément d’âme et la caution du sacré (épuisement des idéologies d’extrême gauche).

La haine de la société

Depuis 2013, les départs pour le djihad en Syrie depuis la France (le nombre le plus élevé de djihadistes en Europe) et la Belgique (la proportion la plus élevée de djihadistes en Europe) forment la trame de fond du malaise européen. Parmi ces volontaires, on trouve des membres de classes moyennes dont le nombre s’est accru avec le temps. Mais le modèle djihadiste dominant, celui des jeunes des banlieues, continue à fonctionner, doté d’un instrument anthropologique redoutable  : la haine de la société, sacralisée sous l’expression fourre-tout du djihad, pervertie et désormais sans contenu religieux stricto sensu, tel un signifiant vide.
Cette haine se décline sous une nouvelle forme : elle englobe l’Europe entière, ne connaît plus de frontière nationale, prenant pour cible tous les Européens (les musulmans inclus) dans cette volonté de punir qui est la revanche des jeunes déclassés, pénétrés du sentiment que la société voudrait les déshumaniser en les confinant dans des ghettos et en leur déniant la dignité du citoyen.
Cette victimisation malsaine fondée sur une part de vérité en termes de racisme et d’islamophobie ne saurait occulter son caractère mythifié et son excès dans un manichéisme qui nie toutes les possibilités qu’offre une démocratie à ses citoyens, ne serait-ce que par l’instrument du vote.
Le djihadisme a eu deux inventions à portée extraordinaire et qu’incarnent littéralement ces jeunes : le néomartyre, cette mort sacrée dans le délire de la subjectivation, et la néo-umma, une communauté effervescente qui n’a jamais historiquement existé et que les jeunes désarçonnés de l’Europe cherchent à réaliser comme remède à leur malaise identitaire.

Revanche contre l’Occident maléfique

L’enthousiasme à mourir et à donner la mort en déshumanisant totalement ceux contre qui leur haine se déchaîne est une trouvaille qui date de la révolution iranienne de 1979 et qui s’est répandue dans le monde sunnite, se nourrissant des humiliations et de la volonté de revanche contre l’Occident maléfique. L’extraordinaire est que cet amour mortifère se double de l’enthousiasme de cette néo-umma, macabre et jubilante à la fois, qui devient l’abcès de fixation du malaise des jeunes. Ce sont des jeunes qui ont tué le 13 novembre d’autres jeunes (en majorité) et qui se croient dotés de la légitimité divine.
La France combine plusieurs facteurs qui aggravent son cas aux yeux des djihadistes : elle est identifiée comme la « terre du stupre » par les fanatiques, la terre de l’idéologie antireligieuse par nombre de radicalisés et la terre de l’ambition politique (l’Allemagne sans politique active au Moyen-Orient est laissée tranquille pour le moment). Elle héberge aussi la communauté musulmane la plus nombreuse en Europe, dont l’écrasante majorité n’a rien à voir avec l’extrémisme.

Reste les services de renseignement et de sécurité ainsi que la police. Dans chaque pays, ils sont armés pour lutter contre quelques centaines, mais pas quelques milliers de terroristes qui peuvent circuler librement en raison de la suppression des frontières. Ils sont débordés et submergés par l’extension du nouveau terrorisme. Il serait temps que l’Europe se dote d’un instrument puissant et unifié, le noyau d’un système fédéral de la lutte contre le terrorisme si on veut sauver la vie des futurs citoyens européens.F

Farhad Khosrokhavar est notamment l’auteur de Radicalisation (Maison des sciences de l’homme, 2014).

 
"Si vous n’y prenez pas garde, les journaux finiront par vous faire haïr les opprimés et adorer les oppresseurs." Malcom X

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