Quand les médias vous jugent
par Moncef Wafi
Fallait-il d'une preuve supplémentaire pour savoir que le traitement
réservé aux Arabes et aux musulmans est différent des autres ethnies et
religions de ce monde ? Le triple meurtre de jeunes musulmans américains
d'origine moyen-orientale en Caroline du Nord est la parfaite illustration de
cette ambiguïté cultivée par les Occidentaux en direction de tout ce qui touche
l'Arabe en général et l'Islam en particulier. Ce déchaînement de violence, qui
a endeuillé deux familles pourtant bien intégrées, selon les canons américains,
est presque passé inaperçu, relégué au stade de banale dispute de voisinage
dans les rapports de la police locale. Une version reprise par les chaînes
câblées américaines qui n'en demandaient pas tant et qui ont porté à bout de
bras ce scénario.
Le plus important pour les médias occidentaux est de ne pas
donner cette couleur politique et ce cachet haineux et racial à un drame
pourtant bien réel. Le massacre de Chapel Hill aurait pu, pourtant, passer sous
silence médiatique n'était-ce la mobilisation des réseaux sociaux qui ont
suppléé le silence intrigant, pour ne pas dire complice, des médias nationaux
américains qui n'ont divulgué les détails de la tuerie qu'au compte-gouttes
dans les heures suivant le drame. Des milliers de tweets avaient été postés
alors que les analyses sur le silence médiatique quant aux intentions du tueur
se multipliaient. Le monde musulman a, de son côté, condamné cette «attaque
terroriste». De la Bande de Ghaza à Al Azhar en passant par Erdogan, le profil
des victimes est avancé pour dénoncer l'islamophobie et expliquer ce silence
radio et l'absence de réactions officielles de la part des gouvernements
occidentaux toujours prompts à réagir et à condamner lorsque l'agresseur est
arabe ou musulman et les derniers événements l'illustrent parfaitement.
La presse occidentale ne respecte même plus les mesures
d'usage professionnelles et ne prend pas le temps d'analyser les faits qu'elle
estampille promptement «acte terroriste» toute agression commise par un basané
musulman même s'il sort de l'asile de fous le plus proche. Si le traitement
médiatique est subordonné à un lobby juif qui ne s'est jamais démenti, le
silence inquiétant des grands de ce monde est à craindre davantage. En effet,
le président Obama ne s'est prononcé que vendredi sur cette affaire, soit trois
jours après l'attaque, lui qui d'habitude est si preste à condamner quand il
s'agit de Blancs chrétiens ou de juifs. Il a qualifié le triple meurtre de
«brutal et atroce», le condamnant et affirmant, dans un communiqué de la Maison
Blanche qu' «aux Etats-Unis, personne ne devrait jamais être pris pour cible en
raison de ce qu'il est, de son apparence ou de sa croyance».
Une réaction rendue obligatoire après les critiques du
président turc qui avait dénoncé, 24 heures plus tôt, le silence d'Obama à
propos de ce triple meurtre. Alors que vous soyez arabo-musulman avec la tête
explosée ou tenant un coupe-ongles en plein délire paranoïaque, attendez-vous à
des unes aussi différentes qu'affligeantes témoignant de la déchéance de la
presse occidentale.
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