À votre avis, les États-Unis ont-ils créé l’EIIL !?
14 août 2014
Par Mouna Alno-Nakhal
Une fois n’est pas coutume. Faute de
disposer du document original en anglais, nous vous livrons la
traduction d’un texte dont il vous faudra vérifier la véracité par
vous-mêmes. Il s’agit d’extraits « contestés » du dernier livre de Mme
Hillary Clinton « Le temps des décisions ». La polémique suscitée
dernièrement par les médias sociaux autour de ce livre, paru depuis deux mois, mérite discussion au-delà de ce que Mme Clinton aurait affirmé ou réfuté.
Les extraits en question ont été
publiés, en langue arabe, sur le site de la chaîne irakienne Al-Forat,
puis sur de nombreux autres sites tels Top News nasser Kandil, Syria
Now, Al-Nahar, et d’autres… avec quelques variantes.
Le 5 août, le Général Michel Aoun dans
un point presse faisant suite à la réunion hebdomadaire du Bloc
parlementaire dit : « Nous essayons d’éviter les répercussions des
évènements qui se déroulent dans les Pays du Levant pour les éloigner du
Liban, mais ils se trouve que certains les importent et refusent de les
régler. Sur les recommandations de qui ? Qu’ils lisent donc ce QUI A
ÉTÉ ATTRIBUÉ à Hillary Clinton pour réaliser ce qui se passe au niveau
de l’État et construire leur choix ».
Quoi qu’il en soit, si les rêves de Mme
Clinton se sont « brisés » sur le rocher syrien, nous ne comptons plus
les vies que son administration a fracassées aux sens propre et figuré.
Abstraction faite de ce qu’elle pense de l’Irak qui aurait été laissé
par les américains en « possibilité » de se sortir de leur sale guerre,
ou de la Syrie qui ne leur aurait échappé que parce qu’elle est soutenue
par le Hezbollah et la Russie sans tous les sacrifices consentis par
son peuple
et son Armée depuis bientôt trois ans et demi, vous l’entendrez dire
dans un récent entretien sur France-Info qui l’a invitée pour la
promotion de son livre [1] : «Il s’agit de réactiver le
rêve américain, de conserver notre leadership dans le monde et de gérer
ces problèmes internationaux… J’espère que j’ai fait ce qui est
nécessaire pour restaurer la place de l’Amérique et son leadership… Ni
l’Europe, ni les États-Unis ne se sont complètement remis de la crise
économique de 2007/2008. Ça doit-être la priorité de tous les dirigeants
politiques. Les Américains ne s’intéressent pas beaucoup à ce qui se
passe ailleurs. Mais je crois que c’est à notre péril que l’on ignore le
reste du monde. Et donc, le monde compte pour l’Amérique, l’Amérique
compte pour le monde !
« Rêve », « leadership », « gestion des
problèmes internationaux »… des mots clés ! Le rêve des uns imposant les
pires des cauchemars à d’autres, le leadership des uns signifiant le
chaos pour d’autres, et la gestion des problèmes par les uns étant
l’astuce odieuse toujours mise en avant pour créer des problèmes
ingérables à d’autres.
Le tout emballé d’une apparente
franchise plutôt efficace. Madame Clinton n’a-t-elle pas avoué au monde
« nous avons créé Al-Qaïda » [2] pour avoir la peau de l’Union soviétique ?
Est-ce que cela a nui aux relations des USA avec la vieille Europe ?
Bien au contraire, l’Union européenne et notamment la France lui ont
offert leur entière complicité pour monter d’un cran dans la fabrication
d’un nouveau Frankenstein à usages multiples.
Voici la traduction des extraits ayant envahi les médias sociaux arabes :
« L’ex Secrétaire d’État Hillary Clinton
a fait exploser une nouvelle bombe de gros calibre dans son dernier
ouvrage paru aux États-Unis et intitulé « Le temps des décisions »,
avouant la coordination entre Washington et les « Frères Musulmans »
afin d’établir un « État islamique » dans le Sinaï [3].
[Certains vont même jusqu’à affirmer qu’elle aurait voulu dire que les
États-Unis auraient créé « l’État Islamique en Irak et en Syrie » (EIIL,
ISIS, ou Daech en arabe)]. Voici quelques extraits choisis de ce
qu’elle [aurait] signifié :
- Nous sommes intervenus dans la guerre en Irak, en Libye et en Syrie,
et tout allait pour le mieux, mais voilà qu’en Égypte éclate subitement
la révolution du 30 juin [2013] et que tout change en l’espace de 72
Heures.
- Nous nous étions mis d’accord avec les « Frères d’Égypte » pour
déclarer l’« État islamique » en donnant une partie du Sinaï au
« Hamas », une autre partie à « Israël » pour sa propre protection, avec
intégration de Halayib et de Chalatine au Soudan et ouverture des
frontières sur la Libye du côté de Salloum.
- Nous avions convenu que la création de l’« État islamique » serait
déclarée le 5 juillet 2013 et nous attendions que la chose soit faite
pour qu’immédiatement les États-Unis et l’Union européenne le
reconnaissent.
- J’avais visité 112 pays afin d’expliquer ce qu’il en était des
relations des États-Unis avec l’Égypte, ensuite de quoi nous avions
convenu avec quelques pays amis qu’ils reconnaîtront l’« État
islamique » dès qu’il se déclarera… Mais, tout à coup, tout s’est
brisé !
- Tout s’est brisé devant nos yeux. Quelque chose de terrifiant est
arrivé sans aucun signe préalable. Nous avons envisagé d’utiliser la
force, mais l’armée égyptienne est très forte et le peuple égyptien
n’abandonnerait jamais son armée.
- Quand des éléments de notre flotte se sont dirigés vers les côtes
d’Alexandrie, ils étaient chaperonnés par un escadron de sous-marins
« Seawolf 21 » équipés d’armes et de systèmes de surveillance des plus
modernes et des plus performants. Mais le plus surprenant fut que dès
notre approche de la mer Rouge, nous avons été accueillis par un
escadron de vieux MiG-21 de fabrication russe, que nos radars n’avaient
pas signalés ! D’où étaient-ils venus et où sont-ils ensuite allés ?
Nous avons préféré rebrousser chemin. C’est à partir de là que le peuple
égyptien s’est davantage solidarisé avec son armée et que la Chine et
la Russie se sont mises en mouvement refusant cette situation…
- Aujourd’hui, nous ne savons toujours pas comment faire avec l’Égypte
et son armée. Utiliser la Force nous conduirait à l’échec. Laisser
tomber nous ferait subir une perte difficile. L’Égypte est le cœur du
monde arabe et musulman. En le contrôlant à travers les « Frères » par
l’intermédiaire du dit « État islamique » et en le divisant, nous nous
serions dirigés ensuite vers les Pays du Golfe avec pour première étape
le Koweït, fin prêt du fait de la collaboration de « Frères » locaux,
puis vers l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Bahreïn, Oman…
Suite à cela, la région arabe aurait été entièrement « re-divisée », y
compris les autres États arabes dont ceux du Maghreb. Ainsi nous
contrôlions le tout, notamment les ressources pétrolières et les
débouchés maritimes. Et si jamais il y avait des désaccords entre eux,
la situation pouvait changer. [Ce dernier paragraphe est surprenant
et il est difficile de croire, non pas que ce projet US soit vrai, mais
que Mme Clinton l’ait reconnu en ces termes].
Il nous faut quand même signaler que
tous les médias arabes ne sont pas d’accord là-dessus. Ce même 5 août,
le site égyptien « Al-Masr al youm » publiait un article de Mme le Dr.
Manar Al Chourbaji de l’ « American University of Cairo » qui réfute ce
semblant d’aveu de Mme Clinton, en ce qui concerne l’Egypte en tout cas [4] :
« J’ai lu le livre… Il est faux de dire
que Mme Clinton a promis à Morsi la création de l’État du Califat le 30
juin 2013 [comme l’affirment nombre d’éditoriaux égyptiens]… Celui qui a
fabriqué ce texte ne devait pas savoir que Mme Hillary Clinton n’était
pas secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères le 30 Juin et n’avait donc
pas l’autorité de « promettre » à Morsi un État islamique, ni de le
reconnaître, ni quoi que ce soit d’autre. De plus, quelle relation
y-a-t-il entre l’octroi de Halayib et Chalatine au Soudan, l’ouverture
de Salloum sur la Libye, et la déclaration d’un État islamique ; à moins
que le « fabricant » n’ait l’intention d’ouvrir les trois pays les uns
aux autres, par la suite ! Ensuite, les USA reconnaîtraient un État
islamique !? Et ce, aux frontières d’Israël ? Qu’est-il donc arrivé à
l’esprit et à la logique en Egypte ? ».
Nous devons aussi signaler que devant
l’effervescence des médias sociaux, l’Ambassade américaine à Beyrouth
aurait jugé bon de faire savoir que ces allégations affirmant que, dans
ses mémoires, Mme Hillary Clinton aurait admis que les États-Unis ont
créé « L’EIIL » sont fausses [5]. Le démenti a donc été prononcé par l’intermédiaire d’une ambassade américaine à l’étranger, non par un porte parole du gouvernement des États-Unis ou par l’intéressée.
En ce qui nous concerne, nous avons
pensé qu’il s’agissait probablement d’une erreur de traduction entre les
appellations « État islamique des Frères Musulmans » et EIIL, parfois
invariablement utilisés en arabe. Il n’empêche que nous avons ici deux
sources qui affirment que « rien de cela n’est vrai » avec Mme Chourbaji
qui en appelle à la « logique ». Mais est-ce si illogique ? Est-ce si
éloigné de la vérité ?
Faut-il se contenter de ce que Mme Clinton aurait avoué ou nié ?
Que penser de la photo capture,
ci-dessus, issue selon sa légende de CNN et qui montre le Sénateur Mc
Cain ; lequel, selon les mauvaises langues, donnerait ses instructions à
Abou Bakr al-Baghdadi, vénérable chef de l’EIIL devenu EI ? S’agit-il
d’une photo truquée ?
Qui aurait intérêt à faire passer pour fausses des informations vraies ou pas très loin de la vérité, et notamment au Liban ?
Et enfin, Mme Clinton, a-t-elle vraiment avoué ce secret de polichinelle [6] d’une façon ou d’une autre ? Si oui, pourquoi ?
Voici, peut-être, un début de réponse à cette dernière question dans cet article publié le 11 Août [7] par The Rush Limbaugh Show, que nous ne prétendons pas connaître. En voici quelques extraits :
« Aviez-vous entendu parler de L’EIIL il
y a un an? Je me risquerais à dire que la plupart des gens n’en ont
entendu parler pour la première fois que ces deux derniers mois. Donc, Obama avait plusieurs possibilités. En fait, mesdames et messieurs, si Obama
avait voulu bousiller l’EIIL, il ne l’aurait pas soutenu en Syrie !
L’EIIL n’est en fait rien d’autre que les « rebelles » qui, en Syrie,
s’opposent à Bachar al-Assad… Barack Obama,
le Parti démocrate et les médias [volontairement complices] ont besoin
que l’Irak soit toujours considéré comme le misérable échec de Bush, une
guerre de Bush. Tout comme le Vietnam
devait être considéré comme un échec pour Nixon. Maintenant, vous
apprenez sans doute pour la première fois que les rebelles, en Syrie,
sont l’EIIL. Le week-end dernier, il a été dit qu’Hillary Clinton a
sévèrement critiqué Obama
pour n’avoir pas réussi à aider les rebelles syriens et que cet échec a
favorisé l’émergence de l’EIIL […]. Elle ne suggère pas que l’EIIL
était là-bas [en Syrie]. Elle suggère que c’est le fait que nous n’ayons
pas agi contre l’EIIL qui l’a amené à prendre le dessus sur le
mouvement anti-Assad, alors qu’en fait l’EIIL était sur place depuis le
début… L’EIIL agissait, et ils ont fait en sorte que cela apparaisse
comme une action d’Assad, exactement comme ils l’ont fait pour le Hamas…
etc. »
Et c’est aussi ce « qu’a fait » la diplomatie française [8].
Faut-il donc que le peuple syrien soit absolument dans l’erreur pour
que MM Hollande et Fabius puissent continuer à soutenir les terroristes
en Syrie ? Faut-il donc que la Syrie soit considérée comme l’échec
d’Obama, pour que Mme Clinton arrive à la présidence des États-Unis ?
Mouna Alno-Nakhal
12/08/2014
Sources :
Notes :
[1] Hillary Clinton candidate en 2016 ? « C’est un choix difficile »
[2] Hillary Clinton : Nous avons crée Al-Qaïda, Nous avons financé les Moudjahidin
[3] Le Sinaï : Base américaine ? Par Nasser Kandil
[5] Hillary Clinton admits US involvement in creation of ISIL [En fait, pas du tout, d’après l’ambassade américaine à Beyrouth!]
“The US embassy in Beirut has taken to
social media to deny claims that the United States created and condones
the terrorist group of Islamic State of Iraq and the Levant.
Media reports in Lebanon have claimed
that in former US Secretary of State Hillary Clinton’s memoir Hard
Choices, she « admitted in her book that the United States created the
Islamic States and planned on acknowledging its presence. »
Clinton’s book has no reference of any
kind to US involvement in the creation of ISIL or plans to recognize it
as a legitimate organization.
The media reports said that the United
States stalled their plans after the Egyptian revolution and the
condemning of the Muslim Brotherhood.
The US embassy quickly took to Twitter and Facebook to make it unequivocally clear that these allegations are false”.
[6] Arnaque médiatique ? L’Iran et l’Amérique s’unissent pour mener la « Guerre au terrorisme » ? Par Prof Michel Chossudovsky
Extrait :
« Les rebelles de l’EIIL sont formés et financés par l’alliance militaire
occidentale. Les États-Unis et l’OTAN n’ont nullement l’intention de
cibler leurs propres fantassins de l’EIIL, qui mènent une guerre secrète
pour le compte des États-Unis en Syrie et en Irak. Les États-Unis
veulent préserver et protéger ces forces paramilitaires terroristes ».
[7] Huge See, I Told You So: Hillary Admits We Backed ISIS in Syria
[8] Irak, Syrie : Hollande a réuni un conseil restreint de défense
Extrait :
« La Syrie a également été au menu de ce conseil restreint de défense. Et là, l’Elysée a haussé le ton à l’égard du président syrien, Bachar el-Assad, accusé d’entretenir « de
longue date des relations troubles avec les groupes terroristes, qu’il
ne combat pas mais instrumentalise contre l’opposition syrienne » (et qu’il a soutenus lors de l’intervention américaine en Irak… faut-il le rappeler).
« La guerre qu’il (Al-Assad) poursuit contre son propre peuple favorise la constitution
d’une zone ouverte aux terroristes entre la Syrie et l’Irak. La France
souhaite donc que les Amis du peuple syrien renforcent et coordonnent
leur soutien aux forces de l’opposition qui combattent aujourd’hui les
groupes jihadistes. Elle est prête à y contribuer », a ainsi fait savoir le président Hollande ».
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Autres photos retrouvées dans
les archives : Photos prises en Mai 2013, lors d’une visite de McCain à
la frontière syrienne via la Turquie.
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