Des
écrits puants ont accompagné la désignation de la nouvelle ministre de
l'Education et ont fait diversion sur des questions infiniment plus
essentielles. Dans un pays jeune où les administrations et les entreprises se
plaignent d'une baisse de la qualité de la formation des ressources humaines,
c'est un poste stratégique. Plus important que celui de la Défense nationale si
l'on considère que des Algériens bien formés qui innovent et créent constituent
le meilleur des systèmes de défense. On peut même faire le raccourci et dire
que le vrai ministère de la Défense nationale, c'est la qualité de son système
éducatif.
Dans
un pays «normal» et encore plus dans un pays inquiet pour son proche avenir
sans hydrocarbures, l'éducation nationale doit être continuellement en débat. A
plus forte raison quand on constate que les pays développés ou émergents - dont
nous ne faisons pas partie - se basent de plus en plus sur une croissance liée
à ce qu'on appelle l'économie du savoir. En Algérie, on a bien eu la fameuse
commission Benzaghou dont les résultats n'ont pas été soumis à un débat public
et dont personne ne sait quel usage en a été fait. La nouvelle ministre faisait
d'ailleurs partie de cette commission qui a planché en 2000 sur les réformes à
apporter au système éducatif. La manière dont se mènent les débats en Algérie
ne permet même pas de faire un bilan de ce qui a été fait ou pas. Les ministres
de l'Education se contentent de gérer les flux humains et les examens.
De
quoi parle Nouria Benghebrit, la nouvelle ministre de l'Education ? Pas de la
stratégie mais de la «ataba», ce fameux «seuil» des cours à réviser pour le
baccalauréat qui revient régulièrement chaque année. Et comme chaque année, il
fait «débat», les élèves et leurs parents voulant réduire le «seuil» le plus
bas possible Et cela devient, en définitive et de manière caricaturale, le
«seuil» absolu de la mission du ministre de l'Education. Il n'est pas question
de stratégie, de réflexion sur la manière d'être dans «l'économie de la
connaissance» qui est, ce n'est pas une mode, l'avenir même des nations. Le
ministre de l'Education gère donc les flux et les grognes récurrentes des
enseignants sur les conditions de travail ou sur les salaires. Certes, il faut
bien s'occuper du quotidien d'une grosse machine qui concerne globalement près
de dix millions de personnes entre élèves et enseignants. Le problème est que
l'on se contente de faire cela même si le ou la ministre dispose d'une
administration qui fait cette gestion et dispense d'y plonger totalement au
point de ne pas voir plus loin.
Le
système éducatif connaît des difficultés inextricables et des bugs majeurs
alors qu'aucune évaluation n'a été faite de la « réforme» qui lui a été
administrée durant deux décennies, notamment durant le long règne de Benbouzid.
On continue de mettre en avant le nombre important d'élèves inscrits et le
budget de l'éducation nationale. On évite de débattre de la qualité de la
formation des enseignants, des programmes Et encore moins de vision. Mais un
ministre de l'Education dans un gouvernement de «gestionnaires» et non de
politiques peut-il faire autre chose que de rester dans la «ataba», dans ce
fameux seuil qu'il doit surveiller pour que tout reste «calme» ?
Enregistrer un commentaire