Une visite qui n'en finira pas d'entretenir les controverses
par Kharroubi Habib
La visite du secrétaire d'Etat américain à Alger a été
depuis longtemps inscrite dans son agenda diplomatique. Prévue pour se produire
avant que ne démarre la campagne électorale pour la présidentielle, elle a fait
l'objet d'un report à cause de priorités internationales ayant accaparé le
temps du chef de la diplomatie américaine. Cela étant avéré, elle n'aurait pas
dû susciter les remous algéro-algériens qu'elle provoque depuis qu'il a été su
que Kerry viendrait à Alger en pleine campagne électorale.
L'hôtel des autorités algériennes ne pouvait ignorer que le
timing de sa visite prêterait à des exégèses et des exploitations de la part de
parties algériennes en lien avec les enjeux du processus électoral dans le
pays. Ce qui n'a pas manqué de se produire. A commencer par l'explication
officielle algérienne qui a tendu à présenter cette visite comme consacrant que
pour la plus grande puissance du monde, l'Algérie du président candidat est
dans une situation de « normalité » qui n'oblige pas l'administration
américaine à renvoyer à plus tard la visite du secrétaire d'Etat sous prétexte
que se déroule dans le pays une campagne électorale électrique. Explication
bien évidemment récusée catégoriquement par d'autres protagonistes de la vie
politique nationale qui voient dans le timing de cette visite l'expression du
soutien que les Etats-Unis auraient décidé d'apporter à Bouteflika candidat
pour un quatrième mandat âprement contesté par de larges segments de l'opinion
publique et de la classe politique. Pour eux, le fait même que Kerry s'annonce
dans ce contexte en est la démonstration.
Le paradoxe est que ceux qui justement voient dans la visite
de John Kerry une «ingérence» américaine dans un débat et une confrontation
algérienne ne se sont pas pour certains limités à dénoncer ce «fait». Eux qui
en effet s'élèvent contre l'atteinte à la souveraineté nationale que
constituerait le supposé soutien américain que Kerry serait venu apporter au
président candidat, car impliquant de la part de celui-ci d'inévitables
concessions sur cette souveraineté nationale aux intérêts américains dans le
pays et dans la région, interpellent l'hôte de l'Algérie pour lui demander de
s'en abstenir et de cautionner l'opposition au quatrième mandat. Ce qui en
définitive revient à admettre que l'ingérence américaine et étrangère en
générale serait acceptable si elle converge dans le sens voulu par eux. Tout
autant qu'est condamnable l'exploitation que font les autorités de la visite du
secrétaire d'Etat américain, le sont aussi les appels lancés à celui-ci pour
tenter de le convaincre de leur exprimer son soutien.
Ils ne sont pas sans ignorer que la grande puissance que
sont les Etats-Unis n'ont pas d'amis mais des intérêts et qu'elle ne se
positionne à l'égard d'un problème d'un pays tiers qu'en fonction de ce qu'elle
cherche à en obtenir qui garantisse et fructifie ces intérêts. Solliciter son
appui c'est accepter d'entrer dans la logique des concessions, or c'est
justement le grief discréditant qu'ils font à Bouteflika. Ainsi va la politique
dans les pays où les acteurs de celle-ci sont mus non par l'intérêt national et
la défense de la souveraineté du pays, mais par celui du clan et du groupe de
pression auxquels ils appartiennent.
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