Pas de période de grâce pour le président réélu
par Kharroubi Habib
Bouteflika doit certainement savourer sa victoire, mais il
est très probable qu'il va passer à autre chose qu'à se confiner à se complaire
de son succès. Fin politique et habile manœuvrier, il a certainement en tête un
agenda politique qu'il va rapidement commencer à mettre en œuvre car il sait
les Algériens impatients de voir le pays sortir de la parenthèse qu'a été
l'élection présidentielle et en attente des changements auxquels il a promis de
s'atteler en cas où lui serait accordé un quatrième mandat.
Il passera d'autant plus vite à l'action qu'il n'entend pas
laisser ses adversaires occuper le terrain politique qu'ils sont parvenus à
investir durant la période électorale en surfant sur les réticences et
oppositions exprimées par de larges franges de la société algérienne quant à la
perspective d'octroyer un quatrième mandat à un président dont le bilan des
trois précédents est pour le moins controversé et qui plus est se trouve confronté
à un sérieux problème de santé. Il sait que le camp de ses adversaires est
parvenu à s'entendre sur la nécessité de faire front commun pour peser sur
l'après 17 avril dont il redoute qu'il ne donnera lieu à la perduration du
statu quo voulu par le système et qui confinera les acteurs de l'opposition
politique dans la marginalisation et au rôle de faire-valoir de la démocratie
de façade dont il a doté le pays.
Ce que va faire Bouteflika, lui seul le sait. Il est en
tout cas certain que l'on commencera à cerner quelque peu où il veut aller
après sa réélection quand on verra la composante humaine dont il va s'entourer
pour entamer son quatrième mandat. Si à ce niveau il procèdera à un
renouvellement conséquent basé sur les critères de la jeunesse, de la
compétence et de la probité à tous points de vue, l'on peut alors espérer qu'il
aspire à rompre avec un sérail et un entourage acquis au maintien du statu quo
mortifère dont ils sont les bénéficiaires, et qu'il est déterminé à
entreprendre une révision constitutionnelle qui mettra un terme à celui-ci.
Dans son message adressé aux Algériens leur annonçant qu'il
se portait candidat, Bouteflika avait laissé entendre qu'il engagerait une
large consultation avec les forces politiques et sociales sur le contenu de
cette révision et qu'il sera organisé un débat national sur le sujet. Toute la
question est de savoir s'il tiendra cette promesse, ou s'il se contentera de
renouveler le simulacre de consultation qu'aura été la « fameuse » commission
Bensalah.
Dans le premier cas, il pourrait désamorcer la revendication
formulée par un large éventail de la classe politique réclamant une période de
transition qui conduirait au démantèlement du système politique finissant en
faisant la preuve qu'il n'est pas besoin d'une transition pour aller à cet
objectif. Dans l'autre, il renforcera indubitablement les rangs de cette
opposition qui ose désormais réclamer rien moins que le changement du système.
Pacifiquement dans un premier temps, mais qui sera tentée de radicaliser son
combat au constat qu'elle a déjà anticipé que le quatrième mandat est destiné à
casser la synergie qui est à l'œuvre dans l'opposition mais aussi et surtout
dans la société, née du refus dans ces deux milieux de se satisfaire de
réformettes cosmétiques.
Bouteflika n'aura pas droit pour son quatrième mandat à une
quelconque période de grâce. Il va lui falloir immédiatement prendre
l'initiative et entrer dans le vif du sujet à savoir dévoiler les priorités
auxquelles il compte s'attaquer.
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