LE PRINTEMPS DES IMPORTATEURS
par K. Selim
La lecture «victorieuse» des résultats de l'élection
présidentielle par Amar Saadani n'est pas pour surprendre. Tout va bien, les
Algériens ont «bien» voté. Et même mieux qu'en Occident où 51% est un «grand
taux de participation». De la tchatche à en revendre même si les Algériens
savent que la comparaison est très spécieuse. Sur le même mode triomphaliste,
il clame que les Algériens ont empêché l'importation du «printemps arabe». On
trouverait, en vain, ces importateurs de printemps arabe qui a fait fantasmer
le camp présidentiel et les médias «offshore» qui le soutiennent. Mais on aura
compris que cela fait partie du discours, souvent grotesque, qui essaie de
présenter toutes les demandes démocratiques sous l'angle du complot ourdi.
On fabrique ainsi une fausse menace en insistant très
lourdement sur les terribles années 90 pour décréter, après coup, qu'il ne
«s'est rien passé» et que les Algériens n'ont pas entendu les «fauteurs de
troubles». On peut constater qu'au vu du chiffre officiel de participation -
très fortement mis en doute par divers observateurs et acteurs politiques - que
la peur n'a pas fonctionné. Et elle n'a pas poussé les très nombreux Algériens
à aller voter, ni à les dissuader d'adresser au régime un pacifique haussement
d'épaules. Le discours de la peur ne fabrique pas de l'adhésion. Le régime, en
entier, ne peut se prévaloir d'un soutien «fort» des Algériens, qui ne
cherchent pas à « importer» un hypothétique printemps alors qu'ils ont une
proclamation historique appelant à une république démocratique et sociale.
Ceux qui tentent au nom d'un super-patriotisme de
complexer les Algériens qui veulent les libertés, les droits, la reddition de
comptes de la part des gouvernants devraient faire quelques relectures des
documents du mouvement national et de la révolution. Les Algériens n'importent
pas, ils sont totalement dans leur histoire et font partie du monde. Même dans
les périodes de reflux, d'autoritarisme exacerbé et de caporalisation
généralisée des appareils politiques, beaucoup n'ont pas oublié que le combat
d'hier visait aussi bien l'indépendance que la liberté. Et cette liberté,
encore revendiquée, n'est pas une «invention», une «bid3a» et encore moins une
importation.
LA FORMALITE ELECTORALE ACCOMPLIE QUI PERMET A M.
SAADANI DE FAIRE DANS LE TRIOMPHALISME NE SIGNIFIE PAS QU'ILS Y RENONCERONT. LA
DEMANDE DE CITOYENNETE QUI NE FAIT PAS PARTIE DE L'OFFRE DU REGIME RESTERA.
D'AUTANT QUE LES ALGERIENS ONT OBSERVE AU COURS DE CETTE DERNIERE CAMPAGNE -
COMME D'AILLEURS DURANT LES LEGISLATIVES - L'EMERGENCE «POLITIQUE» DES FORCES
DE L'ARGENT ET DANS DES MODALITES, OPAQUES, QUI LES ELOIGNENT ENCORE PLUS DE LA
REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE ET SOCIALE. ET DE FAIT, LE VRAI PRINTEMPS EST CELUI DES
IMPORTATEURS. ILS «IMPORTENT» COMME LEUR NOM L'INDIQUE. MEME LES DECISIONS
ECONOMIQUES, EN APPARENCE MARQUEES DU SCEAU DU PATRIOTISME, LES SERVENT. DE
TRES NOMBREUX EXPERTS ONT NOTE QUE L'APPLICATION GENERALE DU 51/49% ABOUTISSAIT
DANS LES FAITS A DISSUADER L'INVESTISSEMENT EN ALGERIE. CAR ON EMPECHE LA
FABRICATION DES PRODUITS EN ALGERIE MAIS ON N'INTERDIT PAS LEUR IMPORTATION.
PEU D'IMPORTATEURS AU MONDE SONT AUSSI BIEN PROTEGES. LE STATUQUO POLITIQUE EST
SOUTENU EGALEMENT PAR CES LOGIQUES ANTIECONOMIQUES QUI AFFOLENT LES EXPERTS,
MEME LES PLUS LIBERAUX. ON CHERCHE A MASQUER LES VERITABLES MENACES. LES
LIBERTES, QUI NE SONT PAS DES PRODUITS D'IMPORTATION, NE SONT PAS UNE MENACE.
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