Dernières news du chaos libyen ordinaires : des
miliciens tentaient, hier, d'exporter leur première cargaison de brut du port
d'Al-Sedra, dans l'est de la Libye, ou pour faire plus «in» en Cyrénaïque, où
des «fédéralistes» tentent de mettre en place les éléments d'un gouvernement
autonome voire indépendant. C'est un pétrolier battant pavillon nord-coréen
mais qui serait, en réalité, selon un membre de la commission de défense du
Parlement libyen, affrété par un homme d'affaires saoudien. Business as usual,
pourrait-on dire, même si le ministre libyen du Pétrole «par intérim», Omar
Al-Chakmak, crie à la piraterie, à la souveraineté nationale. Et demande au
ministère de la Défense de «traiter» avec le navire. Mais la capacité du
ministère de la Défense et du gouvernement de Tripoli à «traiter» les graves
problèmes sécuritaires du pays est quasi nulle.
Les milices ont assurément plus de capacités que
l'armée officielle dans la Libye «libérée» par l'Otan. Cela fait plus d'un an
que le chef milicien, Ibrahim El-Jodhrane, qui s'est auto-désigné «président du
Bureau politique» de la région de Cyrénaïque, contrôle les sites pétroliers,
représentant 60% de la production du pays en temps «normal». Et met en place
les moyens de sa politique avec la création d'entités administratives, d'une
banque et d'une compagnie pétrolière. La capacité de «traiter» du ministère de
la Défense ne s'est guère manifestée. Et beaucoup de Libyens pensent que le
gros problème ne sera jamais traité par une force régulière mais que ce sera
une autre milice qui finira par le faire Les perspectives restent résolument
chaotiques. Et il y avait, jeudi, à Rome, à la réunion des «amis de la Libye»
une certaine dose de cynisme à faire des constats sur la gravité de la
situation politique et sécuritaire, sur le besoin d'un «vrai dialogue
national». Les Occidentaux n'ignorent rien des causes de l'instabilité
libyenne, ils en sont largement responsables.
Dans ce chaos libyen, il est devenu difficile de
savoir qui fait quoi et encore moins de comprendre les objectifs des milices
qui se sont totalement incrustées dans le paysage. L'indiscipline des Libyens
n'explique pas tout. Et il faut bien se demander si des intérêts extérieurs n'entretiennent
pas le chaos pour aller vers un remembrement d'une Libye «trop riche» pour être
laissée aux Libyens. Aujourd'hui, la Libye «libérée» est classée par les
«libérateurs» comme une «menace» pour l'ensemble de la région. Des forces
spéciales occidentales y agissent déjà. Le «Sud» est l'objet de toutes les
attentions alors que le séparatisme, qui se masque de fédéralisme, marque des
points et des territoires Le ministre des Affaires du Niger a invité, il y a
peu, les Occidentaux qui ont fait tomber Kadhafi à faire le «service
après-vente». Recommandation totalement superflue.
Plus on laisse le chaos s'installer dans ce pays et
plus sa «stabilisation» par la partition deviendra une option forte. La
partition pourrait même devenir un «souhait» des populations mises sous
pression de l'insécurité et la peur. Après une «révolution» totalement
inauthentique, le service après-vente viendra faire des réparations en
organisant, au nom du «droit de protéger», une séparation des régions. Ce n'est
pas une simple hypothèse. C'est déjà une démarche. La Libye risque de ne pas
survivre aux sollicitudes intéressées de ses «amis».
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