LES ANDALOUS COMPRENNENT LE SIGNAL
par M. Saadoune
Que faire d'une information comme l'accroissement du
nombre de marines basés en Andalousie en
préposition pour une éventuelle intervention dans un
pays d'Afrique du Nord ? Tout et n'importe quoi ! Les médias marocains ont
tenté, en 2013, d'en faire vulgairement un moyen de marquer un «point» contre
le voisin : cette force a été mise en place en prévision d'une crise grave en
Algérie. Bien entendu, il y a eu une source au Pentagone pour mettre tout le
monde sur un pied d'égalité : le champ d'intervention de la force spéciale,
c'est l'ensemble de l'Afrique du Nord. Et au cas où des diplomates et des
citoyens auraient des ennuis, cette force pourrait, si Washington l'autorise,
se passer de l'accord des gouvernements locaux. Avis donc à tous les
gouvernements de la zone !
Aujourd'hui,
ceux qui contestent aux Algériens le droit de s'indigner contre le quatrième
mandat pourraient faire comme les médias marocains il y a un an : dire que
c'est l'Algérie qui est «ciblée». Ils pourraient même fabriquer des connexions
entre la contestation en Algérie et la base militaire américaine de Moran.
C'est en Andalousie. Ceux qui mettent en avant la «situation sécuritaire aux
frontières» pour défendre la présumée «stabilité» pourraient croire que c'est
facile à amalgamer. Et que les «Andalous comprendront le signe». Sauf que de
nombreux Algériens qui aiment l'andalou n'ignorent pas que c'est un discours
creux. Après tout, l'Algérie officielle n'est-elle pas l'amie officielle des
Etats-Unis ? Elle n'aurait de ce fait rien à craindre. Un autre usage possible
de l'information serait de dire que l'Algérie, en raison de la manière dont se
«décide» la présidentielle et le statuquo, entre dans une situation de clivage
qui rend nos «amis» américains inquiets.
On peut, en forçant le trait comme le font les
propagandistes en général, à partir de ce fait concocter toutes les lectures
qu'on veut, genre c'est à cause du «4ème mandat» ou des «adversaires de la
stabilité». Pourtant, ni l'existence de bases américaines en Espagne et
ailleurs dans notre environnement, ni les risques sécuritaires aux frontières
ne doivent être pris à la légère. A condition de voir plus large et d'admettre
que l'intérêt de l'Algérie n'est absolument pas réductible à celui du régime ou
à un de ses clans. C'est cette confusion qui est dangereuse. Quand on essaie
d'alarmer les Algériens en donnant pour exemple la Libye, la Syrie ou
l'Ukraine, on fausse totalement la perspective. On oublie, par exemple, que Kadhafi
était «l'ami» de ceux qui sont venus le faire tomber et que son régime était
une calamité, pour la Libye comme pour les voisins. Pour la Syrie, c'est le
même regard biaisé qui tente de faire oublier que le régime de Bachar Al-Assad
s'est tellement fermé aux Syriens qu'il a créé d'énormes boulevards pour
l'action des étrangers.
L'économiste Omar Aktouf, scandalisé par l'usage qui
est fait actuellement du terme de la stabilité, a rappelé opportunément le
conseil de Machiavel : «Prince, si tu crains la révolution, fais-la !». Les
Andalous comprendraient dans ces conditions le signal (Al-Andalous Yefhamou Al
Ichara), selon la chanson. Pas les «stabilisateurs» dont l'argument se résume à
un «honnis soient ceux qui ne nous aiment pas !» (Inaal Li Ma Yhabnache), ce
stade suprême de l'argument creux !
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