Le massacre de dix sept citoyens Afghans le 11 mars
dernier, incluant au moins neuf enfants et quatre femmes, soulève
beaucoup de questions fondamentales sur la nature d'une guerre
coloniale, les pratiques d'une armée coloniale engagée dans une
occupation prolongée (onze ans) et le caractère d'un empire qui augmente
considérablement la prise de mesures arbitraires et dictatoriales pour
s'assurer la complaisance de l'opinion publique et supprimer tout
désaccord.
Après le froid et sanglant massacre de
dix sept villageois afghans dans la province de Kandahar, l'armée US et
le très complice régime d'Obama ont conçu une opération de
désinformation élaborée, exposant l'Administration à des charges de
conspiration pour avoir dissimuler des faits essentiels, falsifiant les
données et entravant la justice. Tous sont passibles d'accusations
criminelles et de poursuites judiciaires selon la procédure qui vise les
hauts-fonctionnaires US (l'Impeachment).
Ce massacre n'est qu'un parmi plusieurs
centaines d'autres commis par les forces armées US selon le président
afghan Hamid Karzaï. Cela pourrait ruiner la présidence Obama, un procès
contre lui pourrait être intenté pour entrave à la justice et il
pourrait même être envoyé en prison pour crimes de guerre.
Les mensonges délibérés d'Obama à propos
des « évènements » concernant le massacre et la responsabilité
fondamentale de l'état major pour les crimes commis par leurs troupes
soulignent l'échec de l'occupation de l'Afghanistan, la pièce maîtresse
de la politique guerrière d’Obama. Le président US a personnellement
joué un rôle dans la dissimulation de cette affaire. D'un point de vue
politique, la charge de conspiration contre l’exécutif a des
implications plus profondes et plus sauvages que le massacre lui-même,
si horrible soit-il.
Le massacre, la version officielle (1ère du nom) et la dissimulation
Selon commandement militaire US en
Afghanistan et le régime d'Obama, le 11 mars 2012, à 3 heures du matin,
un « soldat dérangé » est sorti d'une base spéciale dans la province
rurale de Kandahar et, sans ordre de son commandement, est entré dans
deux villages séparés de 3,2 kilomètres, a ouvert le feu et tué dix-sept
civils non-armés, pour la plupart des femmes et des enfants, et blessé
un nombre non-communiqué de villageois ; puis il a arrosé leurs corps
avec de l'essence, y a mis le feu pour ensuite retourner à la base
militaire afin de se rendre à ses supérieurs.
Cette « reddition », clame le Pentagone, a
été enregistrée sur une vidéo et pas moins que le Président Barack
Obama a attesté de l'authenticité de cette preuve concluante pour
l'histoire de ce soldat dérangé et tueur de foules. Le commandement
militaire a rapidement expédié le meurtrier sans nom hors d'Afghanistan,
l'a incarcéré dans la prison de très haute sécurité de Fort
Leavenworth, Kansas, et l'a identifié seulement après comme un homme de
trente-huit ans, ayant reçu plusieurs décorations au cours de ses onze
années de bons et loyaux services : le Sergent Robert Bales.
Les États-Unis ont repoussé toutes les
tentatives du président afghan, du chef de l'armée afghane et des
membres du Parlement qui voulaient interroger le Sgt Bales afin d'avoir
son témoignage et de l'emmener devant un tribunal afghan.
Selon une enquête parlementaire afghane
indépendante menée par Sayed Ishaq Gillami, et les enquêtes initiales du
Général Sher Mohammed Karimi de l'armée afghane, qui ont interrogé les
habitants des deux villages, il y a de singulières contradictions dans
la version officielle défendue par l'armée US et le président Obama. Des
témoins oculaires ont soutenu que plus de vingt soldats étaient
impliqués, aidés par un hélicoptère. Ce qu'ils ont décrit ressemblait à
un raid de nuit américain typique, qui induit systématiquement la
démolition des portes de maisons, le réveil brutal des familles
endormies et l'exécution des ses victimes.
Gordon Duff, éditeur renommé de Veterans Today,
trouve la version des villageois très plausible pour les raisons
suivantes : les villages, où les meurtres ont été perpétrés, étaient
séparés de deux miles (3,2 km), ce qui rend très improbable qu'un soldat
seul, armé jusqu'aux dents, puisse porter un jerricane de plusieurs
dizaines de litres d'essence depuis sa base jusqu'au premier village
endormi, fracasse des portes de maisons, commette dix-sept meurtres,
arrose et brûle ses victimes pour ensuite gagner, trois kilomètres plus
loin, le second village, tire, tue et brûle d'autres villageois
non-armés puis retourne à sa base pour finalement se rendre.
Il paraît beaucoup plus plausible qu'une
troupe des Forces Spéciales, lourdement armée, engagée dans une
opération de « pacification » de village, ait quitté sa base dans des
véhicules militaires, ait passé le pont aux premières lueurs du matin
comme lors d'une opération de routine autorisée par leurs supérieurs et
que les choses aient mal tourné. Ce qui était supposé n'être qu'un
habituel raid de nuit dans un village pacifié pour rechercher
d'éventuels sympathisants du régime taliban, s'est transformé en
massacre d'enfants et de leurs mères dans leurs lits avec,
virtuellement, aucun homme (maris, pères, oncles ou frères) auprès d'eux
pour les protéger. Il n'est effectivement pas rare que les paysans
afghans cachent des armes dans leurs maisons. Mais ces villages avaient
été désarmés par les Forces spéciales et les hommes étaient absents :
soit ils avaient déjà été emprisonnés dans des rafles précédentes, soit
ils se cachaient pour ne pas justement que leurs femmes et enfants
subissent de telles opérations.
Quelles que soient les raisons de cette
effroyable tuerie de femmes et d'enfants en chemises de nuit, dans ces
deux villages de Kandahar, une chose est claire : le président des
États-Unis a comploté avec son état major pour tromper la justice en
dissimulant un atroce crime de guerre, ce qui est hautement
répréhensible par « l'impeachment ».
Quand l'irrationalité de la première
version officielle est devenue dangereusement évidente au plus
superficiel des observateurs, l'équipe de « couverture » d'Obama a lancé
une nouvelle version le 26 mars : selon celle-ci, le solitaire et
dérangé sergent Bales a commis le premier massacre à l'aube du 11 mars,
est rentré à la base pour le petit déjeuner, a mangé, puis s'est dirigé
vers le second village pour une deuxième volée de meurtres en série et
est enfin rentré pour se rendre à ses supérieurs et poser dans la vidéo
de ses aveux.
Pourquoi la couverture d'Obama : le moral des troupes et la guerre en Iran.
Pourquoi le président Obama se serait-il
engagé dans une si maladroite affaire, minant un peu plus les relations
avec le président Karzaï, son état major et surtout le peuple Afghan ?
Pourquoi aurait-il risqué les charges de conspiration pour protéger des
criminels de guerre en insistant sur un mensonge aussi facilement
réfutable ?
L'histoire de l'assassin présumé, le Sgt
Bales, fournit de larges hypothèses à propos de la crise à laquelle fait
face cette armée impériale. Bales est un soldat décoré pour trois faits
d'armes en Irak et plus récemment pour son affectation afghane où il
aurait participé à des opérations similaires de « pacification
spéciale » parmi des civils dans la campagne de l'Afghanistan. Dans les
jours qui ont suivi l'annonce des nouvelles à propos du massacre, un
Afghan furieux, le président Karzaï, s'est insurgé contre les centaines
de massacres similaires qui ont été perpétrés par les États Unis
d'Amérique et les forces de l'OTAN sans jamais avoir été rapportés par
les médias occidentaux et qui donc, sont restés impunis. Karzaï en a
appelé plusieurs fois à la fin des raids des Forces Spéciales sur des
villages endormis. Mais, jusqu'à maintenant, il n’y avait pas eu besoin
que le président US mette la main à la patte pour dissimuler la vérité.
Avec le retrait prochain des USA d’Afghanistan et les sentiments
nationaux grandissant, le régime d'Obama doit cacher la vraie nature de
l'occupation. Les clients afghans de Washington ne pourront plus ignorer
bien longtemps les crimes de guerre étasuniens contre des femmes et des
enfants innocents ou d'autres non combattants. Ce qui est surtout vrai
pour les si biens nommés « villages pacifiés » où les hommes adultes
Afghans avaient déjà été arrêtés lors de rafles ou obligés de se cacher
et où le peu d'habitants restants sont désarmés et sous contrôle de
l'armée américaine.
Prenons en compte la version officielle :
pourquoi les commandants des Forces Spéciales chargés du Sgt Bales
n'ont pas entendu le son des armes à feu et les cris des victimes dans
un périmètre de cent mètres à 3:00 du matin ? Toujours selon la version
officielle, le commandement n'aurait été alerté des massacres que quand
le Sgt Bales serait rentré à la base, aurait levé ses mains en l'air
pour une vidéo de confessions à propos des meurtres et de la profanation
des dix-sept corps, principalement des femmes et des enfants. Obama a
essayé de vendre cette vidéo comme une preuve irréfutable de la version
officielle à un président Karzaï sceptique qui a immédiatement demandé
que cette dernière lui soit remise pour un examen détaillé
d'authentification. Le refus d'Obama de céder la vidéo tend alors à
confirmer son rôle dans la dissimulation des faits.
Obama s'auto-satisfait de son affirmation
quant au fait qu'un soldat seul et déséquilibré ait commis les crimes.
Cela montre de sérieux problèmes structuraux dans la guerre en
Afghanistan.
Là-bas, les troupes US sont démoralisées
et en colère car leurs commandements militaires les ont emmenées dans un
cul-de-sac, une mort certaine. Ils se sont engagés dans une longue
défaite où chaque mort du côté américain fait écho à nombre d’estropiés,
d’aveugles ou de traumatisés. Dans la guerre de Barack Obama, les
blessés sont pansés puis recyclés dans le même hachoir à viande, dans un
environnement de plus en plus hostile où le viol, la torture, la
mutilation et le meurtre deviennent les seules « récréations ».
Le Sgt Bales y a été contraint lors de
plusieurs opérations en Irak puis il fût expédié en
Afghanistan, contrairement à ses attentes de promotion et la fin promise
de ses mobilisations outre-mer.
Il y a un énorme fossé entre d’une part
le monde des seigneurs de guerre de Washington et leurs complices des
« lobbies bellicistes » et d’autre part celui des soldats qui risquent
leurs vies dans des guerres d'occupation impériale. Ces soldats, dont on
peut se passer, sont sans arrêt déployés à des fins brutales de guerres
coloniales à des milliers de kilomètres de leurs maisons pour se
confronter à un ennemi qu'ils ne pourront sans doute jamais comprendre.
Ils finissent par brutaliser les familles, les amis, les voisins et les
partisans des insaisissables combattants anticolonialistes -qui sont
partout. Dans les bureaux de Washington, aucun des politiques belliqueux
n'a jamais expérimenté la souffrance d'une guerre prolongée pour
laquelle chaque soldat est présent sur le champ de bataille. Les
soldats, comme le Sgt Bales, opèrent dans un environnement très hostile
où une bombe sur le côté de la route, une grenade jetée d'une moto ou
encore un « allié » Afghan qui retourne ses armes contre ses « mentors »
américains, sont autant de menaces omniprésentes qui pèsent sur les
chances qu’ils ont de rentrer chez eux en un seul morceau.
Obama a du comploter avec le Pentagone
pour étouffer ce massacre, défendant les officiers chargés de
« maintenir la paix » dans ces villages parce qu'il n'y a pas
d'alternatives, pas point de non retour, pas de nouvelle recrue à
engager dans une douzième année de guerre en Afghanistan. Il n'y a que
des tueurs à recycler qui veulent poursuivre leur « carrière » dans les
Forces Spéciales en s’impliquant dans des opérations « Kill and
Destroy ». De plus, Obama ne peut pas rallier les internationaux qui
s'empressent déjà de retirer leurs propres troupes de ce bourbier. Et
Obama a un problème avec ses alliés Afghans, seigneurs de guerre et
kleptocrates, qui prévoient de filer à l'anglaise avec plus de 4,5
milliards de dollars accumulés en 2011, soit la moitié du budget de
l'Etat (Financial Times, 19/3/2012). Le président Obama ne peut pas
autoriser une garnison entière, y compris les officiers, de se voir
intentée un procès pour crimes de guerre à cause d’un tel massacre. Ne
tenir personne pour responsable, sauf bien sûr l'infortuné Sgt Bales.
L'inverse pourrait inciter une rébellion générale des forces armées, ou,
au minimum, démoraliser l'élite des Forces Spéciales qui dont les
hommes attendent leur désengagement au cours des prochains retraits,
l’occupation de l’Afghanistan pouvant durer jusqu'en 2024.
Le problème a des implications qui vont
bien au-delà de l'Afghanistan : en effet, Obama a développé sa nouvelle
stratégie anti-insurrection basée sur « l'entrée facile et la sortie
sanglante » (« easy entry and bloody exit ») des Forces Spéciales
américaines, ciblant ainsi soixante quinze pays. Ces Forces spéciales
font figure de proue dans les préparations militaires de Barack Obama
concernant la Syrie et l'Iran, ces préparations ayant été développées
sur ordres des suzerains sionistes.
Finalement, l'appareil militaire entier
du régime d'Obama, si formidable sur le papier, dépend en réalité des
équipes d’Opérations Spéciales. Aussi, elles sont la pièce maîtresse de
la nouvelle guerre impériale, développée en guise de réponse aux
réductions l'armée de terre, dont le budget est de plus en plus
restreint et qui connait des mécontentements au sein de sa propre
organisation. Les opérations de ces Forces Spéciales sont montées de
façon à ne laisser aucun témoin, ou rien qui pourrait les embarrasser.
Ils peuvent être des bourreaux de femmes et d'enfants mais ce sont les
bourreaux de service de la Maison Blanche...
Malgré les crimes de guerre et les
dissimulations étatiques, la priorité du régime d'Obama est de les
défendre avec tout ce qu'il a de valable et de personnel à sa
disposition. Donc, pendant que Bales est à Leavenworth, l'élite Afghane
crie à l'injustice, les familles de Kandahar pleurent leurs victimes et
les Talibans préparent leur revanche.
Sur le plan interne, Obama fait face à
une forte opposition à la guerre coûteuse et sans fin qui a détruit
l'économie américaine et fait grandir la colère et la dépression des
forces armées. Il y a un mécontentement populaire massif des Etasuniens
contre les politiques des deux partis qui ont sans retenue envoyé des
troupes dans d’anachroniques guerres coloniales. En guise de résultat,
le président Obama a délivré un décret exécutif, l'autorisant à avoir
les pleins pouvoirs dans le but de militariser l'économie, ses
ressources et ses forces de travail. Le 16 mars 2012, Barack Obama a
déclaré un « Ordre exécutif national de Préparation des ressources à la
Défense » dans le but de subvenir à l'empire global.
Clairement, les guerres coloniales
prolongées ne peuvent pas passer outre le consentement des citoyens et
beaucoup d'entre elles ne devraient même pas exister selon les manuels
militaires et la Convention de Genève. A partir de là, seule la loi
présidentielle par décrets peut assurer la complaisance des citoyens au
pays et seules les diversions peuvent maintenir les guerres coloniales à
l’étranger. Mais ces mesures sont désespérées et temporaires : quand
les mesures extrêmes auront fait leur temps, il n'y aura plus rien pour
rebondir et rien ne pourra sauver le président de la révolte des ses
concitoyens et de ses soldats contre son empire déclinant.
Traduit de l'anglais par Investig'Action
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