L’intégrisme est-il seulement religieux ?
« L’intégrisme est une nostalgie du passé qui se prend comme une référence à l’éternel ». Étienne de Borne, philosophe français ( 1907-1993)
Au lendemain du printemps arabe, l’Occident est devenu
fort fructifère en questionnements ou , disons-le en toute franchise,
angoissé par la perspective du devenir « islamiste » de cet espace
géographique et géostratégique très important sur le plan international.
Ce printemps-là qui, pour la première fois dans l’histoire
arabo-musulmane, du moins celle post-coloniale, s’est inscrit
complètement en dehors de sa zone d’interférences culturelles,
médiatiques, philosophiques et politiques, l’a rendu perplexe, dubitatif
et à quelques degrés près jaloux.
Les sociétés arabes vont-elles s’islamiser à l’extrême
et devenir ainsi des modèles incontournables d’intégrisme ou, au
contraire, les premiers effluves enthousiastes des adeptes de « la
Charîa » en Tunisie, Libye, Égypte et ailleurs vont-ils finir par être
absorbés tôt ou tard par le vent de la démocratie ? En d’autres
termes, le printemps arabe, à défaut d’être pro-occidental, serait-il
forcément pro-intégriste ? La démocratie et l’Islam sont-ils à ce point
incompatibles au point de susciter l’inquiétude et la peur chez les
Occidentaux ? Intégrisme signifie-t-il vraiment « religion »,
intolérance et étanchéité d’esprit ? Adonis, le philosophe et poète
syrien, connu pour son athéisme avéré aurait refusé de se rallier aux
cris des révoltés damascois jugeant que tout soulèvement qui émanerait
des mosquées est en son origine même une démarche faussée.
Mais de quel côté se situe réellement l’intégrisme ? De
celui des islamistes, des chrétiens, des laïcs ou des démocrates à
l’occidentale ? Depuis fort longtemps, on a cru comprendre que
« l’intégrisme » est intrinsèquement lié au fait ou au phénomène
religieux alors que présentement les conjonctures socio-économiques et
les mutations sociales du monde et particulièrement de la sphère
arabo-musulmane en ont prouvé le contraire. De quelque angle que l’on se
le projetait, si intégrisme il y a, l’on se rendrait facilement compte
que la croyance est source de dogmatisme, d’ignorance et parfois
d’incertitude mais que la pensée également pourrait provoquer
l’irréparable et l’inconcevable.
Que l’on songe un peu à l’idéologie nazie, au Fascisme
italien et au Stalinisme soviétique. Peu importe, les doctrines, les
religions, ou les philosophies « politico-sociales », l’essentiel dans
ces « idéologies » est que l’idée en tant que telle s’est substitué à
la foi en la devançant pour la réincarner par la suite. Le Fascisme
s’est mué en religion chez les italiens. De même le Stalinisme ou le
Nazisme chez les allemands ou les russes ont été plus qu’un rite
divinatoire. C’est sans l’ombre d’un doute dans ce « magma conceptuel »
que l’on peut parler d’intégrisme au sens large du terme.
A l’aune des révolutions arabes de cette première
décennie du XXI siècle, la rue est inquiète car elle ne s’est pas
seulement retrouvé face à son destin mais aussi et surtout entre
l’enclume de la dictature ou « ses déchets » charriés par tant d’années
de spoliation, de privation ainsi que de propagandes et le marteau ou
« l’hydre » de « l’intégrisme » tout azimuts (religieux, laïc,
pro-occidental et anti-Occidental). Le choix est plus que difficile ; il
est même, paraît-il, risqué et inconcevable pour des masses plus ou
moins acquises aux idéaux de la modernité et qui n’aspirent en réalité
qu’à vivre en paix et en sérénité.
Mais, étant fort longtemps occultée, la question de
l’intégrisme prête souvent à controverse. Ce mot tant galvaudé, a meublé
pendant très longtemps l’espace médiatique, la scène politique et
préoccuper outre mesure les chancelleries occidentales vu qu’il est le
plus souvent attaché, à tort ou à raison, à sa seule dimension
religieuse. Qui dit intégrisme, dit certainement religion alors qu’au
fond des choses, ce n’est qu’un amalgame étymologique et terminologique,
voire une distorsion sémantique et sémiologique de la vraie
signification du mot.
Qu’est ce donc qu’être intégriste ? Serait-il le fait
d’appartenir à une secte religieuse, à un courant de pensée ou tout
uniment l’acte de s’astreindre à une simple attitude de réserve et faire
preuve par là d’un excès de zèle et d’une véritable ferveur
religieuse ? En vérité, à bien y regarder, aucune des trois propositions
ne siérait ni ne se collerait systématiquement et thématiquement à la
notion de l’intégrisme si l’on s’accordait à dire que l’intégrisme vient
à l’origine de l’adjectif « intègre » qui lui-même est polysémique dans
la mesure où d’une part, il signifie « isolé », « seul ». D’autre
part, il porte en lui-même le sens de l’homme honnête, noble, et pur.
Le terme « intégrité », comme substantif est, quant à
lui, fort éloquent puisqu’il exprime l’idée de la dignité, de
l’amour-propre et de l’estime du soi. On distingue en ce sens,
« l’intégrité physique » de celle qui est purement « morale », alors que
la première cadre avec le respect du corps, de son entretien et de la
prise en considération en termes psychologiques de cet « être
minéralisé » que l’on appelle homme comme dirait la philosophe
française « Simone de Beauvoir » (1908-1986), la deuxième par contre
insiste sur le besoin plus que stressant de ce corps d’entretenir son
épanouissement spirituel, son équilibre psychique interne et son droit à
une vie de dignité. En ce point, il serait fort juste de se départir de
ce penchant « négativiste » et « négativisant » que l’on assigne fort
volontiers à l’intégrisme puisque un excès de droiture ne va au
demeurant qu’à l’ordre et l’harmonie et non plus au chaos et à la
conflictualité comme le suggère l’usage de ce mot en temps actuels.
La tournure sémantique qu’a prise donc le mot en langue
française a dénaturé son essence même, « intégrisme », « fanatisme » et
« fondamentalisme » jouent à cet effet la même fonction langagière que
le mot « extrémisme » bien que les trois termes sont totalement
différents les uns des autres. Alors que le premier terme désigne un
positionnement neutre, soit négatif, soit positif poussé à son
paroxysme, le second ne se réfère qu’à une position qui privilégie un
certain attachement addictif, paranoïaque et exalté aux choses, aux
êtres et aux idées (idoles, personnalités politiques et historiques
hors du commun, un idéal humain, une idéologie hégémonique...etc)
tandis que le troisième est indubitablement, l’expression d’un retour
urgent aux fondements « oussus » qui se résument généralement dans les
lois divines ou morales en opposition aux lois positives et humanistes,
la sacralisation des traditions ainsi que la mise en perspective des us
et coutumes.
En toile de fond, l’on trouverait le terme
« extrémisme » qui chapeaute le tout dans la mesure où il est la
représentation de ce positionnement aux antipodes des pensées
philosophiques ou des idées du socialement ou « politiquement correct ».
En ce sens, les trois définitions reflètent leur nette différenciation.
Car, à l’origine n’ayant aucun lien « notionnel », elles se sont vu, en
entrant dans l’usage courant, octroyer une autre dimension en se
formatant, se formalisant et s’uniformisant dans une même conception
thématique ou idéologique pour désigner en fin de compte cet entêtement,
excès, et « extrémisme » de vision sur un phénomène donné.
Ceci dit, s’étant appuyé sur l’usage fréquent et
« conventionnel » des termes, les spécialistes ont donné un sens commun
et une définition unanime à « l’extrémisme » en général en mettant de
côté toutes les différences qui y existent. Néanmoins, il convient de
préciser que l’intégrisme ne se limite pas seulement au seul domaine
religieux, il pourrait être également rattaché à la pensée séculière,
laïque et laicisante. A titre d’exemple, l’athéisme, bien qu’il soit une
manière et un canal de pensée en dehors de la sphère religieuse, est on
ne peut plus, une des formes de l’intégrisme car il nie globalement et
dans le détail le champ de « la croyance spirituelle » et vénère par
contrecoup celui de « la pensée matérielle ». Ce qui rend la rencontre
de deux sphères extrêmement difficile, voire impossible.
Encore faut-il rappeler qu’historiquement les
« Mutazilites » (les ermites/ les neutres), ainsi que « Ikhwan Al-safa »
(les frères de la pureté), furent les deux célèbres sectes
rationalistes et philosophiques apparues en terre d’islam aux temps des
« Abbassides » entre le VIII et XIII, plus exactement à « Bassorah » et
« Bagdad ». Influencées par l’héritage « aristotélicien » et le legs de
l’exégèse que le coran aurait laissé comme marge de manœuvre à la
pensée spéculative, elles ont réactualisé le débat théologique sur des
fondements purement philosophiques.
Ainsi assistait-on à l’apparition de « l’Islam
rationaliste » au sens philosophique du terme si l’on prend le
rationalisme comme philosophie « cartésienne » basée essentiellement
sur le défrichement du doute, l’explication rigoureuse des textes et la
remise en cause du « dogmatisme » à tous les niveaux interprétatifs
possibles. A ce sujet, l’historiographie musulmane ne pourrait pas
effacer les attaques dont ces « cartésiens » avant l’heure en terre
islamique étaient la cible de la part des « ritualistes » ou
« littéralistes » (al-naqliyine ou al-harfiyine), adeptes du rigorisme
théologique et de l’application à la lettre des versets coraniques.
Aristotéles (384-322 A.J) « le meilleur maître » comme
on l’appelait à la Cité de l’ancienne Grèce, avait en son temps déjà,
contrairement à « Platon » et à « Socrate » ses anciens maîtres, donné
plus de priorité aux sens et à la sensibilité dans l’explication du
monde qu’à toute autre chose, c’est immanquablement ce raisonnement
philosophique que « les Mutazilites », étymologiquement « intégristes »
car isolés de la multitude et du bruit du monde ont suivi. Le conflit
philosophico-théologique qu’ils ont provoqué concernant la problématique
du « Coran crée ou incrée » les a longtemps mis sur la sellette.
C’est pourquoi ils avaient dû adopter la voie
conciliatrice en mettant sur pied la doctrine de « Ahl al-adl wa
al-tawhid » (secte de la justice et du monothéisme) signifiant par-là
qu’il n’étaient aucunement des blasphémateurs, des apostats ou des
renégats de quelque nature qu’elle soit de la religion du prophète. Le
Calife Al-M’amun (786-833) en avait fait l’idéologie officielle du
Califat en combattant les « ritualistes », ce qui est connu dans
l’histoire arabo-musulmane comme étant la grande épreuve « Mihna »,
« al-Mutassim » et « Al-wathiq », ses deux successeurs en avaient fait
de même, les persécutions ont atteint un tel degré de monstruosité
qu’ils ont dégénéré en emprisonnements, tortures et meurtres.
En revanche, sous le règne de « Al-Mutawakkil »
(821-861), l’équation est inversée et ce fut au tour des « Mutazilites »
de subir les affres des « Naqliyine » ou ce qu’il convient d’appeler en
termes plus compréhensibles « les Salafistes », secte religieuse guidée
par le maître de l’une des quatre grandes écoles de l’Islam, l’imam
« Ahmad Ibn Hambal »(780-855) dont l’être et le paraître correspond
parfaitement au parcours du prophète, ses compagnons et la communauté
des croyants des premiers temps « Al-salaf assalih » dont les bienfaits,
les actes de bravoure et les marques de civilité et de l’obéissance à
la volonté divine sont regroupés dans « la Sunna ».
Cette dernière est l’ensemble des écrits, des hadiths et
des discours qui résume les mœurs générales, les coutumes et les
prescriptions religieuses fondamentales de la première communauté des
croyants à « Mecque » et à « Médine » que le musulman pratiquant est
tenu d’appliquer suivant en cela le parcours prophétique. Ici, il est
fortement significatif de dire que si le terme d’« Al-Sunna » est
accepté, le « Sunnisme » par contre comme doctrine théologique serait à
n’en point douter une fabrication notionnelle et sémantique qui n’a rien
à voir avec la pratique car à l’origine tous les musulmans sont et
devraient être « sunnites ».
Dans un autre contexte, la création de « Dar-al -Hikma »
(maison de la sagesse) à Bagdad par le Calife mélomane et amateur des
arts et lettres « Harûn Al-Rachid » (786-809) avec l’appui de la famille
mécène des « Baramikas » et la continuation de cette tradition par son
fils « Al-Mamûn » témoigne de l’une des périodes les plus prospères et
les plus fructifères de la civilisation arabo-musulmane où les sciences
de la raison, de la spéculation philosophique et des débats théologiques
ont été favorisées par un grand climat d’ouverture des esprits.
Ce qui est digne de noter après tout est que les adeptes
du « phénomène intégriste », profitant de la relâche des derniers temps
et de « la décadence » de l’Empire musulman, ont subitement repris du
poil de la bête, la secte des « hachachines » qui y eut sévi entre 1092
et 1265 et dont dérive le mot assassin en fut la parfaite illustration.
Dans ce cas précis, l’on pourrait dire que les deux sphères profanes et
croyantes, du temporel et de l’atemporel, d’ici-bas et de là-bas
(l’au-delà) furent souvent en conflit.
C’est ce cheminement historique qui aurait également
caractérisé l’Europe, la guerre des cent ans (1337-1453) à l’origine
féodale, la longue parenthèse du moyen âge, et les conflits
interreligieux subséquents prouvent, si besoin est, que l’intégrisme a
rythmé et jalonné la vie de l’Occident judéo-chrétien. Cela a duré
pratiquement depuis le schisme du Donatisme qui a pris naissance dans la
diocèse romaine d’Afrique du Nord entre le IV et le V siècle jusqu’à
l’avènement de l’ère des Lumières au tout début du XVIII siècle. La
condamnation du savant italien Galilée (1564-1642) par l’Église pour
hérésie et blasphème après avoir défendu « la conception copernicienne »
de l’univers et la théorie de la rotation de la terre en est en ce
point un précédent à la fois très symbolique et très symptomatique, « la
Reconquista » de l’île ibérique, les tribunaux d’Inquisition en Espagne
catholique, la chasse aux sorcières ainsi qu’au faciès qu’ils érigèrent
en mode de vie à l’égard des musulmans et juifs ne sauraient être
qualifiés mutatais mutandis que d’intégrisme.
Celui-ci est, s’il ose dire, une ignorance structurée
dans l’anarchie et la mauvaise connaissance de l’autre, la
ridiculisation de ses croyances ou sa culture et sa mise à l’écart que
ce soit dans le domaine de pensée ou dans celui de la puissance.
Néanmoins, ce phénomène ne relève pas seulement du religieux et
d’ecclésiastique, il les transcende en bien des points pour
« phagocyter » la sphère du temporel et du séculier. A titre d’exemple,
la mise au rebut de la dimension religieuse dans « la loi sur la
laïcité » de 1905 en France est, indubitablement une des plus dures
formes d’intégrisme à l’égard du fondement judéo-chrétien de la
civilisation et de la culture de ce pays alors que les fêtes religieuses
de « Pâques » et de « Nativité » sont socialement célébrées en grandes
pompes.
C’est certainement le modèle français qu’ont pris en
spécimen la Turquie de « Kamal Atatûrk » et la Tunisie de « Bourguiba ».
Pays dont les deux processus de « laïcisation forcée » sont plus des
opérations de démolition macro-sociétale du « background » éthique et
social de la diversité et de la libre pensée de leurs peuples respectifs
qu’une saine entreprise de « reconsidération anthropologique » de leur
dimension pana-islamique. Car, après plus d’une cinquantaine d’années,
la donne islamiste a brouillé les cartes et risque de remettre en
question et de façon brutale ce « choix non concerté » des « Raîs ».
A dire vrai, les exemples de l’intégrisme et de
l’enfermement de la pensée sont légion dans l’histoire européenne
ancienne et moderne, les épisodes tragiques de la Réforme et de la
Contre-Réforme où l’Église catholique romaine et les adeptes du
protestantisme guidés par « Martin Luther » (1483-1546) s’étaient
affrontés ne sont aucunement négligeables dans la mesure où le
radicalisme de la foi l’a de loin emporté sur la clairvoyance de la
pensée, l’idée de « la croisade » comme ciment de la puissance et de la
guerre sainte comme une forme d’hégémonie religieuse, pourtant fort
surannées au commencement du XV siècle n’ont pas encore été évacuées des
cerveaux des pasteurs et papes, on assiste même dans certains contextes
à la glorification du pape Urbain II (1088-1099), initiateur des
croisades et des idées de « Bernard de Clairvaux » (1090-1153), un abbé
fort conservateur et contempteur de la renaissance qui aurait déformé le
sens du concept de « guerre juste » du prêtre berbère « Saint
Augustin » (354-430) pour le transformer en « guerre sainte ».
La métaphysique d’Aristote en vigueur depuis l’ère de
l’une des figures saillantes du christianisme « Saint Paul » et qui a
été le prototype de la théologie médiévale pendant des siècles a été
réfutée par « Luther » qui, gêné par l’éloignement de la foi qu’a causé
la théologie aurait affirmé un jour qu’« il faudrait brûler Aristote ».
« Henri VIII », Roi de l’Angleterre, avait, quant lui rompu de force
d’avec l’Église de Rome au XVI siècle, ce que l’historiographie
chrétienne aurait qualifié du schisme anglican.
Même dans le camp des « humanistes », la perspective de
la défense de « la chrétienneté » par la force fut souvent mise en
évidence, le célèbre écrivain espagnol « Miguel de Cervantes »
(1547-1616), rescapé de la bataille navale de « Lépante » entre la
flotte ottomane et la ligue chrétienne en 1571, aurait consacré tout un
chapitre dans son roman « Don Quichotte de la manche » au culte des
armes et des lettres. C’est que, dans la conception médiévale,
l’humanisme du hollandais Érasme (1469-1536) fut, pourrait-on dire, un
« intégrisme » larvé sous les habits du siècle de la Renaissance et des
Lumières.
Il est par ailleurs fort intéressant de mettre en
évidence que même en langue arabe, l’amalgame terminologique ou ce que
l’islamologue algérien « Mohammed Arkoun » (1928-2010) appelle « dérive
sémantique » est bien présent, l’on a l’habitude de traduire
généralement le mot « intégrisme » par trois termes distincts les uns
des autres « Al-oussouliya », « Al-tataruf » et « Al-tashadud ».
Alors que le premier concept signifie à l’origine le
retour aux sources « Al-oussoul » (les préceptes religieux),
c’est-à-dire, les principes de l’exégèse musulmane ou de « la
jurisprudence » « Oussoul Al-fiqh », qui sont eux même les bases
fondamentales d’une « science théologique » à part entière, la notion
de « Al-tataruf », quant à elle, vient du « taraf » qui exprime
l’idée une partie, d’un aspect ou d’un principe mis de côté ou négligé.
En revanche, ce terme a, par une espèce d’extension sémantique
exagérée, épousé les contours de la conception bien connue de
« l’intégriste » bien qu’il véhicule fondamentalement une mise en
quarantaine d’une frange, secte ou doctrine, c’est-à-dire qu’il met en
avant ce qui est « exclu » au détriment de la force ou de l’idéologie
« excluante ».
Ce qui nous permet par conséquent de dire qu’il ne
cadre plus avec l’essence actuelle du mot « intégrisme » au sens
« défiguré » puisqu’il est l’expression d’une idéalisation d’une vision
étriquée de la religion. En ce contexte, il est une déformation
langagière d’une autre distorsion théologique si l’on se met d’accord
ici que le terme « intégrisme » est en lui-même une fausse définition.
Le troisième concept « Al-tashadud » qui se lie aux deux premiers dans
le contexte musulman dépeint, avec une nuance plus ou moins détectable
ou comprise, la position ou l’attitude d’un individu ou d’un groupe
quelconque qui s’accroche coûte que coûte aux textes originels et aux
sources basique d’une doctrine, idéologie ou tout simplement à une idée
précise.
Tout cela nous permettrait en dernière instance
d’affirmer que « l’intégrisme » en tant qu’idée, notion et concept
philosophique bien distincts sur la sphère « abstractive » a été
falsifié et dénaturé sur le plan de « la praxis sociale », raison pour
laquelle, les Occidentaux mélangent « Charia » et « intégrisme » et les
musulmans ne distinguent pas nettement la différence entre
« l’anti-occidentalisme » et « la pratique de la bonne foi ». C’est
sûrement ce qui a fait dire à un grand Mufti musulman qu’il n’y a plus
d’invasion culturelle de l’Occident mais tout uniment un vide culturel
de l’Orient, à méditer !
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